Le Nunavik ne sera peut-être jamais autonome comme le Nunavut, mais les communautés négocient présentement pour plus d’autonomie.
La jeune avocate et attaché politique du président de la Société Makivik, Jocelyne Barrett, ne sait pas si elle peut discuter librement des projets des communautés du Nunavik. Commissaire à la Commission canadienne des affaires polaires, elle était de passage à Yellowknife le 13 septembre dernier. Elle explique tout de même les grandes lignes des plans qui se dessinent pour les prochaines années. Première étape : le regroupement des organismes gérés par les Inuits du Nord-du-Québec sous un seul chapiteau. Deuxième étape : la négociation en bloc de plus d’autonomie.
« La première étape peut se faire dans un court délai, dans une année. Après, on va négocier plus de pouvoirs, de responsabilités », raconte l’avocate, qui ajoute qu’elle ne croit pas que les communautés veulent un territoire comme le Nunavut. « Ce n’est pas dans nos intentions présentement. »
La Société Makivik organise les négociations pour les quelque 10 000 personnes qui habitent le territoire. Diplômée de l’Université McGill, à Montréal, l’avocate Jocelyne Barrett voit de près les grandes décisions.
Elle voit aussi de près le Nunavik depuis 25 ans. Ses parents, originaires de l’Ontario, ont élu domicile à Kuujjuak, à une époque où peu de Blancs avaient le courage de prendre la route du Nord. Elle a fait ses études primaires et secondaires dans la communauté, puis a terminé le collège et l’université au sud du Québec. S’exprimant en français, anglais et inuktituk, elle mentionne qu’elle n’a jamais été à l’aise dans le Sud. « J’étais la seule personne non-inuite quand j’ai grandi ici. Les familles de mes amis inuits m’amenaient faire du camping, de la pêche, de la chasse », se rappelle-t-elle, indiquant que, même si elle ne comprend pas toutes les coutumes et traditions inuites, ce contact avec la culture lui a ouvert d’autres horizons.
Optimiste, elle envisage pour le Nunavik un futur qui épouserait le meilleur des deux mondes. « Les changements au cours des 25 dernières années ont été importants et les jeunes se sont adaptés aux deux mondes, celui de leurs grands-parents et celui du monde moderne. Ils peuvent naviguer sur Internet et le lendemain aller à la chasse avec leurs parents. » L’avocate estime que seulement une minorité de jeunes s’éloigne de leur culture. « La culture est encore très forte au Nunavik. »
Les problèmes sociaux ne sont toutefois pas relégués aux oubliettes. Même les changements climatiques, qui provoquent beaucoup d’inquiétude, ne parviennent pas à faire oublier les maux de la société inuite. « La mentalité des gens est : ce sont nos problèmes, on trouvera nos solutions nous-mêmes. Ça ne viendra pas d’ailleurs. »
Le territoire au nord du 55e parallèle a pu mettre la main sur sa propre destinée il y a plus de 25 ans déjà, lors de la signature de la Convention de la baie James et du nord québécois. Des institutions ont été créées, comme la Société Makivik, qui a pour objectif la mise en œuvre de la Convention, et le Conseil Kativik des services de santé et des services sociaux. « Il y a une grosse différence entre une organisation gérée d’Ottawa ou de Québec et une organisation gérée ici », indique Jocelyne Barrett. Les Inuits administrent également leurs propres commissions scolaires.