Le programme de sensibilisation face aux abus de toutes sortes, offert par les Forces armées canadiennes est un pas dans la bonne direction. En effet, il est souvent important pour régler un problème de commencer à en parler. Au minimum, cela peut aider à déculpabiliser les victimes et les soutenir dans les phases de guérison.
Un problème majeur de cette stratégie concerne la décision quant aux sujets à aborder dans le cadre de ces discussions avec les jeunes. Un cercle restreint de personnes prendra cette décision au nom de la communauté. Il faut être réaliste. Dans plusieurs petites communautés, les abus et la violence font partie du menu quotidien. Les personnes appelées à décider du choix des sujets à aborder seront bien souvent des abuseurs ou des abusés eux-mêmes. Il sera difficile de leur arracher un jugement qui soit neutre. Pour être efficace, ce programme devrait s’appuyer sur l’expertise des travailleurs sociaux et des travailleurs du réseau de la santé dans ces communautés. Ils sont les seuls pouvant identifier avec neutralité et en toute connaissance de cause les problèmes majeurs affligeant la communauté. Si le programme persiste à laisser cette décision aux conseils municipaux et autres instances locales, on risque de se retrouver avec des situations où les gens vont parler de suicide sans évoquer les raisons véritables qui incitent les gens à se suicider.
Il faudra aussi qu’un suivi quelconque s’organise à la suite de ce programme. En effet, s’il s’agit d’un bon début, l’exercice sera inutile si rien n’est en place pour régler les problèmes soulevés. Évidemment, ce n’est pas du ressort de l’armée que de se transformer en redresseur de torts. Dans le Nord, ce sont les ministères des Services sociaux des trois territoires qui disposent des ressources pour assurer ce suivi. Encore là, une coordination accrue entre les Forces armées canadiennes et les Services sociaux s’impose.