Non, je ne me suis pas trompée de titre. Il semble bien qu’Inuvik connaisse son hiver le plus doux depuis des décennies. Ce mois-ci, les températures quotidiennes oscillent entre -15°C et -20°C. Un hiver presque tropical au 68e parallèle.
Je me souviens l’année passée, mon premier hiver dans le Nord. J’en ai eu pour mon argent: des -40°C à profusion, uu mois de décembre à claquer des dents, un mois de février encore pire. Cette année, oubliez ca! Pas question de déclarer à la famille ébahie au téléphone: » Ben oui, il fait juste -36°C aujourd’hui, c’est pas pire… » . Non, non. Pendant qu’on se demande ce qui se passe avec Mère Nature, l’est du Canada connaît un hiver comme on n’en avait pas vu depuis longtemps. La population de Terre-Neuve n’ont rien vu de pareil en 60 ans. Les gens du Nouveau-Brunswick en ont assez de pelleter. En Nouvelle-Ecosse, les variation climatiques brutales forcent les gens à marcher dans la » slush » jusqu’aux chevilles.
Pendant ce temps, ici en haut on s’inquiète un peu. Les routes de glace ne sont pas aussi solides qu’elles le devraient; on reporte trop souvent des cas de machineries lourdes ou de gros camions qui ont coulé. Les ponts de glace vont-ils tenir le coup? La douceur du temps favorise l’évaporation, ce qui conduit à d’importantes chutes de neige, ce qui est inhabituel par ici. Trop de neige sur la glace agit comme un isolant et l’empêche de geler parfaitement.
Par contre, les avantages de ce réchauffement du climat sont indéniables: M. Denis Ouellet, qui possède une trentaine de chiens de traîneau, admet que l’entraînement des chiens est plus facile: » On ne se gèle pas tant les mains à -20°C qu’à -35°C! » dit-il. Les enfants sont les grands gagnants de la situation. On peut les voir jouer dehors longtemps, sans capuchon ou grosses mitaines. A l’école Sir Alexander Mackenzie, les récréations se passent toutes à l’extérieur, ou ils sont libres de dépenser leur énergie. » L’an passé, on a gardé les enfants à l’intérieur (à cause du froid) pendant presque un mois entier ! » s’exclame un des professeurs. Bref, la grande question n’est pas de savoir si cela affecte notre vie quotidienne d’une bonne ou mauvaise façon, mais pourquoi ces brutaux changements ont pris place. M. Denis Savoie, résidant depuis vingt ans à Inuvik, affirme qu’il n’a jamais vu un hiver pareil. Est-ce un effet du réchauffement planétaire? Comment en être sûr, puisque certaines provinces situées plus au sud battent des records de froid cette année! Tout ce qu’on peut faire en attendant l’avis des scientifiques (qui sont probablement aussi déroutés que nous), c’est de profiter de ce caprice de la nature et s’accommoder des changements qu’il provoque. Même si ca veut dire qu’on ne peut pas glisser notre -40°C dans un courriel ou une conversation téléphonique…