La date limite pour le dépôt des mises en candidature à la présidence de la Fédération franco-ténoise (FFT) s’étant terminé le 9 novembre, il est déjà acquis que l’actuel président de la FFT, Fernand Denault, sera réélu par acclamation.
C’est donc à un scénario identique à ceux de 2001, 2003 et 2005 que les délégués du réseau associatif assisteront lors de l’Assemblée générale annuelle (AGA) de la FFT qui aura lieu cette année les 24 et 25 novembre prochain à Yellowknife.
Deux candidatures ont pourtant été déposées avant la date limite, mais tout indique que celle du Franco-Ténois Martin Dubeau sera rejetée par le Comité de mise en candidature, faute d’un appui formel d’un membre du réseau associatif de la FFT comme stipulé dans ses statuts et règlements. Ne reste donc plus que la candidature de Fernand Denault qui, à première vue, semble en norme.
Martin Dubeau a entrepris des démarches le 8 novembre auprès de l’Association franco-culturelle de Yellowknife (AFCY) pour obtenir son appui et ainsi présenter une candidature conforme. L’AFCY, dont il a déjà été président, lui a refusé ce privilège. Il s’est alors tourné le lendemain vers la Garderie Plein Soleil et le Regroupement des parents francophones des TNO, encore une fois sans succès.
« Certainement le fait d’avoir été refusé par trois organismes pour simplement entrer dans le processus électoral et non pas pour être président en tant que tel m’inquiète », a déclaré un Martin Dubeau perplexe. Selon lui, un simple appui d’un membre ne l’aurait engagé en rien et aurait permis d’avoir un débat d’idées lors de l’AGA.
Il ajoute que les statuts et règlements de la FFT sont trop contraignants. « C’est l’absurdité de ce processus-là qui me frappe bien plus que le fait que des associations n’ont pas voulu appuyer ma candidature. […] Il y a un processus électoral et ça devrait être ouvert à n’importe qui. Là, de la façon dont ça fonctionne, on empêche les gens de rentrer dans le processus », a dénoncé M. Dubeau.
Malgré cette kyrielle de refus, celui qui habite Yellowknife depuis sept ans a quand même décidé de déposer officiellement sa candidature au comité responsable. Il justifie cette démarche en disant que c’est une façon de montrer son réel intérêt dans le débat et que la communauté ne pourra pas lui reprocher de remettre des choses en question à la FFT sans vouloir s’impliquer concrètement. Il croit aussi sincèrement que le Comité pourrait retenir sa candidature même si tous les critères ne sont pas respectés. Cependant, selon les commentaires de Patrice Lapointe, du Comité de mise en candidature, les critères seront appliqués à la lettre.
De son côté, Fernand Denault a confirmé avoir réussi à obtenir l’appui officiel d’un organisme membre du réseau associatif pour sa candidature, mais il a refusé de dire lequel. L’actuel président a indiqué qu’il donnerait cette information seulement lorsque le Comité de mise en candidature aura terminé son rapport, ce qui devrait être fait d’ici quelques jours. Toujours dans le but de ne pas perturber le travail du Comité, M. Denault n’a pas voulu non plus donner ses premières réactions suite à son report à la présidence pour un quatrième mandat consécutif.
Trois organismes refusent
L’organisme sur lequel Martin Dubeau fondait le plus d’espoir pour obtenir un appui est l’AFCY. Le président Patrice Lapointe n’a pas voulu élaborer publiquement sur les raisons de ce refus. « Je ne serais pas correct envers Martin de dire ça en public », a-t-il d’abord stipulé.
« Nous avons des critères à l’AFCY quand nous avons à appuyer quelqu’un. Il y a pas mal de cas par cas. À chaque fois, il faut se poser la question : est-ce que nous voulons que ça devienne notre futur président et quel genre de président ça ferait? Suite à ça, nous faisons nos conclusions », a continué M. Lapointe, qui dit avoir consulté préalablement tous les membres de son conseil d’administration (CA) et qui avoue que la décision n’a pas été facile à prendre.
