
Lauréat du César du meilleur film d’animation en 2020, J’ai perdu mon corps s’est imposé comme une œuvre singulière lors de sa sortie en novembre 2019. Adapté du roman Happy Hand de Guillaume Laurant, il est le premier long métrage du réalisateur français Jérémy Clapin, auparavant connu pour la réalisation de plusieurs courts métrages. Ce film d’animation pour adultes a séduit la critique et trouvé sa place dans de prestigieux festivals internationaux, de Cannes à Annecy, avant d’être nommé aux Oscars. D’une poésie troublante, le film plonge le spectateur dans une quête d’identité et dans le désir de se reconstruire.
À Paris, une main coupée s’échappe d’un laboratoire médical et entame un voyage périlleux dans les rues de la capitale française pour retrouver le corps auquel elle appartient. Au fil de son périple, cette main affronte divers dangers tout en se remémorant les souvenirs de son « propriétaire », Naoufel. Après la disparition dramatique de ses parents, ce jeune homme solitaire est envoyé à Paris pour vivre avec un oncle indifférent, incapable de lui offrir la moindre attention. Il tente de donner un nouveau sens à sa vie après avoir croisé Gabrielle, une bibliothécaire dont il tombe secrètement amoureux.
Ce qui frappe d’abord, c’est le style visuel choisi par le réalisateur. Le film alterne entre des séquences en couleur et d’autres en noir et blanc pour différencier les moments de vie du jeune Naoufel. Ironiquement, le réalisateur opte pour le noir et blanc afin d’illustrer l’enfance lumineuse du protagoniste, créant une dualité qui met en relief la solitude et la morosité du présent dans lequel il évolue. En outre, la singularité de ce film d’animation repose sur le recours au toucher pour se souvenir du passé. Là où le cinéma choisit souvent la vue ou l’ouïe pour convoquer la mémoire, J’ai perdu mon corps fait du contact la clé de l’intime. Cette main coupée se souvient des éléments, des matières, des caresses. Le tout porté par la magnifique musique de Dan Levy, dont les notes délicates viennent renforcer la dimension poétique et onirique de l’œuvre.
En combinant une animation originale, une approche sensorielle unique et une bande-son envoutante, J’ai perdu mon corps n’est pas seulement un récit sur la perte et la reconstruction de soi. Le film explore ce qui nous relie aux autres, les liens que nous développons et les forces qui nous font vivre dans un monde parfois cruel.