La première mine de diamant au pays mise sur une période d’au moins vingt ans après la fermeture du site pour que les lacs drainés recouvrent leur habitat naturel. C’est ce qu’affirme Helen Butler, hydrologue au service environnemental de la mine Ekati. Le procédé de drainage qui touche quatre lacs sur le site du Lac de Gras donne accès aux kimberlites, ces roches qui contiennent le diamant. La compagnie, en activité depuis trois ans, compte remettre dans leur état naturel les puits de plusieurs centaines de mètres de profondeur creusés sous les nappes d’eau.
« Nous avons un lac sur le site qui est relié par un pipeline, qui va nous permettre de remplir les lacs drainés », explique la spécialiste, « Pour Ekati, l’environnement est notre préoccupation #2, précédé par la sécurité. » Une préoccupation que partage également certains spécialistes, comme Peter McCarp, biologiste à l’Agence indépendante de surveillance environnementale à Yellow-knife, chargée d’observer les activités minières d’Ekati et leurs impacts environnementaux. « Rien n’indique que l’habitat naturel des poissons sera tel qu’il était avant le drainage des lacs. » C’est que la capacité de production de l’habitat, c’est-à-dire la reproduction des espèces, peut être affectée par les activités de la mine. « J’ai l’impression que ces lacs ne retrouveront pas la même concentration de poisson », explique Peter McCarp. « Je crois plutôt que la production sera moindre. » Une situation qui peut s’expliquer par la modification de la superficie des lacs, même si la mine s’est engagée à remplir et à remettre au fond du puit les mêmes végétaux et minéraux. Une mesure qui comporte également son lot d’inquiétudes. « Les puits pourraient être remplis par mégarde par des minéraux souillés par les activités minières », indique le biologiste.
La Directive sur le principe d’aucune perte nette, du ministère des Pêches et Océans (MPO), se penche sur toute activité humaine pouvant nuire à l’habitat naturel des poissons. « La compensation, qui consiste à remplacer un habitat endommagé par un nouvel habitat [Š] est l’option la moins privilégiée par le MPO », indique le document. Peter McCarp estime que dans le cas d’une exploitation minière, la meilleure solution de rechange n’est pas nécessairement le recouvrement du même habitat naturel. « Le mieux, je crois, est d’essayer d’améliorer et d’augmenter la capacité de production d’un lac existant à proximité du site. » C’est d’ailleurs ce que suggère le document du MPO.
La mine Ekati, gérée par BHP Billiton, devrait construire deux autre puits d’ici deux ou trois ans. Le service environnemental de la mine, composé de dix personnes, poursuit ses activités de surveillance dont les résultats sont publiés chaque année dans un rapport. « BHP devra faire le suivi au cours des vingt à trente années après la fermeture du site », mentionne Helen Butler. Peter McCarp ne peut affirmer si ces efforts seront récompensés. « Nous ne pouvons pas savoir si tout reviendra à la normale, puisque personne n’a fait la même chose dans cette zone auparavant. » Le biologiste estime qu’un projet comme Snap Lake, administré par la compagnie sud-africaine De Beers, qui propose de construire une mine de diamant souterraine, comporte moins de risques pour l’environnement. « Mais c’est beaucoup plus cher à construire, alors il est évident que ce n’est pas la première solution envisagée. »