La Fédération franco-ténoise, l’Association des francophones du Nunavut et la Fédération franco-yukonnaise se serrent déjà les coudes et discutent régulièrement à propos d’enjeux qui touchent la réalité territoriale qui leur est propre. Un communiqué émis le 9 juillet mentionne que « Ces Franco-canadiens vivent un triple isolement : géographique, ethnique et linguistique […] ». Le nouvel organe politique permettra de donner un poids aux revendications des francophones.
Dans le passé, certains projets ont d’ailleurs fait chou blanc par manque de coordination entre les trois assos. Ce fut le cas de la Politique de développement du Nord présentée par Ottawa, qui a accordé 90 millions de dollars aux trois territoires canadiens. Selon le directeur général de la FFT, Léo-Paul Provencher, les francophones n’ont jamais vu la couleur de cet argent dont les gouvernements territoriaux ont disposé selon leur bon vouloir.
Le Nord : le grand incompris
Les politiques économiques élaborées par des fonctionnaires du Sud prennent peu en compte les contraintes particulières au Nord : des coûts de transport astronomiques, un taux de roulement du personnel élevé, etc. Il est question de sensibiliser d’abord ces décideurs à la réalité différente que vivent les organisations nordiques : « Il faut mettre nos énergies en commun pour faire connaître la réalité du Nord », lance le directeur de l’association des francophones du Nunavut, Daniel Cuerrier.
Au cœur des différences se trouve le coût de la vie, plus élevé qu’à Vancouver, soutient M. Cuerrier. L’embauche de personnel devient alors un casse-tête, puisqu’il faut souvent faire venir les gens compétents d’une ville du Sud et les appâter avec de généreux bonis.
C’est encore plus vrai en période de faible chômage comme en ce moment, renchérit le directeur. Un financement per capita plus important pour les organismes nordiques, voilà une revendication qui devrait occuper une grande place dans les discussions que cette Table aura sans doute avec les différents ministères fédéraux.
Tout reste à faire
Avant même de cibler les objectifs, les trois membres devront développer les orientations qu’ils désirent donner à la Table, tempère le directeur général par intérim de l’asso du Yukon, Régis St-Pierre : « On s’est donné un an pour mettre la Table sur pied, analyser ses fonctions : on est aux premiers pas de l’exercice », a rappelé l’administrateur. Cependant, une chose reste sûre : le développement de projets communs ou encore l’échange de projets entre les membres apparaît fort intéressant pour le représentant yukonnais.
Ce dernier considère que l’implantation du pendant francophone de CBC North serait un acquis formidable : « CBC North existe, mais Radio-Canada Nord n’existe pas, a relevé M. St-Pierre. À Whitehorse, on a Radio-Canada à travers une journaliste : cet exemple-là peut être utilisé aux Territoires ou ou Nunavut », a conclu le directeur.
La Table reconnue
Cette organisation est portée à bout de bras par les trois directeurs pour l’instant. Obtenir du financement pour embaucher un coordonnateur représente le premier test de la légitimité du nouvel acteur face à Ottawa.
Un plan de travail a été déposé récemment par les trois membres auprès des ministères responsables du Nord, afin de réclamer les fonds nécessaires à l’embauche d’une nouvelle ressource. Le fédéral semble toutefois bien recevoir l’annonce de l’entrée d’un nouveau joueur, puisqu’un fonctionnaire du ministère des Affaires indiennes et du Nord, James Mack, a participé à une rencontre avec les trois membres, en avril passé.
Le MAINC jouera ainsi un rôle central dans les projets mis de l’avant par cette triple alliance francophone, car c’est l’unique ministère qui a comme tâche de coordonner l’action d’autres ministères et de soutenir toutes les facettes du développement aux Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et au Nunavut.