86,2 % des Ténoises ayant accouché dans les cinq dernières années ont nourri leur enfant au sein.
À l’instigation de l’administrateur en chef de la santé publique des Territoires du Nord-Ouest, André Corriveau, le Collège Aurora mène actuellement une enquête sur les habitudes d’allaitement de plusieurs générations de femmes des Territoires du Nord-Ouest. L’objectif est de réaliser une vidéo pédagogique valorisant ce mode d’alimentation.
« Breast is the Best! [Le sein est le meilleur] », explique la responsable du programme de santé d’Aurora, Pertice Moffitt, utilisant un slogan publicitaire mis de l’avant par des organisations internationales de santé il y a quelques années. L’allaitement, parmi ses multiples vertus, diminue le diabète chez les femmes enceintes, renforce le système immunitaire des bébés, prévient l’asthme, etc. Il est également bon aussi pour les enfants prématurés.
« L’allaitement est naturel, ajoute-t-elle, mais il faut du soutien pour apprendre à la mère à allaiter. Et l’expérience aide pour le bébé suivant, mais chaque bébé est différent. »
Sans parler que bébé, lui aussi, doit apprendre à téter. Mais lors de leur bref séjour à l’hôpital, les femmes n’ont pas toujours la chance de se préparer. Or, le gouvernement ténois veut s’inscrire à l’IHAB soit l’initiative des Hôpitaux amis des bébés et offrir un soutien social pour promouvoir l’allaitement. La forme retenue est une vidéo avec un livret, des documents qui pourraient éventuellement être traduits en langues autochtones.
Recensement
Depuis l’automne 2017 et jusqu’en mars prochain, la petite équipe du docteur Moffitt rencontre à travers les TNO des mères, des grands-mères et des arrière-grands-mères recrutées par les communautés elles-mêmes pour participer à des cercles de partage. Pour ces occasions, cinq aînées réunies dans un comité conseiller des Gardiens du Savoir proposent un cadre de questionnement : pourquoi et combien de temps elles ont allaité, quelles sont les coutumes traditionnelles associées à l’allaitement, etc.
« Jusqu’à présent, de dire Pertice Moffitt, nous avons fait des entrevues avec 49 grands-mères et arrière-grands-mères, et 24 mères. Il nous reste encore à réaliser des entrevues de grands-mères et de mères, à recruter plus de ces dernières. » Rien n’a encore été filmé jusqu’à présent, l’équipe du Collège Aurora s’affairant à récolter le consentement des participantes.
Cette documentation établira éventuellement des différences culturelles dans les savoirs et pratiques traditionnels d’allaitement chez les Gwich’ins, les Inuvialuits et autres peuples ténois. Ce sera démontré dans le rapport définitif, dont la rédaction commencera au printemps.
Parallèlement, une enquête est menée sur toutes les femmes ayant enfanté aux Territoires du Nord-Ouest en 2016 (environ 750) afin de fournir des données épidémiologiques sur l’initiation et la durée de l’allaitement.
La pratique
Depuis 1999, le docteur Moffitt a réalisé plusieurs études sur la maternité et sur l’allaitement aux Territoires du Nord-Ouest, certaines étant publiées dans l’International Journal of Circumpolar Health. « À la fin des années 2000, rappelle-t-elle, il n’y avait pas beaucoup de femmes qui allaitaient chez les Tlichos. Beaucoup de raisons expliquaient ça. L’anglais n’était pas la langue première et les femmes lisaient sur les bouteilles de lait maternisé “aussi bon que du lait maternel”. Les maisons surpeuplées et l’école ne favorisaient pas l’allaitement, il y avait l’adoption… » De manière générale en Amérique du Nord, la modernité a contribué au déclin de l’allaitement.
Selon l’Enquête de 2015-2016 sur la santé dans les collectivités canadiennes, aux Territoires du Nord-Ouest, 86,2 % des femmes qui ont accouché dans les cinq dernières années ont nourri au sein leur enfant, ne serait-ce que pour une courte période de temps. La moyenne canadienne est de 89,9 %.
Selon la chroniqueuse du magazine Forbes Kavin Senapathy, science mom autoproclamée, jusqu’à 15 % des mères ne peuvent produire assez de lait pour allaiter.