Des représentants du public demandent que la Commission des droits de la personne soit indépendante du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
Une série de personnes et d’organismes ont défilé devant la Commission permanente sur les programmes sociaux le 11 et le 12 septembre dernier à Yellowknife afin de présenter des recommandations sur le projet de Loi no 1 sur les droits de la personne. Premier bilan : le public est plutôt satisfait des mesures présentées par le projet de loi, mais plusieurs articles de la Loi ont été scrutés à la loupe.
Les recommandations les plus attendues ont certainement été celles des groupes de défense des droits des gais, lesbiennes, bisexuels et transsexuels OutNorth et Égale Canada. La porte-parole d’Out-North, Zoe Raemer, a salué l’ajout de l’orientation sexuelle dans le projet de loi comme motif illicite de discrimination, mais a fermement recommandé que les phrases « identité sexuelle » et « expression sexuelle » soient ajoutées au préambule de la Loi. « Le concept rigide et étroit utilisé par la société pour définir l’identité sexuelle et la sexualité peut priver un individu de son sentiment d’appartenance », a-t-elle mentionné devant la Commission permanente.
L’organisation s’est par ailleurs inquiétée de la protection des droits des gais, lesbiennes, bisexuels et transsexuels autochtones et inuits. « Nous savons que la Loi canadienne sur les droits de la personne s’applique lorsqu’une plainte est déposée contre un conseil de bande. Mais nous ne savons pas quelle législation s’applique aux plaintes déposées contre un gouvernement autochtone », a-t-elle ajouté. Le Conseil sur la condition de la femme, de son côté a également suggéré que l’identité sexuelle soit ajoutée aux motifs illicites de discrimination.
Plusieurs organismes ont uni leurs voix pour demander une Commission des droits de la personne indépendante du gouvernement. C’est le cas de l’Organisation nationale anti-pauvreté, du Centre des femmes de Yellowknife, du Conseil sur la condition de la femme des T.N.-O. et d’OutNorth. Les dispositions du projet de loi, pour l’instant, suggèrent que les membres de la Commission soient nommés par la commissaire des T.N.-O., sur la recommandation de l’Assemblée législative. De leur côté, OutNorth et le Centre des femmes de Yellowknife ont recommandé que la composition de la Commission soit représentative de la société, en suggérant, entre autres, qu’elle soit composée de 50 % de femmes.
Le projet de loi, sur certains points va au-delà de son équivalent canadien. Le paragraphe 1 (1) défini l’incapacité comme étant « l’une des affections suivantes, qu’elle soit présumée ou réelle, dont une personne est ou a été atteinte ou dont elle est susceptible d’être atteinte. » Selon le bureau d’avocats Lawson Lundell, de Yellowknife, le dernier point de la définition est avant-gardiste. Le Comité de révision de la Loi canadienne des droits de la personne a déjà recommandé la même définition, mais le Parlement canadien ne l’a jamais adopté. Par contre, l’un des trois administrateurs de l’actuelle Loi prohibant la discrimination, Elaine Bengts, a signifié à la Commission permanente que le concept d’incapacité doit inclure la toxicomanie et l’alcoolémie. « Plusieurs autres (juridictions) canadiennes ont reconnu la dépendance comme étant une incapacité et l’ont souligné dans leurs lois sur les droits de la personne. »
L’addition du concept de condition sociale dans les motifs illicites de discrimination est aussi une nouveauté. Seul le Québec a, pour l’instant, une disposition similaire dans sa Charte des droits et libertés. Le bureau d’avocats a également soulevé le fait que le paragraphe 9 (1) concernant l’équité salariale va plus loin que les lois provinciales. Le projet de loi suggère que le concept « à travail égal, salaire égal » soit appliqué à tous, sans distinction de genre, mais plutôt sur la base des motifs illicites de discrimination.
L’administratrice Elaine Bengts, du bureau de la Loi prohibant la discrimination, a particulièrement souligné la lourdeur du nouveau système proposé. Selon le modèle actuellement en place, une plainte est déposée, analysée et traitée à l’intérieur d’une période de six mois et ce, par deux personnes procédant en six étapes. Le système proposé se découpe en treize étapes et demande la participation de quatre employés. « Le conseil le plus judicieux que je n’ai jamais reçu est : si ce n’est pas défectueux, ne le répare pas. Je suggère que nous examinions ce qui ne fonctionne pas avec le système en place et que nous déterminions en quoi ce qui est proposé sera plus efficace. »
Parmi les autres demandes, notons le besoin d’éducation du public sur les dispositions de la Loi, l’interdiction de diffuser des messages à caractère haineux à travers les médias électroniques et l’interdiction de discriminer un individu qui a été condamné devant un tribunal ou qui est sous inculpation. Le Conseil sur la condition de la femme a recommandé à la Commission permanente l’ajout de la langue et le lieu de résidence dans les motifs illicites de discrimination.
La Commission permanente a terminé ses audiences publiques à Yellowknife. Les communautés d’Inuvik et de Fort Smith ont pu faire entendre leurs voix un peu plus tôt au cours du mois de septembre. Le projet de loi révisé sera présenté aux députés au cours de la prochaine session qui débute le 16 octobre prochain.