Je n’ai pas connu mon grand-père maternel. Vétéran de la Seconde Guerre mondiale, il n’a pas laissé sa vie sur le champ d’honneur, mais il n’en est jamais vraiment revenu non plus.
Comme de nombreux autres Canadiens qui sont retournés du front en héros, il a conservé toute sa vie un souvenir indélébile de l’horreur côtoyée au quotidien. À une époque où l’expression « choc posttraumatique » n’existait pas, il a servi son pays comme infirmier militaire avant d’être interné quelques années après son retour au Canada. Il est décédé dans un hôpital psychiatrique.
La guerre tue, mais lorsqu’on en échappe elle marque tout de même les esprits. Tant chez les militaires que chez les populations civiles, ceux qui ont vécu cet effroyable drame humain en sont parfois durablement affectés. On ne sort jamais complètement indemne de la guerre.
Les troubles de la santé mentale sont une réalité pour de nombreux vétérans qui ont participé, notamment, aux missions en Bosnie, en Afghanistan ou, plus récemment, en Syrie. Selon le ministère des Anciens combattants, en 2019, on dénombrait près de 25 000 vétérans diagnostiqués d’un choc posttraumatique et plus de 33 000 aux prises avec des problèmes de santé mentale. Et ça, ce sont seulement ceux qui ont eu le courage de demander de l’aide.
Le traumatisme est aussi le vecteur d’autres problématiques de santé publique, notamment, l’abus de drogues et d’alcool. Lorsque nous luttons contre la crise des opioïdes, un fléau qui, dans certaines régions du Canada, tue davantage que la COVID-19, c’est aussi parfois pour le bienêtre de nos vétérans que nous combattons.
Par ailleurs, comme notre pays continue d’accueillir de nombreux réfugiés venus de zones de conflits armés, il est important de se rappeler que certains d’entre eux auront aussi besoin de soutien psychologique. Il faut faire montre de compassion envers tous ceux qui ont vécu de tels traumatismes et tout mettre en œuvre pour que les soins soient disponibles.
Alors que nous sommes en guerre contre un ennemi microscopique, ce sont désormais les professionnels de la santé qui sont nos nouveaux soldats sur la ligne de front. Il ne faut pas se leurrer, comme mon grand-père sur les côtes de Normandie, certains reviendront des unités de soins intensifs et des centres de soins longue durée la mort imprégnée au fond du crâne. Nos héros dans les hôpitaux, comme leurs familles, ont besoin de soutien psychologique et certains en auront sans doute besoin sur le long terme. Quand la pandémie sera derrière nous, nous aurons un devoir moral de soutenir ceux qui nous ont gardés en sécurité.
À l’occasion du Jour du Souvenir, ayons une pensée pour tous ceux qui sont morts pour défendre notre liberté, mais également pour ceux, vivants, qui continuent de revivre l’horreur. Nous n’oublions pas et nous sommes de tout cœur avec vous.