Contrairement au Nunavut et aux Territoires du Nord-Ouest, qui votent selon un mode de scrutin sans partis politiques, le Yukon emploie un modèle de Westminster semblable à ce qu’on retrouve dans les provinces et au fédéral. Les électeurs font face à des chefs qui défendent un programme électoral et, dans le cas du gouvernement sortant, un bilan. Le libéral Sandy Silver mesure le sien aux propositions du NPD et du Parti du Yukon en matière de logement.
Sur fond de crise immobilière, les Yukonais décideront le 12 avril prochain si, pour la première fois de leur histoire, ils confient un second mandat consécutif au Parti Libéral ou s’ils cautionnent l’un des nouveaux leadeurs : Currie Dixon, du Parti du Yukon ou Kate White, du Nouveau parti démocratique.
M. Dixon, un ancien ministre des services communautaires, a délogé Brad Cathers de la tête du Parti du Yukon l’an dernier et tentera de ravir le comté de Copperbelt North au libéral Ted Adel. M. Cathers est toujours en politique et cherchera à conserver son siège de Lake Laberge. Le parti a remporté six circonscriptions en 2016.
Seule la chef sortante Liz Hanson et Kate White gardait le fort du NPD à l’Assemblée législative yukonaise après l’élection de 2016. Mme Hanson a cédé le leadeurship du parti à Kate White en 2019 et ne se représente pas cette fois-ci.
Kate White sollicite un troisième mandat dans Takhini-Kopper King. « Avant 2016, il n’y avait que deux libéraux élus. J’essaie de faire la même chose », dit-elle, commentant le nombre de sièges qu’elle souhaite ravir.
Chose sure, le NPD ne remportera pas la circonscription de Watson Lake. La candidate Amy Labonte s’est retirée de la course après que certains messages publiés sur les réseaux sociaux aient refait surface. Dans un message publié sur Twitter en 2019, la néodémocrate affirmait souhaiter l’assassinat du président américain Donal Trump. Dans des messages publiés en 2013, également sur Twitter, elle semblait remettre en doute la propreté des personnes qui portent le turban ou se moquer des personnes de petite taille.
Un second mandat ?
Les Libéraux ont remporté 11 des 19 sièges aux élections de 2016 succédant au plus conservateur Parti du Yukon, auquel les Yukonais avaient accordé trois mandats consécutifs. Le député Don Hutton (Mayo-Tactchun) a quitté le caucus libéral plus tôt cette année pour siéger comme indépendant, mais ne se représente pas. Jeremy Harper, un membre de la Première Nation de Selkirk, tentera de ramener le comté dans le giron libéral.
Un seul candidat indépendant se présente, l’ex-entraineur de squash Jan Priedetis, qui brigue la circonscription de Mountainview. Alors que le Parti vert a été retiré du registre électoral puisqu’il ne présente pas de candidat.
L’enjeu du logement
Le logement et l’accès à la propriété privée font partie des enjeux majeurs des élections, avec l’économie, la santé et l’environnement. Selon un rapport paru en 2020 de la Société canadienne d’hypothèque et de logement, « l’offre limitée de logements existants et la persistance du marché favorable aux vendeurs ont contribué à la hausse des prix pour de nombreuses formes de logements ». D’après le Bureau des statistiques du Yukon, au quatrième trimestre 2020, le prix moyen des maisons unifamiliales atteignait un niveau record de 598 800 $, une augmentation de 73 100 $ par rapport au quatrième trimestre de l’année précédente.
Les libéraux vantent leurs réussites dans ce domaine tout en promettant de continuer un travail rendu pressant par
« l’inaction des gouvernements précédents », selon le premier ministre sortant, Sandy Silver, qui a obtenu son mandat majoritaire il y a plus de quatre ans.
D’après les données du parti, le Fonds pour les initiatives en matière de logement fournit annuellement 3,6 millions $ pour la construction de logements abordables et aurait jusqu’à maintenant facilité la construction de 350 unités à travers le territoire.
Les Libéraux s’enorgueillissent en outre d’avoir triplé les investissements pour la mise en marché de lots en comparaison des gouvernements précédents et promettent d’ajouter 1000 nouveaux lots aux 550 déjà mis en marché durant le prochain quinquennat.
Ils promettent en outre de s’associer avec le secteur privé pour exploiter des parcelles de terrains de Whitehorse pour la location et la propriété privée.
Revisiter le rôle du gouvernement
Sur le site Internet du Parti du Yukon, Currie Dixon vilipende l’inertie de l’administration sortante.
« Contrairement à certaines places au Canada, peut-on y lire, le manque de terrains disponibles n’est pas dû au manque d’espace, mais au manque de volonté politique. Cette réalité a nui à notre économie. »
Le Parti du Yukon compte aussi sur des partenariats pour résoudre le problème.
Élu, Currie Dixon s’engage à réviser la taille et les objectifs du gouvernement dans le secteur immobilier, ainsi qu’à examiner le rôle de Société d’habitation du Yukon dans les collectivités rurales, où il souhaite offrir des programmes de subvention et des incitatifs fiscaux pour stimuler la construction et la propriété privée.
Comme à Whistler
Pour le Nouveau parti démocratique, le partenariat est aussi un élément clé d’une crise immobilière qui affecte jusqu’à la rétention du personnel de santé dans les collectivités rurales.
« Le Yukon n’est pas une place abordable, rappelle Kate White en français, qu’elle a appris en immersion. Notre vision du résidentiel, c’est quelque chose de similaire à Whistler où les gens peuvent acheter une maison même s’ils n’ont qu’un revenu moyen. »
Un gouvernement NPD travaillerait avec les organismes sans but lucratif, les Premières Nations et le gouvernement fédéral « pour créer des unités de logement vendues à travers une nouvelle société d’habitation à un prix associé à l’indice des prix à la consommation, et qui ne seraient pas revendues dans un marché ouvert, mais seulement à travers la Société d’habitation à un maximum fixé par celle-ci ».
Kate White souhaite aussi limiter les augmentations de loyer, qui peuvent actuellement atteindre jusqu’à 40 % annuellement. Dans cette optique, le NPD veut modifier la Loi sur les propriétaires et les locataires pour bannir les évictions « sans cause et sans avertissement justes ».
Les chefs du Parti Libéral et du Parti du Yukon n’ont pas répondu aux demandes d’entrevue de Médias ténois..
Plus d’électeurs
« Il y a 20 % d’électeurs de plus enregistrés cette année que lors des élections de 2016 », constate le directeur des élections du Yukon, Maxwell Harvey.
Pour accueillir cet électorat en croissance en respectant les règles d’éloignement physique, les espaces de scrutins ont été élargis et, pour la première fois, les bulletins de vote spéciaux sont accessibles à tous ceux qui les demandent. Les gens peuvent déposer ces bulletins à leur bureau de circonscription, au bureau de Whitehorse ou par la poste.
« Mais les bulletins de vote doivent être reçus avant le 12 avril à 20 h », explique M. Harvey.