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le Vendredi 22 novembre 2019 1:26 Société

Si les migrants s’en mêlaient Ma liste d’épicerie

Si les migrants s’en mêlaient Ma liste d’épicerie
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Avez-vous une liste d’épicerie à soumettre aux nouveaux gouvernements ténois et fédéral ?
La semaine dernière, les chefs des principaux partis politiques fédéraux ont défilé dans le bureau du premier ministre Trudeau, qui va devoir composer avec leurs demandes, gouvernement minoritaire oblige.
Il semblerait que le contexte minoritaire soit le plus propice à faire avancer des projets de société, alors c’est une opportunité pour nous aussi, citoyens lambdas, de présenter nos listes d’épicerie.
Avez-vous une liste d’épicerie pour nos gouvernements ? La mienne s’allonge chaque jour avec tout d’abord le revenu de base universel, la réforme du mode de scrutin, et l’octroi du droit de vote aux résidents permanents et aux jeunes à partir de 16 ans.

Un revenu de base universel
Durant la campagne électorale fédérale, nous avons surtout entendu parler de projets qui divisent tels que la Loi sur la laïcité du Québec ou le projet d’expansion de l’oléoduc Trans Mountain. Nous n’avons pas entendu parler entre autres des stratégies de réduction de la pauvreté dans les différents débats politiques. Heureusement qu’au niveau territorial, des forums, notamment ceux organisés par Alternatives North, ont abordé la question de la pauvreté et des inégalités sociales croissantes.
Pendant leur premier mandat, les Libéraux ont introduit l’allocation canadienne pour enfants. Ils pourraient dans la même veine instaurer le revenu minimum garanti pour des personnes en âge de travailler.
Selon un récent sondage Gallup mené en collaboration avec la Northeastern University, 75 % des Canadiens soutiennent l’instauration d’un revenu universel de base au Canada. Le 26 octobre 2019, plusieurs groupes ont manifesté à travers le monde pour réclamer la mise sur pied d’un revenu de base garanti. Des villes comme Toronto, New York, Stockholm, Séoul et Bogota se sont jointes au mouvement.

Le projet pilote du revenu de base universel en Ontario
La proposition faite au gouvernement de l’Ontario par Hugh Segal en 2017 était de remplacer le système de sécurité sociale en place par un revenu de base garanti. Le système en place est très bureaucratique et force les fonctionnaires responsables d’agir comme des policiers qui scrutent les modes de vie des gens pour dénicher les fraudeurs plutôt que d’aider véritablement les gens à sortir de la pauvreté. Les programmes de sécurité sociale à travers le Canada ne paient pas plus que 50 % de ce qui est nécessaire pour vivre au niveau du seuil de pauvreté, ou juste un petit peu au-dessus de ce seuil. Ces programmes sont tellement restrictifs qu’ils maintiennent les bénéficiaires dans un cercle vicieux d’insécurité financière et psychologique défavorable à la réintégration du marché du travail.
Ce revenu fonctionnerait comme le Supplément de revenu garanti octroyé aux personnes âgées de 65 ans et plus. En produisant sa déclaration de revenus, tout résident dont le revenu tomberait sous un certain seuil verrait son revenu mensuel automatiquement majoré pour atteindre le revenu de base garanti.
Le projet pilote proposé par Hugh Segal au gouvernement de la première ministre Kathleen Wynne était de cibler les personnes ayant un revenu de 45 à 70 % du seuil de pauvreté et de leur octroyer des subsides allant de 640 $ à 1300 $ par mois. En cas d’amélioration de leur situation financière, les bénéficiaires paieraient 50 % d’impôt sur la moitié de leurs gains, mais garderaient le reste de l’argent sans imposition. Lorsque leurs gains atteindraient le même montant que le revenu de base, ils seraient imposés de la même manière que n’importe quel citoyen.
Les résultats préliminaires de ce projet pilote étaient encourageants, mais le gouvernement de Doug Ford s’est empressé de le stopper dans les mois suivant l’élection provinciale de l’Ontario.

Un enjeu fédérateur, d’un océan à l’autre
Toutes les améliorations sociales et économiques qui ont fait la différence dans la vie des Canadiens ont découlé d’ententes multipartisanes. Le système d’assurance maladie universelle au Canada en est un exemple. Il a été adopté par un gouvernement libéral minoritaire dirigé par Lester B. Pearson. Le premier supplément de revenu garanti a d’abord été instauré par le Parti progressiste-conservateur à la tête d’un gouvernement minoritaire en l’Ontario. Le programme a ensuite été adopté par plusieurs provinces, et le gouvernement fédéral a introduit le Supplément de revenu garanti pour les bénéficiaires de la pension de la sécurité de la vieillesse. Ce programme s’assure qu’aucun résident canadien âgé de 65 ans ou plus ne vive avec moins de 1200 $ par mois.

Des initiatives provinciales en cours
Les Verts constituent l’opposition officielle au nouveau gouvernement minoritaire conservateur de l’Ile-du-Prince-Édouard. Une résolution de la nouvelle législature stipule la nécessité d’un revenu minimum garanti et un comité spécial sur la pauvreté y travaille actuellement et cherche à s’inspirer du projet pilote lancé en Ontario par la première ministre Kathleen Wynne en 2017. En Colombie-Britannique, un comité d’experts sur la pauvreté planche également sur ce dossier.

Qui sont les principaux opposants au revenu de base universel ?
Premièrement, des fonctionnaires responsables des programmes de sécurité du revenu ne verraient pas d’un bon œil ce droit statutaire qui, à l’instar du supplément de revenu garanti des ainés, serait versé de manière automatique. Les syndicats sont habituellement des champions des programmes visant à la réduction de la pauvreté; mais ils sont hostiles à un système qui implique un transfert direct de fonds sans droit de regard des fonctionnaires dont les emplois seraient ainsi menacés.
Et des partisans de droite qui affirment qu’une telle mesure encouragerait plus de gens à ne rien faire puisqu’ils seraient payés à ne rien faire… 70 % des Canadiens vivant en dessous du seuil de pauvreté travaillent. Certains, dans beaucoup de grandes villes, exercent plus d’un emploi, mais ils ne peuvent pas dépasser le seuil de pauvreté à cause des couts de vie exorbitants. Ainsi, la notion que ce revenu de base garanti exhorterait la paresse n’est pas justifiée.

Combien ça nous couterait ?
Le revenu de base universel viendrait remplacer la plupart sinon la totalité des autres programmes de sécurité sociale, incluant les prestations pour les personnes handicapées.
D’après le modèle du revenu universel de base utilisé en Ontario, ce programme couterait initialement environ 76 milliards de dollars. Mais, très vite, à cause des autres programmes qu’il remplacerait et des gains « collatéraux » associés à une meilleure qualité de vie de l’ensemble des citoyens, le cout serait abaissé à 44 milliards d’un océan à l’autre. À titre d’exemple, l’Ontario à lui seul dépense 10 milliards de dollars en sécurité sociale, incluant les prestations versées aux personnes vivant avec des handicaps.
Même s’il y a des oppositions au revenu de base garanti, ce concept est aussi une façon de bâtir l’unité nationale autour d’un projet auquel chaque province et territoire pourrait adhérer. À nous de nous assurer que les programmes politiques des nouvelles législatures territoriale et fédérale priorisent le revenu de base garanti.
Pour avoir plus d’informations et soutenir le mouvement pour une garantie de revenu de base pour tous, visitez le site Web du Réseau canadien pour le revenu garanti.