le Lundi 21 avril 2025
le Vendredi 22 juin 2001 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:35 Société

Et le contrôle, ça vous dit quelque chose?

Et le contrôle, ça vous dit quelque chose?
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Je suis ce qu’on appelle communément « soupe au lait ». Qu’est-ce que c’est, de la soupe au lait? Pour ceux qui cuisinent le moindrement, pas besoin d’expliquer ni pour ceux qui ont déjà fait une soupe aux tomates en boîte en ajoutant du lait. Si vous mettez le feu trop haut, ce n’est pas trop long que ça déborde. Le lait gonfle et hop…trop tard, le mal est fait. Donc, je sais qu’il n’y a pas de quoi se vanter, mais je suis ainsi. Si quelque chose survient qui me contrarie, la soupe déborde. J’ai peine à garder le contrôle de ma bête, si je peux m’exprimer ainsi. Ainsi, tout ce qui survient à ma voiture prend des proportions hors du commun. L’autre jour, j’avais un essuie-glace qui ne fonctionnait pas. Après avoir jeté un oeil là-dessus, je me suis rendue compte que je n’y pouvais rien. J’ai donc demandé à quelqu’un d’autre d’évaluer le dégât. Devant l’incapacité de l’autre à réparer, je me suis résignée à aller au garage. Les coûts de la réparation ont pris des proportions énormes dans ma tête : autour de mille dollars (parce que je croyais devoir ouvrir le devant pour aller jouer dans les fils). Bref, quelques heures plus tard, je me suis retrouvée avec ma voiture réparée et quelques dollars en moins. Si une telle insignifiance a pris une telle ampleur, vous pouvez imaginer quelle furent mon indignation et mon irritation, un matin, lorsque je me suis retrouvée avec les 4 pneus à terre…comme on dit. J’habitais alors à Montréal. Que faire? Impossible de me rendre au garage ainsi : trop loin. Appeler une remorque : le problème ne serait pas réglé, car deux pneus seraient toujours au sol? L’énervement arrivait à son paroxysme, lorsque j’ai eu une idée du tonnerre. Juste à vingt pieds d’où était ma voiture, il y avait un petit magasin de vélos où on pouvait trouver de l’air pour les pneus. Ils m’ont passé la pompe, hop un coup d’air dans chaque pneu et vlan, au garage. Aucun des pneus était crevé. J’avais été la victime d’une mauvaise plaisanterie. Mais mon adrénaline avait eu le temps de faire quelques tours et mon c¦ur avait battu un peu trop fort dans ma poitrine. J’aurais pu trouver ma solution sans m’énerver…mais il semble que non. Un bon jour, ici, à Yellow-knife, je rentre du travail pour trouver ma van VW avec…une vitre cassée…du moins c’est ce que je crois au début. Je fais le tour et je m’aperçois que c’est quatre vitres qui sont cassées. Calamité! Horreur! Je m’emballe. Je trouve un petit papier dans la seule vitre qui tienne encore, me disant que ce sont de jeunes vandales qui ont fait le coup et que la police les a pris sur le fait. Piètre consolation. Pas besoin de vous dire que l’adrénaline n’a fait qu’un tour…et vite. Donc, 1400 $ de remplacement de vitres plus tard…à mes frais (les jeunes trop jeunes pour payer et les parents trop pauvres…), la vie a continué. En voyage, dans mes tribulations qui m’emmènent un peu partout, je peux dire que je perds mon passeport…au moins une fois par jour. Et le scénario est toujours un peu le même. Je sens mes jambes crouler son moi, mon c¦ur bat vite, au secours, je ne trouve plus mon passeport. Puis, un peu plus tard, après y avoir regardé de plus près, je trouve l’égaré à l’endroit où il devrait être. C’est con, je sais, je me donne des émotions fortes dont je pourrais me passer, je sais, mais c’est ainsi. Une chose qui réussit bien à me faire battre le c¦ur plus vite qu’il le devrait et qui me fait sortit de mes gongs, c’est le comportement irresponsable de certains chauffeurs, pour ne pas dire chauffards. Je peste dans ma barbe (je n’en ai pas mais faites comme si), je les appelle de tous les noms, dans mon for intérieur, et même tout fort, à l’intérieur de ma voiture, les vitres bien fermées pour ne pas envenimer les choses, il va sans dire. Je peste donc, j’invente quelques nouveaux noms pour bien nommer l’incident qui fait renverser la soupe…puis je me calme et tout est oublié. La bêtise humaine, en général, me fait sortir de mes gongs, sauf quand c’est vraiment trop, comme l’histoire qui suit.

Il y a de ça plusieurs années, j’étais en voyage en Amérique centrale. J’étais partie dans ma van VW (ma première du genre), et je descendais vers Costa Rica et Panama. Je voyageais alors avec un autre Québécois, rencontré en cours de route, et qui désirait aller à Costa Rica. À la frontière entre le El Salvador, on arrête pour faire les papiers d’usage, et on nous apprend qu’il nous en coûtera environ 10 $ par personne pour traverser, car, de dire le douanier, la frontière est fermée. Il est 17 h 30, et la frontière ferme à 17 h.. Cela semble raisonnable. À notre question sur le prix, le lendemain matin, on se fait répondre qu’il n’en coûtera rien. On décide donc de coucher là, entre les deux frontières. N’oubliez pas que j’ai une van et que je peux dormir n’importe où. On va donc prendre un verre au petit restaurant entre les deux frontières, on va manger, on rigole et le lendemain matin, on se prépare à aller traverser cette frontière, ouverte à partir de 8 h 30. Quelle n’est pas notre surprise de constater que cela coûte maintenant 10 $ par personne pour traverser, même si la frontière est ouverte. À nos airs étonnés, les douaniers nous déclarent que les règlements ont changé dans la nuit, et pour prouver leurs dires, ils sortent un vieux papier tout sale et ils nous lisent un semblant de règlement. Devant de tels efforts pour nous faire payer ce montant, nous nous sommes résignés, sinon, on serait toujours là. Ce n’était pas pour l’argent qu’on n’avait pas traversé la veille, c’était par principe, pour déjouer la corruption. Mais elle nous avait rattrapés au détour. Il fallait payer. Donc, pour terminer ma petite confession sur la soupe au lait que je suis, quand la bêtise est trop grande, la soupe n’a pas le temps de monter. Trop, c’est trop. On se ferme la boîte et on paye…mais on s’en souvient des dizaines d’années après. Et on écrit quelque chose là-dessus. Et cri cri cri, mon petit conte est fini. À la prochaine!

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