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le Jeudi 24 avril 2014 13:32 | mis à jour le 20 mars 2025 10:39 Autochtones

Droit constitutionnel La reconnaissance des Métis aux TNO

Droit constitutionnel La reconnaissance des Métis aux TNO
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Les Métis seraient des Autochtones, mais non des Indiens
 

Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest n’a pas attendu le jugement de la Cour d’appel fédérale avant de reconnaître que les Métis sont des Autochtones. Il tarde cependant à reconnaître comme tels les membres de la North Slave Metis Alliance (NSMA) qui ont entamé une poursuite contre lui.
Des Métis se seraient installés au nord du Grand lac des Esclaves au début du XVIIIe siècle. Leurs descendants sont aujourd’hui regroupés dans la North Slave Metis Alliance, qui compte quelque 300 membres, et dont le président, Bill Enge, revendique comme ancêtre le célèbre François Beaulieu.
Le 11 avril dernier, la North Slave Metis Alliance déposait en Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest une procédure d’examen judiciaire contestant la décision du gouvernement territorial d’exclure la NMSA de la chasse aux caribous de Bathurst. En raison du déclin de sa population, cette horde de caribous fait l’effet d’une chasse contrôlée. Les Dénés, eux, y ont droit. « Nous avons fourni au gouvernement territorial des preuves généalogiques et historiques que nous sommes des Autochtones, explique Bill Enge. Et le jugement de Shannon Smallwood, en juin 2013, nous était favorable, obligeant le GTNO à nous consulter sur la gestion de la horde de Bathurst. Mais le gouvernement refuse toujours. Il nous a offert de soumettre une proposition pour chasser d’autres caribous qui sont beaucoup trop loin. Nous trouvons ça injuste. Nous ne voulons pas le même nombre de têtes que les communautés dénées, mais nous ne voulons pas non plus être traités comme des Autochtones de seconde classe. » Le gouvernement territorial a 30 jours pour déclarer comment il compte traiter ce dossier.

Définition
Ce qui détermine le statut d’un Métis n’est pas le simple fait d’être issu d’ancêtres européen et amérindien. Survenu en Cour suprême du Canada en 2003, l’arrêt Powley donne des indications sur ce qu’est un Métis. L’arrêt stipule, selon le site Internet d’Affaires autochtones et de Développement du Nord Canada (AADNC), que le terme « Métis » : « […] désigne les peuples distincts qui, en plus de leur ascendance mixte, possèdent leurs propres coutumes et identité collective reconnaissables et distinctes de celles de leurs ancêtres indiens ou inuits, d’une part, et de leurs ancêtres européens, d’autre part. Selon le recensement de 2006, 17 % des 20 635 Autochtones des TNO seraient des Métis. Leur statut est variable. Si ceux de la NSMA ne sont pas reconnus, ceux du Sahtu, par exemple, sont partie prenante d’une entente territoriale conclue en 1993. Le Conseil des Métis de Hay River négocie — depuis fort longtemps, il est vrai — une entente sur les ressources et les terres avec les gouvernements fédéral et territorial. « À cause de cela, souligne son président Wally Schuman, notre statut est un peu différent des autres Métis du Canada. » Le négociateur pour les Métis, James Heron, ne perçoit pas que le récent jugement a un impact majeur sur l’entente, qui pourrait prendre encore plusieurs années à mettre en place.

Autochtones, mais non Indien
Aux Territoires du Nord-Ouest et ailleurs au Canada, les associations et communautés métisses ont accueilli favorablement, sinon avec liesse, le jugement de la Cour d’appel fédérale statuant que les Métis sont des « Indiens » en vertu de la Constitution canadienne… tout en attendant de voir si le gouvernement allait le contester. « Ça a de sérieuses implications, avance le président de la North Slave Metis Alliance. Ça ouvre la porte à du financement pour l’éducation, la santé, les réclamations territoriales. Depuis 147 ans, nous sommes laissés dans le brouillard. Nous subissons la même discrimination que les Amérindiens, mais sans accès aux programmes pour nous aider. »
Le professeur titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’identité métisse, Denis Gagnon, croit au contraire que le récent jugement pourrait être néfaste pour les Métis. Selon lui, ce qui ressort principalement de la décision, c’est que le sort des Métis est désormais d’obédience fédérale, point. « Le jugement pourrait être désastreux, signale-t-il, parce qu’il pourrait amener les provinces à couper toutes leurs subventions aux Métis. Autrement, nous n’avons aucune idée des conséquences du jugement. » Denis Gagnon souligne que les deux autres points du jugement Daniels, qui est à l’origine de la décision de la Cour d’appel, à savoir l’obligation fiduciaire et l’obligation de consulter les Métis, n’ont pas été reconnus. Les Métis sont reconnus comme des Autochtones en vertu de l’article 35 de la Constitution de 1982, mais ils ne sont pas reconnus comme des Indiens au sens de la Loi sur les Indiens. Prenant pour appui le jugement de 2013 de la Cour suprême du Canada (Manitoba Métis Federation contre Canada), Denis Gagnon affirme que jamais la Couronne n’aura d’obligation fiduciaire envers les Métis, et que ceux-ci ne seront jamais des Indiens. Le récent jugement ne leur donne pas non plus droit à des programmes spécifiques, à des exemptions de taxes, etc. « Les Métis n’ont pas de droits collectifs au sens de la Loi sur les Indiens, parce que des lopins de terre leur ont été distribués individuellement. »