En cette fin d’août 2008, le NPD démarre une campagne électorale à Yellowknife par une téléconférence regroupant Jack Layton, chef du NPD, Dennis Bevington de Western Arctic et Michael Byers, candidat. L’objectif est de dénoncer le choix du gouvernement de M.Harper de privilégier la solution militaire pour défendre la souveraineté canadienne dans l’Arctique. Les membres du NPD accusent le Premier Ministre de négliger ce qu’ils jugent être une urgence, à savoir mettre en place une vraie politique de développement social et économique.
Jack Layton déclare : « Harper va venir dans le Nord pour parler de la force militaire dans le Nord. Nous, nous parlons plutôt des communautés et des gens qui y vivent et qui sont les premiers concernés par cette reconnaissance territoriale. L’avenir de l’Arctique passe par un partage équitable des ressources et des moyens avec les communautés nordiques. »
L’un après l’autre, chacun des trois intervenants rappelle que le Nord est en souffrance et qu’il faut agir tout de suite. Les questions les plus urgentes à régler sont le changement climatique très rapide, le taux extrêmement élevé du coût de la vie, le manque de logements à coût abordable, les soins de santé déficients, les développements industriels polluants.
« Nous devons construire notre souveraineté en faisant en sorte que les communautés deviennent plus riches, qu’elles aient des infrastructures adéquates, je pense notamment à un port à Iqaluit, à des routes dans les Territoires du Nord-Ouest. Il faut penser à des énergies propres. Le gouvernement Harper a coupé des programmes, plongeant dans le désarroi des communautés qui ont été dévastées par le sous-emploi, des négociations territoriales non achevées, et un manque de fonds pour construire des logements. Au lieu de penser à mettre en place des projets basés sur le partenariat, le gouvernement Harper ne songe qu’à occuper militairement l’Arctique », affirme Jack Layton.
Michael Byers souligne que le renfort d’une présence militaire canadienne n’est pas la bonne solution. « Le Canada a la plus longue côte arctique de tous les pays qui longent cette région », explique-t-il. « Les Russes ont planté leur drapeau au pôle nord l’été passé et Harper veut faire pareil. Bien sûr, la garde côtière canadienne assure une partie de notre souveraineté, mais cela n’est pas suffisant. Nous devons aussi régler des problèmes de négociations territoriales. »
Si l’orientation purement militaire est fortement critiquée, Dennis Bevington juge sévèrement le peu de présence du Canada dans des réseaux de partenariat. « La coopération internationale est absolument nécessaire et nous avons une opportunité extraordinaire d’y prendre place », dit-il de retour d’une rencontre circumpolaire. « Nous avons, par exemple, deux soucis majeurs avec les États-Unis concernant la mer de Beaufort et le Passage du Nord-Ouest. Dans cette dernière zone, nous savons que la Russie et les États-Unis veulent travailler ensemble. Une intensification militaire canadienne ne suffira pas à régler ces soucis. Nous pensons que la coopération peut apporter des solutions. »
Michael Byers ajoute : « Harper regarde le Nord comme une source de matières premières. Il ne comprend pas qu’il y a des Canadiens qui habitent dans le Nord, qui ont besoin de logements, de soins en santé, il ne comprend pas que le gouvernement a des obligations vis-à-vis des citoyens nordiques. » Pour sa part, Layton promet que sa liste accueillera une candidate native du Nunavut et un candidat natif du Yukon, sans donner pour l’instant le moindre nom.
Les membres du NPD reprochent précisément au gouvernement Harper de voler les richesses du Nord. Denis Bevington rappelle que « L’année passée, Norman Wells a contribué pour 125 millions de dollars dans les coffres fédéraux pendant que le pétrole se vendait à 70 $ le baril. Maintenant que le prix a atteint 100 $ le baril, les coffres des conservateurs débordent d’argent qui appartient en réalité aux gens des Territoires du Nord-Ouest. »
M. Byers soulève la question des conséquences de la suppression de programmes. « En octobre 2006, le gouvernement Harper a supprimé le programme d’alphabétisation pour adultes, qui coûtait 17,7 millions de dollars. Ce programme offrait un service essentiel en enseignant la lecture aux Premières nations et aux Inuits, leur permettant ainsi d’accéder aux services gouvernementaux, aux occasions d’emploi et à Internet. » Les membres du NPD accusent le gouvernement Harper de n’avoir pas mis en œuvre l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut de 1993, refusant d’aborder les recommandations du rapport de conciliation de 2006, plus précisément en ce qui concerne le besoin de financement pour l’éducation bilingue anglaise inuktitute. Par conséquent, Nunavut Tunngavik Incorporated poursuit en justice le gouvernement Harper, qui se défend plutôt que de chercher une solution négociée. Layton souhaite développer une image humaniste pour son parti. Sur son site Internet, il valorise son image de chef qui doit écouter, parler, être proche des habitants.
Le NPD aurait également un plan vert pour redistribuer les richesses, soutenir les populations à faible revenu et développer des énergies propres. Lors de la téléconférence, il reprend une question qui concerne son engagement sur le terrain. « Pourquoi le NPD soutient les communautés ? Parce que je rencontre des peuples qui souffrent », répond-il. « Le Nord du Canada se développe très très vite. On doit investir maintenant. Ceci est une autre approche de la souveraineté. »
À la suite de cette téléconférence, l’Aquilon apprend par communiqué de presse que le Premier Minsitre amorce une tournée dans le Nord pour promouvoir une vaste étude géologique et terrestre nordique dans le but de mieux connaître et contrôler le développement des territoires du Nord. Ce programme, échelonné sur 5 ans, coûtera 100 $ millions. Le 27 août, M. Harper s’est rendu à Tuktoyaktuk puis à Inuvik, rejoint successivement par le ministre de l’Environnement, puis par le ministre des Affaires Indiennes et du Nord.