Écologiste, tout naturellement francophone et témoin de l’engagement des jeunes, la lentille de la caméra du Franco-Manitobain Gabriel Tougas se tourne autant vers la fiction que le documentaire.
Les cinéastes francophones hors Québec ne sont pas légion. Mais Gabriel Tougas est hors norme. Autodidacte dans l’univers du 7e art, ses études universitaires à Saint-Boniface le destinaient surtout vers le monde de la science politique. Mais il avait tâté du cinéma pendant son secondaire réalisant des films d’horreur avec ses amis. Des courts et moyens métrages également, qui ont eu la chance d’être vus les Productions Rivard de Winnipeg.
Et quand l’occasion se présente de réaliser à l’âge de 19 ans la série Perpectives diffusée par TVA, Gabriel ne rate pas sa chance. Il est maintenant l’un des réalisateurs qui travaille le plus à temps plein pour cette boîte réputée, qui a à son palmarès de nombreuses productions comme Sur la route des jardins ou Les nouveaux mondes.
Tourner en français
« Pour les autres, ce n’est pas naturel de tourner en français au Canada. Il n’y a pas toutes les infrastructures comme au Québec. » Impossible, par exemple, ou presque, pour un cinéaste en devenir d’étudier le 7e art en français au Manitoba.
Mais pour Gabriel Tougas, faire du cinéma en français, c’est tout ce qu’il y a de plus normal. En fait, pour lui, « il y a de grands avantages » de réaliser des films dans la langue de Gabrielle Roy. La communauté francophone a envie de voir des films dans sa langue. De se voir aussi. Quand l’objectif de la caméra de Tougas se pose sur sa communauté, ce n’est jamais de façon misérabiliste. Au contraire, il donne la parole aux jeunes et aux moins jeunes sur leur vécu ou sur leur perception des Québécois à leur égard. Il aligne les projets comme Identité 2.0, Viens voir ici. On aura un meilleur aperçu de ce que propose Gabriel Tougas en jetant un coup d’œil sur sa nouvelle série Chacun sa route, diffusée actuellement, le samedi à 12 h 30, sur les ondes de TVA. Ou le regard sur des femmes et des hommes ayant posé des gestes significatifs au sein de leur communauté, que ce soit dans des domaines aussi divers que l’éducation, la médecine, le monde des affaires ou celui de la culture et du sport.
Le jeune cinéaste aime aussi mettre en scène Winnipeg comme dans son premier long métrage de fiction, Héliosols, sorti en 2013. Le premier film de fiction produit et réalisé par des francophones de l’Ouest canadien. « On ne voit pas assez Winnipeg pour Winnipeg elle-même. La ville est parfois maquillée pour ressembler à d’autres lieux, mais pas assez pour elle-même. »
Profondément enraciné dans son milieu, Gabriel Tougas n’est pas près de déménager de si tôt de son Manitoba natal. « À l’extérieur de ma vie professionnelle, je suis très heureux d’être là où je suis. J’ai une copine formidable, de la famille, une communauté dans laquelle je m’identifie. »
Pour calquer une réplique d’un personnage secondaire à l’endroit de l’héroïne d’Héliosols face à son combat contre des pétrolières, on pourrait dire à Gabriel Tougas : « Il faut que tu continues! »
Ça ne veut pas dire toutefois qu’il se boucherait les oreilles comme Ulysse pour ne pas entendre le chant de sirènes! « Je suis bien conscient de tout le talent incroyable qu’il y a au Québec. » Si on lui demandait d’aller tourner au Québec ? « Ce serait un immense honneur. »