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le Vendredi 23 mars 2007 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:36 Politique

Budget fédéral: Le déséquilibre n’est pas réglé

Budget fédéral: Le déséquilibre n’est pas réglé
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Le budget fédéral dévoilé le 19 mars par le ministre Jim Flaherty ne plaît pas au député de Western Arctic, Dennis Bevington. Le néo-démocrate votera contre le plan budgétaire qui, estime-t-il, ne rétablit pas l’équilibre budgétaire entre les territoires et Ottawa.

Point central de cet exercice financier, « la fin du déséquilibre fiscal » (voir autre texte en p. 14 et 15) se traduit dans le Nord par un réajustement de la Formule de financement des territoires. S’inspirant des recommandations du Conseil de la fédération présentées en avril 2006, la nouvelle formule propose des subventions distinctes pour chacun des territoires établies en fonction des revenus autonomes et des besoins de chacun. Ainsi le modèle dit du « magot fixe », source de compétition entre les territoires, est abandonné.

Dans les territoires ayant conclu des ententes de dévolution de pouvoirs (c’est-à-dire le Yukon), la nouvelle mouture de la Formule prendra en compte 50 % des revenus tirés des ressources naturelles, un écart important avec les recommandations du Conseil de la fédération qui suggérait qu’on ne tienne pas du tout compte de ces revenus. Selon les documents du budget, cette mesure vise à inciter « la mise en valeur des ressources naturelles ».

Le nouveau calcul prévoit qu’ensemble les trois territoires recevront 2,2 milliards de dollars en 2007-2008, soit 115 millions $ de plus qu’en 2006. Notons qu’il était déjà prévu que la formule soit bonifiée de 74 millions $ et donc que l’annonce ne compte, finalement, que 41 millions de nouveaux dollars.

De ce montant, les TNO recevront 788 millions $ (10 millions de plus que le minimum garanti). Le Yukon touche 540 millions $ (3 millions de plus que le minimum) et le Nunavut reçoit la part du lion avec 883 millions $ (28 millions de plus que le minimum).

Ces montants n’impressionnent guère le député de Western Arctic. « Ce n’est pas beaucoup plus : approximativement 3,5 % de plus que l’an dernier [pour le gouvernement des TNO] », analyse-t-il.

Il ne voit pas non plus de percée significative dans l’augmentation des transferts fédéraux en santé et en éducation post-secondaire. « On conserve encore le modèle de calcul per capita », signale Bevington. Les élus territoriaux dénoncent depuis longtemps ce calcul qui désavantage le Nord où la population est petite et l’offre des services plus coûteuse.

Dévolution : au point mort

Mais là où le budget Flaherty s’écarte le plus des recommandations du Conseil de la fédération, c’est dans le peu d’espace qu’on accorde aux accords de dévolutions de pouvoirs et de partage des revenus provenant des ressources. Dans le rapport d’avril 2006, la conclusion de tels accords était présentée comme le moyen par excellence pour rétablir l’équilibre fiscal.

« Même si le gouvernement fédéral manifeste depuis presque vingt ans la volonté politique de mener à terme la dévolution, la question d’un partage équitable des revenus provenant des ressources n’est toujours pas réglée entre les Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement fédéral », écrivaient les auteurs du rapport Réconcilier l’irréconciliable. On ajoutait qu’il que les trois territoires du Nord devraient assumer « une responsabilité de type provinciale » sur les terres et les ressources naturelles

Dans son discours, le ministre Flaherty n’a pas évoqué une seule fois la dévolution ou le partage des revenus. Dans les documents du budget cependant, quelques paragraphes abordent la question. On indique que « les discussions se poursuivront en vue d’une dévolution semblable [à celle conclue avec le Yukon en 2003] ». Le premier ministre des TNO, Joe Handley, a souvent critiqué l’entente yukonnaise qu’il estime être désavantageuse.

Pour sa part Dennis Bevington a rétorqué qu’il était temps de passer à l’action dans ce dossier. « On parle de dévolution ; très bien. Mais quand est-ce que les paroles vont faire place aux actes ? »

Le député salue néanmoins la décision d’augmenter la limite de crédit du gouvernement des TNO qui passe de 300 millions $ par année à 500 millions $. « C’est une bonne nouvelle, mais ç’aurait dû être fait il y a longtemps déjà ».

La prime d’éloignement inchangée

Alors que de nombreuses voix se sont élevées récemment pour réclamer une hausse de la « prime d’éloignement », ce n’est pas encore cette année que ce crédit d’impôts offerts aux ménages nordiques sera réajusté.

La « déduction pour les habitants des régions éloignées » – c’est son nom officiel – demeure fixée à 15 $ par jour de résidence pour tous les habitants du Nord qui passent plus de six mois par année dans la zone visée par la Loi. Ce taux est inchangé depuis 1989. Depuis ce temps, l’indice des prix à la consommation à Yellowknife a augmenté de près de 50 %.

Une annonce a cependant été faite concernant la « prime d’éloignement » : les habitants du district municipal de Mackenzie en Colombie-Britannique y sont désormais éligibles. « C’est un comté conservateur », note Bevington.

Aires protégées

Le budget conservateur offre de l’argent neuf pour la création d’aires protégées dans les Territoires du Nord-Ouest : 10 millions de dollars sur deux ans sont alloués à cet effet. Selon les documents du budget, l’argent servira à « l’établissement ou à l’expansion de zones protégées » aux TNO. Le ministre de l’Environnement ayant déjà annoncé 5 millions $ pour la création du parc Sahoyùé-Ehdacho, il y a fort à parier que le reste ira dans l’expansion du parc Nahanni, le seul projet d’agrandissement de parc à l’étude dans les TNO.

Et pour les Autochtones ?

Enfin, le député de Western-Arctic a déploré le manque d’engagements envers les Autochtones énoncés dans le budget. La seule mesure spécifique aux Premières Nations énoncée dans le budget est l’adoption d’une nouvelle norme pour assurer l’accès à l’eau potable dans ces communautés. On ne précise pas quelle somme sera affectée pour assurer le respect de cette norme..

« C’est une honte qu’on consacre si peu aux Autochtones alors que les disparités sociales sont si importantes », dénonce Bevington.

Son indignation trouve échos dans les commentaires de l’Association canadienne des femmes autochtones et l’Assemblée des Métis du Canada, qui s’inquiètent tous les deux de l’absence de financement spécifique aux Autochtones.