Ryan McMahon a la mission de récolter les histoires des collectivités autochtones partout au pays, de l’ile de Vancouver à Halifax. Son projet : Stories of the Land.
Après avoir disposé sur une table, pipe, wampum, tambour, médicaments, et une série d’articles qui font partie de ses traditions, Ryan McMahon s’adresse aux étudiants du Collège Aurora. « C’est un projet d’écoute », leur explique-t-il avant de commencer.
Histoires de la terre est subventionné par le don symbolique des survivants des écoles résidentielles.
Pour créer quelque chose de nouveau. En effet, les fonds non utilisés lors des poursuites civiles des écoles résidentielles et par la suite lors du processus de la Commission de vérité et réconciliation du Canada sont maintenant distribués par le Conseil des arts du Canada à six artistes sélectionnés parmi 380.
Un don que Ryan McMahon ne prend pas à la légère. D’autant plus que sous le prétexte que l’argent des taxes ne devrait pas aller à de la propagande amérindienne, il a reçu des menaces de mort, par le passé. Le meilleur moyen est donc de passer par l’art, puisque l’art véritable parle. « Il dit ce qu’il veut dire », exprime-t-il, sans donner plus de détails sur l’affaire.
En quête de paix
Il présente le wampum, symbole de paix. « Un sinon LE document fondateur du territoire canadien, fait savoir l’homme d’origine ojibwée. Il faut qu’on parle de ce qui est arrivé et de la réconciliation autour des éléments essentiels, soit la terre, le patriarcat, et la centralité des femmes autochtones et des bispirituelles [dans les traditions]. »
À son avis, un mot manque dans la Commission de vérité et réconciliation : la guérison. Un terme de plus qui témoignerait de l’importance de soutenir les survivants.
Et « Pourquoi on est pauvres?, demande-t-il. La colonisation a toujours été une question de terre ». Pour lui, la réconciliation passe par la terre. Il expose que « 99,8 % de la terre est contrôlée par le gouvernement alors que 0,2 % nous appartient ».
Qu’est-ce qu’on peut faire pour soutenir la réconciliation?
C’est le travail de tous de participer au processus de la réconciliation… avec amour.
Darlene Tsetso-Horassi, une étudiante originaire de Fort Simpson, se confie en entrevue : « Je viens d’une longue lignée d’écoles résidentielles. J’ai de la colère et de l’amertume. Je ne sais même pas d’où elles viennent. »
Après avoir vécu des épisodes difficiles, Darlene a décidé de faire un retour aux études. D’un point de vue personnel, la réconciliation passe par l’écriture. « J’ai toujours écrit dans des carnets personnels, j’ai même déjà publié un petit livre ». Collectivement, elle croit que nous devons écouter les histoires, les histoires des individus en colère.
Les mots de la réconciliation
La guérison par la terre représentait, pour la jeune femme Gwich’in Rebecca Baxter, quelque chose qui doit être disponible autant pour les autochtones que pour les non autochtones. En ce qui concerne les pensionnats, la guérison par la terre est thérapeutique et permet de mieux comprendre ce qui est arrivé et que : « c’est OK d’être fâché », poursuit-elle.
« Manito (esprit) Aki (territoire) Inakaahagaawin (loi / relation) : On récolte ce que l’on sème. Ce qui arrive à la terre, arrive aux humains. La terre est notre plus grand enseignant », voilà comment Ryan McMahon a terminé son atelier, avec ce groupe du Collège Aurora.
Extraits partagés par les étudiants du Collège Aurora lors de l’atelier de Stories of the Land de Ryan McMahon [Traduction libre] :
Ma grand-mère a été envoyée à l’école résidentielle pour 16 [ans], elle était tellement indulgente qu’elle a toujours parlé gentiment des sœurs religieuses. Elle buvait et pleurait beaucoup. Alors j’ai essayé de rester sobre et de retrouver la culture qu’elle a perdue parce qu’elle était trop blessée pour dire la vérité. Alors je lui dis la vérité.
Il y a des situations douloureuses et des expériences du passé qui sont difficiles à éviter. Une manière d’essayer de guérir les blessures du passé est avec l’amour et le support des gens qui nous entourent. Continuer de partager et de construire une fondation d’amour. On se bat pour le changement qu’on veut, et sur comment on veut se sentir et être perçu. Être fier de nos racines, des bonnes choses qu’on peut apprendre du passé et continuer à en faire une fierté.
L’origine de notre maison … Le Canada a ses racines dans la culture autochtone. Beaucoup a été perdu. Culture, confiance, identité, êtres chers. Pour les retrouver, il faut se battre. Pas par la force physique, mais avec amour, passion, enseignements et compréhension.
La culture autochtone est belle et devrait être partagée. Les gens devraient être conscients de tout l’amour qu’ils ont donné pour protéger ce territoire…