Le vendredi 27 avril, à 7 h 30, le maire de Hay River plaçait la ville sous état d’urgence. En fin d’après-midi, c’est un mètre d’eau qui recouvrait la chaussée de la route Mackenzie, entre l’ancienne station de pompage d’eau et le West point de Vale Island, isolant pour quelques heures le village des pêcheurs du reste de la ville.
Cette année, la rivière s’est dégorgée de ses glaces essentiellement par le chenal ouest. John Pollard, le maire de Hay River mais aussi le coordonateur de l’OMU (organisation des mesures d’urgences) raconte : « nous avions évacué trois aînés dès le jeudi, le lendemain deux autres ont été redirigés à l’hôpital. Même si l’inondation s’est étendue essentiellement sur la route et autour de quelques maisons, la rivière était sur le point de passer au-dessus des berges à plusieurs endroits. Nous avons été chanceux ! Plusieurs personnes ont décidé de rester dans leurs maisons, et deux membres de l’OMU sont restés de ce côté de Vale Island ».
Durant cette période d’effervescence collective, la population de Hay River était aux aguets des moindres soubresauts de la rivière. Déjà le mercredi et le jeudi, l’excitation montait avec l’accumulation des brisures de glaces sur le flot de la rivière. Le Chef des pompiers volontaires de la ville, Trent Atwell, prétend que les gens se tiennent vraiment bien informés de l’évolution de la débâcle. « Nous avons vu beaucoup de va-et-vient le long de la rivière ces derniers jours. Les gens vont aussi se renseigner sur notre site Internet, où nous mettons constamment à jour les niveaux d’eau et de glace. » Sur le site de la ville et de l’OMU on peut apprécier l’évolution du cours d’eau à quatre endroits différents. Soit les chutes Alexandra, le long de Paradise Valley, le pont de Pine Point sur la route vers Fort Smith, et le pont du chenal ouest qui permet de rejoindre Vale Island et l’aéroport.
« Les résidents de Hay River sont expérimentés, complète Atwell, ils prennent la rivière très au sérieux. Ils savent bien que le niveau peut monter très rapidement. Autant notre personnel que les riverains savent que l’on n’a pas le temps de batifoler et quand il faut agir, les choses doivent êtres exécutées instantanément. Sur une période de quelques jours notre site Internet a été visité plus de 46 000 fois. Les gens se tiennent vraiment au courant. »
Dès le samedi matin, les barrages routiers ont été levés, annonçant que l’incident était passé. Pourtant l’état d’urgence demeure… Selon le maire, l’état d’urgence est un décret d’une période de sept jours. « Je ne vais pas lever l’état d’urgence, je vais juste le laisser expirer. C’est une situation temporaire qui permet à la ville d’avoir un champ de manœuvre plus large lors d’une urgence. En plus d’avoir davantage de maîtrise, nous nous assurons le cas échéant d’une assistance financière de notre gouvernement. Cette année, la glace s’est paquetée sur le chenal est, et tout le flux est passé à l’Ouest. C’est au pont où la rivière se divise autour de Vale Island que tout se joue. Certaines années, nous avons vécu la débâcle qui suivait le chenal est. J’ai vu des barges entraînées, toutes les rues de la vieille ville inondées. » En effet, l’histoire veut que c’est pour se protéger de l’imprévisibilité de la débâcle que la ville et le village K’atl’odeeche ont migré en amont de l’embouchure de la rivière.
Une autre conséquence de cet événement naturel est la quantité de bois charriée par la rivière et la turbidité de son eau qui vont se déverser dans le Grand lac des Esclaves. Si le bois de dérive va vraisemblablement venir orner les longues plages de Hay River, la boue et ses sédiments quand à eux, pourraient rejoindre la station de pompage d’eau municipale qui se trouve à huit Km environ au large. « C’est une éventualité que nous observons de très près, assure le maire. Si la turbidité augmente et que notre système de filtration ne peut plus assurer une eau potable nous utiliserons notre réserve de millions de gallons que nous possédons dans des réservoirs enterrés. Nous pourrions subvenir aux besoins de la ville en entier pour trois jours avec ces réserves, le temps que la qualité de l’eau se rétablisse. »
