Dis-moi qui tu es, je te dirai ce que tu parles? Vraiment? La question de l’identité fait toujours jaser. Sommes-nous ce que nous sommes, selon la langue que nous parlons? L’Aquilon a décidé de se pencher sur la question. À surveiller dans les prochaines éditions, les portraits de gens de la communauté et leurs idées sur cette question.
Pour Joanne Abraham et Catherine Boulanger, l’école est le véhicule numéro un pour la langue française. Sans un programme académique français adéquat et complet, la langue française serait largement menacée, témoignent-elles. Franco-Manitobaine et Franco-Albertaine, elles racontent les efforts qu’elles ont dû faire pour rester connectées avec la langue.
C’est Catherine Boulanger qui a lancé la discussion, par un bel après-midi, la semaine dernière, à l’Association franco-culturelle de Hay River. En gros, qu’est-ce que la représentation identitaire, et ça part d’où? Comment peut-on préserver la francophonie?
Pour Catherine, les choses se sont embrouillées pendant plusieurs années : « Je pensais que mon français, je l’avais appris au Québec, alors je me pensais Québécoise. ». Née en Alberta, elle n’associait pas sa francophonie à sa terre natale, jusqu’à ce que sa mère lui dise : « Vous parliez français à la maison, toujours. ». Ce qui n’a pas manqué de surprendre Catherine : « Ah ouin? ». Mais qu’est-ce qui a bien pu se passer? De tout ce dont elle se rappelait, Catherine avait renoué avec ses racines francophones au Québec, où elle avait complété la majorité de son cheminement scolaire. « Ma mère me dit que je suis Franco-Albertaine, mais pourtant, je ne me sens pas Franco-Albertaine », poursuit-elle, en expliquant qu’à son retour en Alberta, faute d’avoir un environnement francophone, elle avait perdu sa langue de nouveau. Elle se rappelle aussi toute la difficulté qu’elle avait eu à l’école au Québec : « Je n’avais pas appris à lire et à écrire en français, alors j’avais l’impression que je ne le connaissais pas. ».
« Je vois aussi comment mes frères et sœurs plus jeunes, qui ont été à l’école en anglais, ont presque tout perdu leur français », dit-elle. C’est à son arrivée aux Territoires du Nord-Ouest que Catherine est replongée dans la francophonie via son emploi d’agente à l’AFCHR. Elle partage que le fait que ses enfants sont aujourd’hui à l’école francophone lui « donne la chance de parler en français ». Pour Catherine, « l’école offre cet environnement francophone », sans quoi il pourrait être facile de le reperdre. Dorénavant, Catherine se considère comme Francophone, point.
Du côté de Joanne Abraham, les choses sont différentes. Élevée à St-Boniface, un quartier reconnu pour être le « foyer » des Francophones du Manitoba, Joanne a parlé le français jusqu’à la 8e année grâce au programme d’immersion française dans lequel elle étudiait. « À la maison, on parlait anglais, mais avec mes grands-parents, je parlais français », explique-t-elle. Son père, d’origine métisse, ne parle plus français, alors que sa mère, une Francophone, le parle toujours. Joanne, pour sa part, s’est toujours considérée Francophone, même si, en changeant d’école après sa 8e année, elle en était venue à perdre son français. « Je ne pensais pas que je l’eusse perdu. Dix ans plus tard, je me suis rendue compte que je ne pouvais plus le parler », raconte-t-elle. Joanne considère qu’une école francophone dans un milieu minoritaire c’est essentiel, sans quoi, les gens seront assimilés. À son avis, aussi, tout comme Catherine, l’école offre un environnement en français assez fort pour encourager les gens à ne pas perdre leur langue. « C’est essentiel, vraiment! », déclare celle qui, depuis son arrivée aux TNO, a renoué plus que jamais avec sa francophonie.