le Lundi 21 avril 2025
le Vendredi 14 novembre 2008 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:37 Santé

Société: Stratégie anti-suicide

Société: Stratégie anti-suicide
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Les hôpitaux et personnels soignants devront mettre en place des programmes de prévention du suicide dès janvier prochain. Le but dépasse le geste médical d’administration de soin physiologique ou psychiatrique, il s’agit en réalité d’être capable d’identifier les personnes à risque. La formation dispensée dans ce programme vise les personnels soignants, les intervenants sociaux et toute personne qui s’implique dans sa communauté.

Aux Territoires du Nord-Ouest, le suivi des cas de suicide, effectué par le ministère de la Santé et des Services Sociaux, confirme ce que tout le monde connaît déjà, à savoir que le suicide est un fléau, voire « une épidémie », ainsi qu’il est noté dans un document du service gouvernemental, car il est de plus en plus considéré comme une maladie.

Les femmes, âgées de 15 à 24 ans, sont plus exposées que les autres groupes, quels que soient la tranche d’âge et le sexe. Les adolescents et les jeunes adultes, entre 15 et 24 ans, représentent la plus importante cohorte de ceux qui font des tentatives, le deuxième groupe étant les adultes de 25 à 34 ans. Au-delà de l’âge de 45 ans, les taux de tentative de suicide baissent. Une statistique ressort nettement, indiquant que 40 % des suicidés avaient déjà fait au moins une tentative.

Aujourd’hui, la prévention apparaît comme un moyen d’action capable d’enrayer l’épidémie. « Chaque jour nous recevons des gens qui veulent se suicider, dit Ofelia Leon, psychologue au sein du Service de conseil communautaire de Hay River . Nous constatons que le suicide peut toucher n’importe qui. On ne peut pas dire qu’il existe un profil typique de la personne qui veut mettre fin à ses jours.» Si tout le monde peut être un jour à risque, il apparaît que les autochtones sont plus fragiles. Mme Leon y voit les conséquences des traumatismes subis par quatre générations d’écoliers. « Un traumatisme tel que celui vécu par les enfants internés dans les écoles résidentielles se transmet d’une génération à l’autre au sein du groupe familial, explique-t-elle. Un traumatisme n’affecte donc pas que la personne qui le vit, mais aussi ses descendants et il se reflète dans la société environnante. » Cependant, autochtone ou pas, la douleur psychologique est cruelle pour tous. « Nous sommes tous identiques dans notre capacité à souffrir et les besoins sont les mêmes pour tous les êtres humains atteints par la souffrance. »

L’écoute se révèle avoir un énorme pouvoir de prévention et d’apaisement. La formation doit procurer aux apprenants la technique d’une écoute bienveillante et neutre. « Aussitôt qu’une personne à risque décèle la moindre réaction chez son interlocuteur, elle arrête de parler, dit Mme Leon. Il faut apprendre à écouter sans bouger, sans faire de geste ni de mimique qui montrerait que l’on juge la personne à risque. Dans le cas d’une telle écoute, la personne accepte de se confier. Nous pouvons affirmer que sa souffrance décroît instantanément et que les idées suicidaires disparaissent pour un temps. » Il est reconnu qu’une personne qui se suicide ne veut pas mourir, mais qu’elle ne voit pas d’autre issue pour mettre un terme à une souffrance insupportable.

Dans l’environnement nordique qui favorise des situations d’isolement extrême, les ressources d’écoute sont jugées insuffisantes. « Il existe une ligne d’appel ouverte le soir, mais les services de soins sont débordés de demandes », reconnaît Mme Léon. La formation permettra alors de créer un réseau intercommunautaire de personnes aptes à déployer des gestes d’intervention et de premiers soins auprès des personnes à risque. L’objectif est d’avoir des intervenants identifiés dans chaque communauté pour apporter un soutien immédiat, pour savoir diriger la personne souffrante vers un service adapté aux besoins identifiés et pour faire un suivi le cas échéant du bien-être du malade.

Le Service de conseil communautaire de Hay River hébergera en février 2009 des journées intensives de formation à la prévention du suicide. Ce programme, appelé ASIST (Formation appliquée en techniques d’intervention face au suicide) est déployé à l’échelle du Canada.