J’ai deux dernières choses à dire avant de partir du Nord (ben oui, m’en retourne au pays du doré et de la truite mouchetée!). Premièrement, c’est pas difficile de pêcher à la mouche. Deuxièmement, malgré la croyance populaire, on peut pêcher à la mouche dans le Nord et ça marche.
La pêche à la mouche, certes, exige un peu plus d’entraînement et de connaissance que la pêche au lancer léger. Par contre, la technique n’est pas aussi inaccessible qu’il n’y paraît. Si vous pouvez apprendre à maîtriser le swing du golf et à utiliser adéquatement les clubs, vous pouvez certainement apprendre à pêcher à la mouche. On dit que les deux exercices demandent à peu près autant de travail. Je n’entrerai pas dans les détails puisque plusieurs bons auteurs — notez au passage le nom de Jeannot Ruel — ont écrit d’excellents ouvrages sur les techniques, l’histoire et même la philosophie de la pêche à la mouche. Je voulais seulement souligner ici le fait que tout le monde peut pêcher à la mouche. Sans vouloir faire de jeu de mots douteux, toutes les personnes que j’ai vues s’initier à la mouche en ont pogné la piqûre! C’est un passe-temps fascinant et passionnant qui implique une communion quasi parfaite avec son environnement et son équipement. Plus encore, après quelques heures de pêche au beau milieu d’une rivière, on se sent partie de la rivière, des roches, des arbres, des insectes, du vent… Le fait de tenir la soie entre ses doigts lors du combat, de sentir le poisson sans intermédiaire autre que le fil, est infiniment plus jouissif que de retenir la manivelle d’un moulinet ordinaire. Je pense sincèrement que chaque partie de pêche à la mouche, au même titre que la prière du moine, via la plénitude, le calme et le silence, apporte à l’artiste, dans la plus grande humilité, connaissance de soi et sagesse.
Oui, on peut pêcher à la mouche dans le Nord. On peut pêcher à la traîne, on peut pêcher en profondeur, en surface, dans les herbages, en rivière, en lac, au bas des chutes, du haut d’une falaise, en bateau, à pied… La pêche à la mouche offre un plus grand éventail de possibilités que tous les autres types de pêche réunis. On peut tout pêcher à la mouche, et on peut pêcher partout, des plus grandes étendues d’eau aux recoins de rivières les plus isolés. Tout est dans l’équipement et la technique appropriés. D’ailleurs, beaucoup de moucheurs ne pêchent qu’à la mouche. Une petite canne à moucher, une bonne variété de mouches et quelques moulinets dans le sac à dos et tout est possible! Il y a des mouches, des cannes et des soies (la soie est le fil utilisé pour la pêche à la mouche) pour chaque poisson, pour chaque saison et pour chaque type de plan d’eau.
La technique la plus connue, et la plus difficile par ailleurs, est certainement la pêche à la mouche sèche, qui consiste à déposer délicatement une imitation d’insecte flottante sur le film de l’eau. Or ce n’est qu’une des nombreuses méthodes de pêche à la mouche. La plus facile est la pêche au streamer, le streamer étant généralement une imitation de petit poisson, à la manière des cuillères ondulantes classiques pour la pêche au lancer léger. Elle est facile parce que la délicatesse du lancer n’a pas d’importance, on lance et on ramène. Aussi, c’est cette méthode qui vous donnera de meilleurs résultats avec le brochet, le touladi et le doré du Nord. Ces poissons se nourrissent peu à la surface et préfèrent souvent les leurres voyants nageant près du fond.
Plus tard, avec l’aisance et la maîtrise de l’équipement acquises par la pêche au streamer, il sera tout naturel de s’adonner à la sèche, au popper, à l’émergente, à la noyée et à la nymphe. Vous pourrez ainsi mettre votre savoir-faire à l’épreuve en taquinant l’ombre et le corégone…
Plus tard encore — mais là il faut être conscient de la dépendance que ça crée — arrive le temps du montage de ses propres mouches, quel plaisir! En passant, ne vous méprenez point, le montage de mouches coûte plus cher que l’achat des mouches en magasin. Si vous décidez de monter vos mouches, faites-le pour la passion, pas pour économiser, car vous n’économiserez pas un sou!
Reste que ça vaut le coup ou plutôt le coût. Rien de tel qu’une belle prise avec un équipement bien choisi, un endroit magnifique et une mouche qu’on a confectionnée soi‑même. La pêche, croyez-moi, prend alors un tout autre sens… presque religieux.
À la revoyure!
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