Le colonel Pierre Leblanc est certainement un fervent amateur du Grand Nord. Le commandant du secteur Nord des Forces canadiennes a même décidé de demeurer à Yellow-knife une fois qu’il aura pris sa retraite le 12 août, après 33 ans de service.
« Je suis tombé en amour avec le Nord lors d’une tournée à Resolute Bay au cours des années soixante-dix. J’ai apprécié la beauté du Nord, le fait que ce ne soit pas développé et la nature presque parfaite », a-t-il expliqué. Lorsque l’occasion s’est présenté de venir travailler au Nord du 60e parallèle en 1995, le colonel n’a pas hésité à accepter le poste. « C’était comme aller à un tournoi de golf avec salaire et bénéfices », a-t-il blagué. « À Ottawa, j’étais un officier parmi tant d’autres, tandis qu’ici je suis mon propre patron. C’est mieux. »
Pierre Leblanc donne l’impression qu’il est un homme de fer. Il paraît avoir dix ans de moins que ses 53 ans. Réservé, l’air sérieux, il possède néanmoins un sens de l’humour qu’il dissimule derrière un rictus contrôlé. À 7 h 45 il est déjà à son bureau. Il passe la matinée à survoler ce qui a été écrit dans les médias (comme cet article, hein Pierre!), répond à son courrier électronique, participe à des réunions de coordination, etc. Il passe également ses heures du dîner à s’entraîner physiquement.
Il est la personne qui a été le commandant du Nord pour le plus d’années consécutives. En plus de son travail quotidien, il est parvenu à compléter une maîtrise en gestion des affaires. Pourtant, son travail n’est pas une tâche facile. Il doit constamment surveiller les développements se produisant au sein des trois territoires.
Il doit diviser ses heures entre sa vie familiale et les inspections de routine à travers le Nord. « Je passe au moins 50 pour cent de mon temps dans d’autres communautés », a-t-il concédé.
Le colonel Leblanc ne se plaint pourtant pas d’avoir visité le Nord dans son entièreté, ou presque. Ce féru des voyages soutient avoir visité 90 pour cent des communautés nordiques au Yukon, aux T.N.-O. et au Nunavut. Il a également pêché dans des lacs et des rivières isolés. L’un de ses meilleurs souvenirs est une excursion de pêche à la mouche à la rivière Ellis. Pour un sportif amateur, rien de mieux.
Lors d’un exercice, ses hommes et lui ont dormi dans des igloos. « Ils sont mieux isolés que les tentes contre le froid. Si le vent se lève, les tentes ont tendance à s’envoler. Les igloos sont également plus confortables grâce à la neige», a-t-il précisé.
Tous ses voyages, habitant sept pays et en visitant 28 autres, lui ont laissé l’impression que le Nord est l’un des meilleurs endroits où vivre au monde. « Les habitants de Toronto doivent endurer de longs embouteillages tous les jours tandis qu’à Yellowknife je peux me rendre au travail à pied », a indiqué le colonel.
Il estime que la qualité de vie repose plus sur des fondements interpersonnels et écologiques que matériels. « Dans le Nord, les gens se disent « bonjour » lorsqu’ils se croisent dans la rue tandis que les habitants des métropoles s’ignorent. (Š) C’est agréable. » « La ville de Yellowknife offre également beaucoup de services pour la taille de sa population. L’aéroport est plus grand que celui de la ville de Kingston, en Ontario, qui compte 300 000 habitants ».
D’ailleurs, sa famille se plaît à Yellowknife. Pierre Leblanc soutient que ses deux fils adolescents ne veulent surtout pas quitter le Nord. En plus de l’anglais, du français et de l’allemand qu’il maîtrisait déjà, sa vie dans le Nord a permis au colonel d’apprendre quelques mots d’inuktitut. « J’ai appris les mots les plus pratiques tels merci, bonjour, une bière s’il vous plaît ».
Son plus grand exploit selon ce dernier aura été « de hausser l’importance de l’Arctique aux yeux du gouvernement fédéral ».
Bientôt le colonel pourra songer à d’autres choses. Il doit se trouver un nouvel emploi pour payer l’hypothèquede sa nouvelle maison. Il sera remplacé le colonel Kevin McLeod lors d’une cérémonie officielle ayant lieu le 25 juillet prochain.