De plus, il n’était pas question à l’AFCY d’appuyer juste pour le plaisir d’appuyer. Le président explique que le processus d’appui perdrait beaucoup de crédibilité en procédant de la sorte et que l’Association enverrait un mauvais message à ses membres en appuyant n’importe qui. Par ailleurs, M. Lapointe a confirmé que l’AFCY avait aussi refusé d’appuyer la candidature d’une deuxième personne, mais n’a pas voulu en dire plus.
Le candidat exclu a accepté de soumettre à L’Aquilon le courriel qu’il a reçu du président Patrice Lapointe et qui explique plus en détail la décision de l’AFCY. « Selon nos observations, tu sembles intéressé à voir un processus démocratique, mais peu à devenir président. Tu as souvent mentionné vouloir rester loin de la politique alors que le poste en élection cette année est sans aucun doute notre poste le plus politique. Par ton travail, nous croyons en un conflit d’intérêts potentiel avec nos dossiers juridiques. Tu sais certainement attirer la sympathie, mais nous croyons aussi que tes démarches dans notre réseau ont également provoqué de nombreux déboires », peut-on notamment y lire. L’AFCY reproche aussi à Martin Dubeau de demander l’appui à une association à laquelle il refuse d’être un membre.
Bien que Martin Dubeau dit respecter la décision de l’AFCY, certains éléments de réponse le laissent plutôt songeur comme cette allusion à un possible conflit d’intérêts. Celui qui est présentement coordonnateur des programmes culturels en langue française au Centre du patrimoine septentrional Prince-de-Galles dénonce ce réflexe automatique de faire planer un conflit d’intérêts lorsque quelqu’un travaille pour le gouvernement et assure que cet argument n’est pas justifié dans son cas vu ses fonctions. Il affirme aussi avoir eu des raisons valables pour retirer plus tôt cette année son membership à l’AFCY.
M. Dubeau dit comprendre que certaines personnes craignent qu’il crée des problèmes en allant plus loin dans le processus, mais il trouve cette réaction démesurée. « Je suis donc bien puissant pour que les gens pensent ça de moi, sourit-il. Pourtant, je suis un gars bien normal qui cherche juste à s’impliquer. Mais là, je me fais mettre des bâtons dans les roues ».
Du côté du Regroupement des parents francophones des TNO et de la Garderie Plein Soleil, on plaide que la requête de Martin Dubeau a été formulée de façon beaucoup trop précipitée, ce dernier demandant leur appui lors de la toute dernière journée de la période de mise en candidature.
« Nous n’avons pas eu assez de temps, de confier Sylvie Savoie, présidente du Regroupement des parents francophones. Il nous a appelé vers 15h [le 9 novembre]. On n’avait pas d’histoire et on ne se sentait pas à l’aise d’appuyer quelqu’un qu’on ne connaît pas vraiment. Tous les membres sont à Inuvik, Fort Smith et Hay River et j’ai juste pu en rejoindre une. C’était trop à la dernière minute », poursuit-elle.
« Il s’est vraiment pris à la dernière minute, renchérit Annie Lapierre, directrice de la Garderie Plein Soleil, qui s’est chargée du mieux qu’elle peut de faire part de la requête de M. Dubeau aux membres du CA. Elle aussi n’a pu rejoindre tout son monde.
La directrice ajoute que le contexte dans lequel se trouve le CA de la garderie n’a pas aidé non plus. « Les membres de notre CA sont tous nouveaux. Nous avons eu juste deux rencontres. Ils ne sont aucunement au courant des dossiers. Ils ne savent même pas qui est [le président de la FFT] Fernand Denault. Donc, c’est un peu difficile d’appuyer la candidature de quelqu’un quand tu ne connais aucun dossier », explique Mme Lapierre, qui précise que seule l’administratrice Laurence Pouliot était sur le CA l’an dernier.
Invité à justifier pourquoi il avait procédé si tardivement, Martin Dubeau avait cette réponse. « C’est vrai que je suis à la dernière minute, mais je voulais voir si d’autres personnes allaient se présenter. Je ne voulais pas me proposer à l’avance non plus pour éviter que quelqu’un d’intéressé laisse tomber en voyant ma candidature. Mais que je sois à la dernière minute ou pas, ça n’enlève en rien au fait que trois associations m’ont refusé et que tout le processus en place m’apparaît bizarre », a-t-il conclu.