Si une hirondelle ne fait pas le printemps, la migration du Stephen, elle, marque bien la fin de l’été arctique. Prévisible comme une mauvaise téléréalité, le premier ministre Harper vient faire de la latitude dans nos contrées télégéniques à chaque troisième semaine d’août depuis maintenant neuf ans.
Alors que vous lisez ceci, vous en savez sans doute davantage que moi sur la dernière tournée nordique du chef conservateur. Or l’air est si connu que j’ose vous le chanter de mémoire.
Après le diner sur invitation à Whitehorse bien accompagnée de sa réannonce de financement de routine de quelque vertu consensuelle du jour dans un décor à couper le souffle, le cortège ira rencontrer une poignée de militants isolés à Fort Smith où la sécurité dans cette talle notoire de mottés sera pour l’occasion accrue et la période de questions écourtée; et ainsi, de poignées de mains molles en engagements tièdes, le premier ministre atteindra l’île de Baffin où il sera transporté sur un bâtiment naval pour prendre la pause Vladimir Poutine pour les caméras avant de refaire son brushing pour paraitre parfaitement impavide lors de la marche à Pond Inlet avec Leona, où il ne sera pas question de l’inquiétude qui ronge la communauté voisine de Clyde River – et dont la ministre de l’Environnement s’est moqué – quant aux sondages sismiques dans le détroit de Davis.
Parce que ce n’est plus permis de la pratiquer sans émoticônes, je vous le précise, ce qui précède était de la satyre; et si ce genre de blague à l’arsenic ne vous plait guère, en voilà une qui personnellement me met hors de moi : pour ce gouvernement, le Nord est un pitch de vente bien plus qu’un enjeu ou un milieu de vie.
Dans les papiers qu’on envoie pour nous annoncer la venue de Harper, on nous énumère toutes les réalisations de son gouvernement dans la région depuis qu’il y fait du tourisme. On ne ménage rien, même pas les fiascos de CanNor et Nutrition Nord et surtout pas les brises-glaces jamais livrés. Et puisque que depuis le temps vous ne teniez sans doute plus sur votre siège, vous serez soulagés d’apprendre que le port de Nanisivik – celui qui n’était pas ce qu’on avait demandé – annoncé la première fois en 2006, devrait commencer sa mise en chantier dès l’an prochain.
Année après année, il semble toujours plus complexe de s’adresser au premier ministre quand il vient à notre rencontre. L’an dernier les médias des TNO (sauf CKLB qui avait été éjectée) ont du se partager une seule question entre eux. Voilà la mienne.
M. le premier ministre, vous vous vantez d’avoir mis en place une réforme réglementaire aux TNO qui accélérera l’autorisation des développements miniers et gaziers. Or, lorsque la commission parlementaire a tenu des audiences à Yellowknife cet hiver, il n’y avait pas assez de sièges à la salle Katimavik pour asseoir les centaines venus écouter nos leaders, nos aînés, nos experts et nos jeunes dire, tours à tours, aux membres du comité permanent que votre réforme réduit leur capacité de déterminer eux-mêmes la bonne façon de développer leur économie et qu’ils la rejettent. Vous n’avez pas modifié votre projet de loi et aujourd’hui le gouvernement Tlicho tente d’obtenir une injonction contre votre gouvernement. M. Harper, comment pouvez-vous dire que vous appuyez les communautés du Nord, alors que vous ne les écoutez pas ?