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le Jeudi 1 mars 2018 16:11 | mis à jour le 20 mars 2025 10:40 Politique

Législation La loi sur les eaux inquiète la société civile

Législation La loi sur les eaux inquiète la société civile
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 Le chapitre ténois du Conseil des Canadiens considère que le gouvernement Trudeau ne tient pas ses promesses avec son projet de loi sur la protection des eaux navigables. Les conservateurs, le Nouveau Parti démocrastique et le Parti vert désapprouvent également le projet.
« Selon le Conseil des Canadiens, analyse la coprésidente du Conseil des Canadiens aux Territoires du Nord-Ouest, Lois Little, nous sommes encore où Harper nous a laissés. […] Ils [les libéraux] gardent le programme de Harper en place et le couvrent avec des beaux mots. »
Le gouvernement Trudeau veut pourtant modifier la loi à plusieurs niveaux, par exemple en exigeant des demandes d’approbation pour des ouvrages majeurs (barrages, etc.), en précisant les critères de cette approbation, en conférant des pouvoirs de réglementation au ministre et en donnant de nouvelles mesures d’exécution et de contrôle d’application de la loi.
Le gouvernement propose deux catégories de cours d’eau, une protection dite « accrue » étant accordée à une centaine de cours d’eau répertoriés, répertoire pouvant être augmenté ou diminué selon différents processus.

Ajouts
Tout cela est trop pour le Parti conservateur, insuffisant pour le NPD, le Parti vert et différents groupes environnementalistes. Le Conseil des Canadiens demande au gouvernement fédéral de protéger tous les cours d’eau et de renforcer les processus de participation publique.
Fin 2016, le gouvernement des TNO a fait savoir au Comité permanent des transport, des infrastructures et des collectivités, qui étudiait le projet de loi sur les eaux navigables, qu’il souhaitait que la rivière Slave soit ajoutée à l’annexe où sont répertoriés les cours d’eau qui bénéficieront d’une surveillance accrue. Cette demande n’a pas été retenue par Ottawa.
« Nous n’avons que trois cours d’eau protégés de la pollution industrielle dans les Territoires du Nord-Ouest, rappelle Lois Little, le Mackenzie, le Grand lac de l’Ours et le Grand lac des Esclaves. »
Mme Little s’insurge en outre des pouvoirs discrétionnaires qui permettent au ministre des Transports d’exempter de la loi des projets impliquant de la fracturation hydraulique. La militante du Conseil des Canadiens Emma Lui reproche également cette latitude aménagée dans le projet de loi, tout comme l’obscurité de divers mécanismes, et le fait qu’elle impose à l’individu le fardeau de se faire entendre pour qu’un cours d’eau soit ajouté à la liste des cours d’eau jouissant d’une protection supplémentaire.

Variations
Sous le régime Harper, la Loi sur la protection des eaux navigables était devenue la Loi sur la protection de la navigation dans le cadre d’un projet de loi omnibus de 430 pages. Un régime minceur avait été imposé à la loi précédente et des milliers de cours d’eau avaient été évincés de la liste des cours d’eau protégés.
Le gouvernement Trudeau propose à son tour des modifications à la loi, renommée Loi concernant la protection de la navigation dans les eaux navigables canadiennes (titre abrégé : Loi sur les eaux navigables canadiennes). Ces modifications s’inscrivent dans le cadre du projet de loi C-69, un projet de loi omnibus de 364 pages qui contient des modifications à une dizaine de lois, dont celles sur l’évaluation d’impact, la Régie canadienne de l’énergie et le transfert des responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest.
Le caractère touffu du projet de loi, qui a passé le stade de la seconde lecture au Parlement, a suscité l’ironie du député conservateur d’Abbotsford, Ed Fast. « Le projet de loi C-69, a déclaré M. Fast en Chambre le 14 février dernier, qui compte pas moins de 370 pages, est une lecture abrutissante remplie de belles paroles. Les députés se rappellent-ils que les libéraux et le premier ministre, lorsqu’il faisait partie de l’opposition, déploraient le fait que l’ancien gouvernement déposait parfois des projets de loi omnibus? »
Pour M. Fast, la nouvelle loi nuirait à la capacité du Canada de bâtir et de mettre en œuvre les infrastructures vitales qui représentent le moteur de la prospérité dans ce pays.

Consultation à venir
La chef du Parti vert et députée de Saanich-Gulf Island, Elisabeth May, considère que le projet de loi C-69 n’honore pas la promesse du Parti libéral de rétablir les protections perdues. Mais ce sont davantage les segments de la loi sur l’évaluation d’impact et sur la Régie canadienne de l’énergie qui ont suscité sa désapprobation.
«Les pouvoirs discrétionnaires donnés au ministre dans le cadre de la Loi sont démesurés, analyse le député de Trois-Rivières, Robert Aubin, également porte-parole du NPD en matière de transport. La position des Libéraux était de faire disparaître l’annexe et de protéger tous les cours d’eau. Mais non seulement ils n’ont pas rétabli la protection sur tous les cours d’eau, mais ils établissent qu’il n’y a pas besoin d’étude environnementale si le projet est jugé d’intérêt public. Le ministre peut faire ce qu’il veut. »
Le projet de loi C-69 devrait être examiné par un comité gouvernemental sur l’environnement avant sa troisième lecture et son passage au Sénat. À moins de changements majeurs, envers lesquels il entretient très peu d’espoir, M. Aubin ne voit pas comment son parti pourrait voter pour cette loi.
Le Comité permanent des transports, des infrastructures et des collectivités a déposé onze recommandations devant le ministère des Transports après une vaste consultation dans le cadre de laquelle plusieurs individus et organismes, dont le gouvernement des TNO et le gouvernement tlicho, ont présenté des mémoires. Ces recommandations ont été acceptées par le ministère des Transports.
Le gouvernement a annoncé qu’aussitôt la loi sanctionnée, il lancerait le processus pour ajouter des voies navigables à l’annexe des cours d’eau bénéficiant d’une surveillance supplémentaire.
Le député libéral des Territoires du Nord-Ouest, Michael McLeod, a décliné la demande d’entrevue de L’Aquilon, alléguant un horaire trop chargé.