Chaque hiver, la glace recouvre jusqu’à 14 millions de km2 des eaux canadiennes. Une superficie gigantesque, qui contrairement à ce que l’on pourrait penser, est loin d’être figée.
La glace évolue au rythme d’un processus bien souvent méconnu. « Beaucoup de gens pensent qu’en hiver, la glace est solide partout, et qu’on peut y circuler n’importe où comme bon nous semble. La glace est en réalité très dynamique, toujours en mouvement et sa formation change d’année en année et selon la salinité de l’eau, la quantité de neige… », indique Tom Zagon, chercheur au service des glaces pour le compte d’Environnement et Changement climatique Canada.
La température de l’air, la couverture nuageuse, les vents, les courants et les marées sont autant de facteurs qui influencent la formation des couches de glace. De manière générale, la couche mesure entre 17 et 120 cm et peut aller jusqu’à deux mètres d’épaisseur à la fin de l’hiver. Toutefois, lorsque les « vieilles glaces » qui ne fondent pas d’une année à l’autre s’accumulent le long des côtes pour former la banquise côtière, la couche peut atteindre plusieurs mètres de profondeur.
« Par exemple, de la glace peut se former dans le détroit de Lancaster puis en suivant les courants maritimes, la glace va se déplacer vers l’est en direction de la mer de Baffin et finira par s’accumuler le long des côtes », explique Tom Zagon.
Au sud de Resolute Bay, la banquise côtière trouve sa limite à environ 12 km. Ensuite, la glace est considérée comme mobile. C’est également le cas dans le détroit de Foxe, où la glace ne s’y trouve jamais consolidée. Une situation jugée normale selon le chercheur qui étudie les glaces de l’Arctique depuis une vingtaine d’années.
Moins de glace, plus de risques
Les variations dans le manteau glacé de l’Arctique sont des phénomènes habituels; cependant, les observations du satellite Radsat-2, associées le plus souvent possible aux savoirs traditionnels, s’accordent pour reconnaître que de manière générale, il y a moins de glace et qu’elle est plus mince qu’il y a 30 ou 40 ans.
« À mesure que le climat change, les savoirs traditionnels des populations autochtones perdent en fiabilité, leur intérêt pour les observations au satellite grandit, tout comme les risques liés à leurs déplacements sur la glace », rappelle le chercheur.
Le passage du Nord-Ouest est encore loin d’être une autoroute maritime, mais si la tendance reste la même, il sera bientôt plus facile, en théorie, de naviguer dans les eaux de l’Arctique. En théorie, car comme l’a précisé le capitaine Thornton de la Marine royale canadienne au cours de l’opération Nunalivut, « moins de glace dans l’Arctique veut aussi dire plus de gros morceaux de glace en mouvement et donc, de nouveaux dangers pour la navigation. »