le Vendredi 9 mai 2025
le Jeudi 26 mai 2022 14:46 | mis à jour le 6 mai 2025 23:20 Société

Violences sexuelles : une nouvelle équipe d’avocates au service des victimes

Violences sexuelles : une nouvelle équipe d’avocates au service des victimes
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Cette initiative du Service des poursuites pénales du Canada (SPPC) aux TNO découle de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, et pourrait éventuellement être étendue au Yukon et au Nunavut.

Thomas Ethier
IJL – Réseau.presse – L’Aquilon

Une nouvelle équipe juridique mise sur pied ce printemps aura sous peu la responsabilité de superviser l’ensemble des poursuites judiciaires liées aux agressions sexuelles aux Territoires du Nord-Ouest. Les deux procureurs désignées à la tâche coordonnent aujourd’hui un ensemble de ressources pour améliorer l’accompagnement des victimes et assurer le bon déroulement des procédures.

Le duo est composé des avocates Annie Piché et Angie Paquin, qui possèdent toutes deux une vaste expérience des contacts avec les victimes et les témoins qui ont subi ou observé des actes de violence sexuelle, selon ce qu’indique le SPPC dans un communiqué de presse.

Les avocates entreprendront les discussions au cours des prochaines semaines avec les membres des collectivités et l’ensemble des parties prenantes, incluant les services aux victimes de la GRC. « Un meilleur service aux victimes devra inclure une meilleure coordination de tous ces acteurs », avance Me Paquin, qui est responsable de diriger les efforts de la nouvelle équipe.

 

Des démarches éprouvantes pour les victimes

Comme le souligne Me Paquin, cette nouvelle initiative part du principe que les victimes de violence sexuelle vivent un traumatisme, et que les procédures judiciaires peuvent être, dans ce contexte, particulièrement éprouvantes. « Ce n’est pas une chose facile de raconter publiquement les évènements qui se sont produits, souligne-t-elle. Le processus judiciaire devrait reconnaitre combien c’est difficile à faire et chercher à les aider à faire part de leurs expériences aux juges et aux jurés chargés d’examiner ces affaires. »

L’experte ne cache pas qu’il y a matière à améliorer les services juridiques offerts aux victimes de violences sexuelles qui, aux TNO, sont majoritairement des filles et femmes autochtones. « Nous souhaitons adopter une approche axée davantage sur les traumatismes subis par les victimes. Nous voulons entendre directement les commentaires et les inquiétudes de celles et ceux qui sont touchés par ce problème », poursuit Me Piché.

La nouvelle équipe devra notamment veiller à améliorer les compétences culturelles du bureau des poursuites pénales des TNO, dans le but de mieux accompagner les clientes issues des collectivités qui entreprennent ces démarches au sein de l’appareil judiciaire.

« Nous pouvons certainement nous améliorer sur ce plan, affirme Me Piché. Nous souhaitons promouvoir la sécurité culturelle des victimes dans la manière dont nous les accompagnons à travers ce processus. Cela se fera par l’éducation des membres de notre organisation, incluant des formations et du mentorat en matière de compétences culturelles. »

Des services à peaufiner

L’équipe se donne également des devoirs à l’interne. Conscientes de la complexité des dossiers à traiter pour les procureurs, les avocates veilleront à s’assurer que leurs collègues sont à jour en matière de poursuites pour agressions sexuelles. Elles leur fourniront notamment une assistance pour la préparation des dossiers et la formulation de recommandations relatives à l’imposition de peines. « Pour que des victimes et la communauté obtiennent justice, nous avons besoin de procureurs compétents et éthiques », souligne Annie Piché.

C’est que le droit en matière de dossiers d’infractions sexuelles se serait considérablement complexifié ces dernières années, selon l’avocate. « Des amendements ont été apportés au Code criminel et certaines procédures sont plus complexes qu’elles ne l’étaient auparavant, explique-t-elle. On pense, par exemple, à la production de dossiers sur lesquels les victimes ou les témoins ont une expectative de vie privée. C’est un domaine du droit qui s’est complexifié et qui exige un meilleur appui à nos procureurs ».

Un choix à respecter

L’avocate insiste : peu importe le contexte, la décision d’entreprendre un processus judiciaire appartient à la victime. « C’est un processus qui peut être long et douloureux. Certaines des victimes souhaitent ne pas y participer, nous en sommes bien conscientes et respectons toujours leurs choix », souligne-t-elle à plusieurs reprises.

Elle ajoute que toutefois, les procureurs ont avant tout la volonté d’écouter, et ces discussions n’engagent personne à entreprendre les démarches. « Je souhaite que les victimes sachent que, dans notre organisation, nous voulons d’abord écouter les victimes, nous voulons entendre l’impact que ce processus judiciaire peut avoir sur elles, et les accompagner. Dans tous les cas, nous voulons respecter leur choix. »

« J’encourage grandement les victimes à porter plainte et à participer au système, conclut-elle. C’est une façon pour elles de s’assurer que la personne qui a causé le tort va être tenue responsable du geste posé. C’est également un processus qui peut aider la victime dans son processus de guérison, observe-t-elle. Nommer les conduites peut être une étape très importante, et ultimement d’obtenir que l’accusé soit tenu responsable des gestes qui ont été commis, peut être une étape importante. »

Selon Statistique Canada, les femmes autochtones âgées de quinze ans ont trois fois et demie plus de risques d’être victimes de violence que les autres femmes du pays. Les territoires canadiens présentent aussi le plus haut taux de crimes violents et d’agressions sexuelles au Canada. Selon les données de 2010, le taux d’agressions sexuelles signalées à la police était de deux à six fois plus élevé qu’au Manitoba, la province qui affiche le plus haut taux d’agressions sexuelles signalées à la police.