COVID : moins de surveillance ?
Moins du cinquième des contraventions pour infractions aux règles de santé publique ont été données au cours des six derniers mois.
Du début de la pandémie jusqu’au 31 janvier dernier, 70 amendes pour non-respect de la Loi sur la santé publique ont été distribuées aux Territoires du Nord-Ouest. Une douzaine l’ont été depuis la mi-aout, période de six mois pendant laquelle le territoire a connu ses deux pires éclosions – l’une cet automne, due au variant Delta, et l’autre après les Fêtes, à cause du variant Omicron. Deux contraventions ont été remises en décembre et aucune en janvier.
Lors de l’éclosion cet automne, l’administratrice en chef de la santé publique des TNO, la Dre Kami Kandola, avait annoncé début octobre que son gouvernement « envisageait d’augmenter sa capacité à appliquer la loi dans les collectivités où il y a des restrictions ».
Or, seulement quatre contraventions de plus ont été remises depuis cette annonce, soit deux en octobre (le 9 et 26) et deux le 6 décembre.
La cadence à laquelle ont été distribuées les amendes n’a ainsi pas augmenté, contrairement à ce que le gouvernement avait laissé entendre. Elle n’est, dans tous les cas, pas proportionnelle au nombre de cas de COVID-19 actifs dans les TNO ; au moins 19 contraventions remises l’ont été alors qu’il n’y avait aucun cas actif de COVID dans le territoire.
Le Groupe de travail sur l’application et le respect des mesures d’urgence du Secrétariat pour la COVID-19 du GTNO, responsable de donner les contraventions, le fait-il avec la même vigilance qu’au début de la pandémie ? A-t-il réduit sa surveillance dans les derniers mois ?
Plusieurs causes pour non-respect de la Loi sur la santé publique sont actuellement inscrites au rôle du tribunal. (Crédit photo : Batiste Foisy, Archives Médias ténois)
« Les agents du Groupe de travail continuent à répondre et à enquêter sur les plaintes que reçoit Protégeons les TNO », répond brièvement par courriel Richard Makohoniuk, gestionnaire des communications au Secrétariat de coordination pour la COVID-19. Cette équipe, enchaine-t-il, met l’accent sur « l’éducation en lien avec les arrêtés de santé publique depuis le tout début de l’état d’urgence sanitaire » et « ne donne des contraventions que lorsque les tentatives de mise en conformité n’ont pas été efficaces pour modifier les comportements ».
Selon le dernier Rapport sur les statistiques unifiées relatives à la COVID-19, publié fin octobre, le Groupe de travail sur l’application et le respect des mesures d’urgence avait reçu près de 8400 appels et courriels depuis le 26 mars 2020. Cela avait généré environ 1200 avertissements verbaux et écrits et, fin octobre, un total de 65 contraventions. Près de 55 % des enquêtes avaient alors été initiées à la suite d’un présumé non-respect de l’auto-isolement ou des restrictions liées aux voyages. Aucun chiffre plus récent n’a encore été publié.
On peut par ailleurs supposer que les contraventions peuvent être remises un certain temps après l’évènement à cause des enquêtes nécessaires.
La moitié des contrevenants condamnés, peu ont payé
Jusqu’à présent, 35 contrevenants sur les 70 ont plaidé coupables ou ont été reconnus coupables. Il y a 20 amendes non réglées, soit parce que les contrevenants n’ont pas encore été inculpés et ont un délai pour payer (17 cas) ou parce qu’ils la contestent (3 cas). Le Monkey Tree, la seule entreprise visée par une amende (5175 $) conteste d’ailleurs l’accusation d’infraction sommaire devant la cour et la date du procès est constamment repoussée depuis un an. Enfin, 15 autres amendes ont été retirées pour « coopération, inaptitude à subir un procès ou autre raison », précise le Secrétariat.
Parmi les contraventions remises aux individus, 66 étaient de 1725 $ « pour avoir omis de s’isoler ou pour ne pas avoir respecté un arrêté de santé publique » et trois de 500 $ pour avoir « sciemment fourni de faux renseignements à un agent de la santé publique ».
Du lot, seulement sept contrevenants ont payé, précise Richard Makohoniuk, au Secrétariat de coordination pour la COVID-19. Six ont versé le montant de 1725 $ et l’autre de 500 $.
« Que seulement sept sur 35 contrevenants déclarés coupables aient payé, cela semble assurément un taux décourageant », commente l’avocat Tú Pham, qui pratique à Yellowknife et offre de l’aide juridique, joint par Médias ténois. Mais ce chiffre ne le surprend pas pour deux raisons : « Bon nombre de ces contraventions ont été données à des gens qui n’ont guère les moyens de payer une amende de 1725 $. Aussi, je suppose que plusieurs des condamnations ont été prononcées en l’absence de l’accusé. Certaines personnes pourraient ne même pas savoir qu’elles doivent payer une amende. »
Qu’autant d’individus aient plaidé coupables ou aient été trouvés coupables n’étonne pas non plus l’avocat. « Ces contraventions reposent fortement sur des preuves amassées par les agents de la santé publique, dit-il. Ces agents sont surement professionnels dans leurs enquêtes et ont dû fournir des dossiers solides au procureur. » Et c’est sans compter que ce haut taux de condamnation est influencé par le nombre de personnes condamnées en leur absence faute de s’être présentées en cour, rappelle-t-il.
Si le rythme de remise des contraventions semble avoir diminué au cours des six derniers mois, l’avocat Tú Pham s’attend à voir s’ajouter d’autres contraventions, tant qu’il y aura des restrictions. « J’ai l’impression que le GTNO a besoin de continuer de donner des amendes, lorsque nécessaire, pour projeter une apparence de confiance au public, comme quoi ils ont le pouvoir de faire respecter les arrêtés de santé publique en vigueur. »
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