Les idées ne sont pas nouvelles sur le terrain de la dévolution. Mais certains spécialistes affirment crûment leurs points de vue.
Pour l’avocat de droit constitutionnel Bernie Funston, la Constitution est comme une patinoire de hockey. Rien n’indique au spectateur quel genre de partie y sera jouée, qui seront les joueurs. C’est la métaphore qu’il a présentée aux participants de la table ronde sur l’autonomie gouvernementale, qui s’est tenue lors du Symposium Retour vers le futur 2002, le 19 juin dernier à Yellowknife. Aux T.N.-O., plusieurs petites constitutions prennent forme à travers les processus de négociation d’autonomie gouvernementale. L’avocat originaire de Fort Smith n’y va pas par quatre chemins et a servi ces recommandations aux chefs autochtones et aux dirigeants politiques : « Arrêtez de perdre trop de temps avec la Constitution et mettez donc l’emphase sur les relations humaines. Ayez des bébés en santé et élevez-les correctement. »
Ce point de vue, de la part d’un avocat spécialisé en droit constitutionnel, peut surprendre. Mais pour Bernie Funston, un pays ne peut pas se construire si les gens qui y habitent ne sont pas en mesure de se prendre en main. « Des communautés, des familles et des gens en santé sont vraiment les ingrédients clefs du bon fonctionnement d’une société. »
Le temps misé sur l’élaboration d’un ensemble de lois régissant l’autorité étatique n’est également pas profitable car, selon l’avocat, les lois constitutionnelles peuvent devenir caduques après quelques années. Puisque les véritables changements ne se manifesteront pas avant une dizaine d’années, les lois en place seront alors à revoir. « Une fois que les lois constitutionnelles sont écrites, elles sont habituellement périmées. Elles sont modifiées par les enjeux de société qui changent avec le temps. » Conclusion : les joueurs doivent s’assurer d’une bonne tactique de jeu avant de se lancer sur la glace.
Négocier d’abord, se soigner ensuite
James Lawrance est membre de l’équipe de négociation de l’autonomie gouvernementale du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada. Il reconnaît d’emblée que plusieurs autres dossiers font compétition à l’autonomie gouvernementale, dont la mondialisation, la question environ-nementale et, plus près de nous, les problèmes sociaux. Mais, selon son point de vue, une société bien définie pourra mieux s’occuper des individus qui la forment. « Faisons des progrès significatifs. De l’avis général, il vaut mieux faire le plus gros de ce travail en premier lieu. De cette façon, nous pourrons porter entièrement notre attention sur les autres problèmes. »
Sur la question du risque que représente la mise sur la glace de certaines questions, l’homme originaire d’Inuvik ne croit pas courir un grand danger. « Nous n’avons pas à mettre de côté ces dossiers et je crois que tout le monde est d’accord. Il faut toujours développer d’abord un système de gouvernement afin de faire de bons choix selon les priorités. »
Les autres participants à la table ronde ont, quant à eux, fait le bilan du processus d’autonomie gouvernementale des 25 dernières années. Jim Antoine, ministre des Ressources, de la Faune et du Développement économique, a dressé un portrait approximatif des futurs gouvernements des T.N.-O. « Le gouvernement territorial continuera d’administrer les programmes reliés à la santé, la justice. Les gouvernements municipaux ne verront pas leurs champs de compétence modifiés. Dans certains domaines, les gouvernements autochtones auront un pouvoir égal ou supérieur à celui du gouvernement territorial. » Le ministre espère voir ces changements d’ici dix ans. « Il n’y a plus de retour en arrière maintenant. Nous sommes sur la route. »