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le Vendredi 8 septembre 2006 0:00 Éditorial

Patience et dur labeur

Patience et dur labeur
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Les différents problèmes sociaux qui affligent non seulement Yellowknife, mais bien l’ensemble des communautés du Nord, ne devraient surprendre personne. En fait, cette tendance n’est vraiment pas nouvelle. Depuis mon arrivée dans les TNO, il y a de cela plus de 16 ans, j’ai été aux premières loges pour observer ces malaises, tant à Yellowknife (où j’ai habité 13 ans) qu’à Tulita et dans ma nouvelle ville de résidence, Hay River.

Lors d’une entrevue réalisée avec un prêtre oblat qui parcourait le Sahtu, ce dernier exprimait l’opinion qu’une partie des problèmes sociaux des populations autochtones de cette région provenait du fait qu’ils apprenaient encore à vivre en communauté. Il soulignait alors que la plupart des familles maintenant sédentaires vivaient un mode de vie nomade à peine quelques décennies plus tôt. «On leur a demandé de faire en quelques années une transition qui a pris des siècles dans d’autres sociétés », expliquait-il.

Il s’agit là sûrement d’un facteur pouvant expliquer l’ampleur des problèmes sociaux. Mais il y en a plusieurs autres.

Non seulement ces personnes se sont-elles retrouvées à vivre dans des communautés, mais en plus, le mode de subsistance qui leur était offert était totalement différent. D’une société de cueilleurs vivant principalement de chasse et de pêche, ils se sont vus plongé dans une société de salariat où leurs connaissances traditionnelles ne trouvaient que peu d’applications et où les bons emplois leur échappaient. Sans bagage académique ou même d’antécédents familiaux axés sur la réussite scolaire, les premières décennies de vie en communauté n’auront pas été très fertiles en obtention d’emplois rémunérateurs. Ne restait plus que le gouvernement et ses programmes d’aide sociale.

Déracinés et mal préparés pour vivre dans une société moderne aux emplois spécialisés, il est peu étonnant que les communautés autochtones voient passer le train du progrès économique sans grand enthousiasme et, surtout, sans grand espoir d’en être les grands bénéficiaires.

Il faut aussi mentionner que le dernier demi-siècle a vu apparaître plusieurs autres problèmes liés à l’ouverture de ce territoire au reste du monde, notamment les abus de drogue et d’alcool. C’est un problème dans le Sud et les populations du Nord en souffrent aussi.

S’attaquer aux problèmes sociaux du Nord dépasse l’usage de simples remèdes palliatifs du genre maisons d’hébergement ou centre de désintoxication qui ne s’attaquent pas aux causes du problème. Si on espère un jour s’en sortir, ce sera en s’attaquant aux causes plutôt qu’aux effets. Et ça, ça prendra pas mal de temps et ce ne sera pas facile.