De passage dans la capitale ténoise, le journaliste et auteur Andrew Nikiforuk a présenté mardi 20 janvier son dernier livre Tar Sand : Dirty Oil and a futur of a continent, une occasion selon lui, d’ouvrir un débat sur l’industrie des sables bitumineux de l’Alberta. « Les sables bitumineux concernent tous les Canadiens. Il n’y a jamais eu de débat national sur le futur de cette exploitation et pourtant c’est une économie qui a su prendre une place de choix au sein du pays », a-t-il expliqué en entrevue. Il a poursuivi en notant que l’enjeu était de définir si le Canada allait devenir la prochaine Arabie Saoudite en termes de production de baril de pétrole alors que l’expansion des installations pétrolifères en Alberta multiplierait par trois en 2020 le rendement actuel d’1,2 million de barils par jour. « Soit on devient la prochaine Arabie Saoudite soit on se sert de cette industrie comme dernière ligne de défense, où nous abandonnerions notre dépendance au pétrole si nous devions dépendre de cette production synthétique. »
Pourtant l’auteur a tenu à dire que l’avenir de l’industrie des sables bitumineux tenait plus entre les mains des États-Unis que des citoyens canadiens. Le Canada, qui exporte 18 pourcent des importations de pétrole des États-Unis, est simplement devenu le fournisseur de pétrole le plus important de ce pays. « De plus en plus d’indices nous permettent d’affirmer que ce sont les États-Uniens qui se posent le plus de questions quant à notre production. Eux qui veulent se sortir du pétrole de la guerre, ce n’est pas dit qu’ils veuillent devenir accros à notre pétrole sale, sachant qu’il est trois fois plus polluant de produire de l’essence avec les sables bitumineux! »
Qualifiant désormais le Canada comme un pays où les profits tirés des terres louées aux multinationales du pétrole dépassent énormément le potentiel du secteur privé intérieur (petro-state dans le jargon anglais), M. Nikiforuk constate que depuis 1996, le gouvernement a accordé une centaine de permis dans la grande région de Fort McMurray sans aucune étude environnementale de ce nom. « C’est le tiers-monde » selon lui, faisant référence aux pays comme le Venezuela ou le Nigeria dont la démocratie s’est fait miner par le pouvoir manipulateur des compagnies pétrolières. Il a ajouté que le Canada n’ayant aucun plan d’investissement pour ses profits pétroliers, le gouvernement a déjà dilapidé des milliards de dollars pour simplement réduire la taxe sur les produits et services et continuer de faire croire aux Canadiens que cette industrie est bénéfique et bien gérée. « Les sables bitumineux, c’est un exemple pour savoir quoi ne pas faire pour développer une ressource pour le bénéfice des communautés locales. Les résidents du Nord devraient s’y référer pour être sûrs de ne pas commettre des erreurs semblables avec leur projet gazier du Mackenzie. Et surtout ils devraient activement se poser la question s’ils veulent alimenter les besoins en gaz naturel d’une industrie en expansion située en amont de leur principale source d’eau douce. »