le Lundi 18 août 2025
le Lundi 18 août 2025 8:01 Francophonie

Au commissariat, changement de direction et plaintes en recul

 La présidente de la Fédération franco-ténoise, Sophie Gauthier, la commissaire aux langues officielles des Territoires du Nord-Ouest, Krista Carnogursky et la directrice générale de la FFT, Audrey Fournier, lors d’une rencontre le 8 aout dernier.  — Courtoisie FFT
La présidente de la Fédération franco-ténoise, Sophie Gauthier, la commissaire aux langues officielles des Territoires du Nord-Ouest, Krista Carnogursky et la directrice générale de la FFT, Audrey Fournier, lors d’une rencontre le 8 aout dernier.
Courtoisie FFT
Deux plaintes, aucune recommandation ni enquête, le rapport annuel 2024-2025 du commissariat aux langues officielles des Territoires du Nord-Ouest fait dans le régime minceur. Il s’agit du dernier rapport de Brenda Gauthier et du premier de Krista Carnogursky, qui a pris sa relève en janvier, tout en poursuivant son mandat de protectrice du citoyen.
Au commissariat, changement de direction et plaintes en recul
00:00 00:00

Le présent rapport couvre la période du 1er avril 2024 au 31 mars 2025. Durant cette période, le commissariat a rouvert deux dossiers de l’année précédente sur l’affichage et traité deux plaintes concernant la politique d’offre active en français dans le Beaufort-Delta. Les commissaires ont également participé à plusieurs évènements professionnels et pour faire la promotion de leur travail.

Mais comment expliquer un si faible nombre de plaintes, l’absence de recommandations et d’enquêtes ? « C’est quelque chose que j’aimerais résoudre, répond Krista Carnogursky. Depuis que j’ai commencé, je trouve qu’il y a des malentendus sur le rôle et les fonctions du commissariat. Je ne pense pas que la majorité des citoyens savent qu’ils peuvent faire une plainte au commissaire et qu’ils peuvent requérir ses services dans leurs langues, particulièrement les langues autochtones. » Pourtant, le commissariat aux langues officielles des TNO a ouvert ses portes en 1992. En 2023-2024, le commissariat avait reçu cinq plaintes.

Mme Carnogusrky considère que le faible nombre de locuteurs autochtones est aussi un facteur. « Je crois aussi que des citoyens ne pensent pas que leurs plaintes seront prises au sérieux ou qu’elles changeront quoi que ce soit, ajoute-t-elle […] J’espère construire cette confiance en les rencontrant, en expliquant les règlements, et le fait que leur plainte peut être confidentielle. »

La directrice générale de la Fédération franco-ténoise (FFT), Audrey Fournier partage cette analyse quant à la méconnaissance du commissariat et à son manque de pouvoir perçu. Elle ajoute que l’interface de plaintes – un formulaire qu’on imprime et remplit à la main – est fastidieuse. « C’est probablement une barrière, avance Mme Fournier.

Quels changements à venir ?

La directrice de la FFT estime que le commissariat manque de proactivité et rappelle qu’indépendamment des plaintes, il a la légitimité requise pour mener des enquêtes.

C’est ce que Krista Carnogursky prévoit faire durant ce qui sera son premier mandat complet.

« Je planifie de mener des enquêtes sur l’accès aux services dans les langues », dit la commissaire, qui compte aussi participer à beaucoup de rencontres dans les communautés.

Depuis le 31 mars, elle dit avoir reçu des demandes d’information, mais pas de plaintes.

Mme Carnogursky est toujours en discussion avec le ministère de l’Éducation, de la Culture et de la Formation concernant les plaintes sur l’offre active. « Je suis très contente du travail fait au ministère et de ce qui sera mis en place quant à ces préoccupations », dit la commissaire, gardant toutefois confidentielle la discussion.

Mme Carnogursky devrait être bientôt assistée par un.e commissaire adjoint.e.

Depuis que j’ai commencé, je trouve qu’il y a des malentendus sur le rôle et les fonctions du commissariat.

— Krista Carnogursky, commissaire aux langues officielles des Territoires du Nord-Ouest et protectrice du citoyen

Des rapports antagonistes

De récents propos des ministres Vince McKay et Lucy Kuptana, dénonçant la tentative de parents de recevoir de l’éducation en français langue première à Fort Smith, rappellent une acrimonie certaine entre les groupes linguistiques francophone et autochtone. La commissaire dit n’avoir jamais constaté ou entendu parler de ce clivage et, donc, ne pas sentir la nécessité de faire de la sensibilisation sur les droits respectifs de ces groupes.

« Ça revient au gouvernement de porter un message qui informe, mais qui est aussi plus rassembleur, ou du moins, qui ne divise pas, considère quant à elle la directrice générale de la FFT, Audrey Fournier. Il n’y a pas une communauté moins importante que l’autre. Ça ne veut pas dire que la commissaire n’a pas un rôle, elle pourrait définitivement faire de la promotion. »

En ce qui concerne la plainte sur l’offre active dans Beaufort Delta, Mme Fournier dit pouvoir comprendre l’irritation et l’incompréhension de certains citoyens. « C’est important que les autochtones aient accès à des services ou des communications dans leur langue. […] Si on voyait plus d’efforts de revitalisation des langues autochtones, peut-être que ce malaise serait moins là. »

Le français oublié ?

Elle-même d’origine gwich’in, Krista Carnogursky a imposé l’origine autochtone comme critère d’embauche au poste d’assistant-commissaire.

« Neuf des 11 langues officielles des TNO sont autochtones, explique-t-elle. J’espère qu’avoir une personne d’origine autochtone aidera le commissariat à identifier les barrières ou les préoccupations systémiques dans l’accès aux langues, pour aider à améliorer les services aux citoyens, qui sont, pour la moitié, autochtones. »

Selon Audrey Fournier, « la description complète du poste n’est pas disponible en français. Il n’y a aucune mention du français comme étant une compétence requise. »

Elle affirme que c’est important que le commissariat ait du personnel qui comprenne les enjeux des francophones, qui soit capable de s’exprimer en français pour certains évènements. Par exemple, la journée d’accueil des nouveaux arrivants où le français est la langue maternelle ou la langue seconde de plusieurs personnes.

« Ce n’est pas un super bon signal pour les francophones », analyse la directrice de la FFT.

Elle concède toutefois que deux employés du protecteur du citoyen, qui partagent ses bureaux de Hay River avec le commissariat aux langues officielles, parlent français.

« Elle [Krista Carnogursky] me donne tout de même confiance pour qu’il y ait des améliorations », a dit Mme Fournier au terme de sa rencontre du 8 aout avec la commissaire. 

Elle croit néanmoins qu’il est prématuré de se prononcer sur la pertinence de la fusion entre le commissariat et le protecteur du citoyen.

Prochaine échéance

Le rapport annuel 2024-2025 du commissariat aux langues officielles des Territoires du Nord-Ouest sera déposé à la reprise des travaux de la session de l’Assemblée législative, le 16 octobre 2025. Il pourrait préalablement être étudié par le Comité permanent des opérations gouvernementales.