
Eva Aariak, commissaire du Nunavut, Gerald W. Kisoun, commissaire des TNO, Bill Webber et Adeline Webber, commissaire du Yukon, ont assisté à une cérémonie sur la réconciliation à Whitehorse le 20 juin 2025.
Il y a dix ans, la Commission de vérité et réconciliation publiait un rapport final intitulé Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir. 94 appels à l’action pour remédier aux séquelles laissées par le système des pensionnats et faire ainsi progresser le processus de réconciliation sont notamment listés.
La réconciliation concerne toute la société canadienne et les institutions du pays. Selon Adeline Webber, commissaire du Yukon depuis 2023 et membre de la Première Nation des Teslin Tlingit, la réconciliation est en bonne voie dans le territoire. Même s’il reste du travail à accomplir, elle estime que le processus en cours au Yukon est non seulement important, mais aussi encourageant : « La réconciliation est sur la bonne voie, vous savez, comparée à ce que nous avions dans notre jeunesse ici au Yukon. Nous allons de l’avant parce que je pense qu’avec les revendications territoriales, tout le monde est impliqué. »
À chacun son processus de guérison
Cependant, il est important, selon Mme Webber, de reconnaitre que les survivants des systèmes de pensionnats n’ont pas tous souffert de la même façon et que le chemin de la guérison peut être plus long pour certaines personnes. « Chacun en est à un stade différent de son processus de guérison. Certains d’entre nous ont déjà bien avancé, d’autres viennent tout juste de commencer. Nous devons en être conscients et les aider », affirme celle qui a été élève du pensionnat Whitehorse Baptist Indian Mission School. Cet établissement a ouvert ses portes de 1947 à 1960.
Reconnaitre le passé est fondamental, selon Eva Aariak, commissaire du Nunavut, mais regarder vers l’avenir est essentiel. « Il faut connaitre et comprendre notre situation passée. Aujourd’hui, nous devons commencer à relever certains des défis auxquels ont été confrontées de nombreuses personnes qui ont vécu dans les pensionnats et ont subi des traitements injustes, comme les peuples de l’Arctique et bien d’autres encore. Il faut avoir une vision plus optimiste de l’avenir, car nous devons tourner la page et relever les défis », précise-t-elle.
Enfin, pour la gouverneure générale Mary Simon, originaire du Nunavik, le 30 septembre offre l’occasion de réfléchir ; mais c’est aussi une journée d’action durant laquelle les citoyens canadiens peuvent concrétiser la réconciliation dans leur vie quotidienne. Apprendre des erreurs du passé et construire des relations fondées sur le respect et la compréhension entre les peuples autochtones et non autochtones est l’une des façons de faire avancer la réconciliation à l’échelle locale.
Il faut connaitre et comprendre notre situation passée. Aujourd’hui, nous devons commencer à relever certains des défis auxquels ont été confrontées de nombreuses personnes qui ont vécu dans les pensionnats et ont subi des traitements injustes, comme les peuples de l’Arctique et bien d’autres encore. Il faut avoir une vision plus optimiste de l’avenir, car nous devons tourner la page et relever les défis.
Des réactions ambivalentes
Dans son rapport annuel pour 2024-2025, l’organisme Inuit Tapiriit Kanatami, qui représente les Inuits à l’échelle nationale, a rappelé que l’une des principales réalisations en matière de réconciliation au cours de la dernière année a été la présentation d’excuses, par le gouvernement du Canada, pour le massacre des chiens du Nunavik de 1950 au début des années 1960. À cette époque, le gouvernement fédéral cherchait à sédentariser les populations du Nunavik, et l’abattage des chiens a empêché les Inuits de se déplacer sur le territoire comme il se faisait dans le passé.
Formulées le 23 novembre 2024, ces excuses rappellent que « les actions et l’inaction du gouvernement du Canada ont perturbé le mode de vie des Inuits du Nunavik. Cela comprenait l’abattage des chiens de traineau, sans lesquels les Inuits ne pouvaient pas accéder à la terre et ne pouvaient pas retourner à leurs camps de chasse ou à leurs pièges. Cela a conduit à de grands bouleversements économiques, culturels et émotionnels qui se font encore sentir aujourd’hui. »
45 millions de dollars ont depuis été alloués pour aider les communautés inuites du Nunavik à mettre en œuvre des programmes pour la guérison et la revitalisation culturelle.
En revanche, pour l’Assemblée des Premières Nations, aucun appel à l’action n’a été mené à bien au cours de l’année 2024-2025. Dénonçant des progrès trop lents, Cindy Woodhouse Nepinak, Cheffe nationale, a souligné que des investissements fédéraux étaient nécessaires, pas des compressions budgétaires.
« Dans le cadre de ses décisions pour le budget, le gouvernement fédéral doit prendre des mesures pour promouvoir la réconciliation. Sinon, son engagement déclaré en faveur de la réconciliation restera lettre morte », a déclaré la Cheffe.
Si des progrès significatifs ont été accomplis dans les domaines du sport et des médias, peu de progrès ont été accomplis dans le système de justice, en éducation et auprès des jeunes. De plus, le financement global pour la revitalisation des langues reste insuffisant et a diminué depuis 2023-2024, peut-on lire dans le rapport de l’AFN sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des appels à l’action de la CVR, publié en septembre 2025.
Rappelant que les progrès sont minimes, Mme Woodhouse Nepinak pointe du doigt les restrictions budgétaires de 15 % sur trois ans, annoncées en juillet 2025 par le premier ministre Carney, qui menacent la mise en œuvre des appels à l’action.
Les programmes essentiels pour les Premières Nations sont déjà sous-financés, selon la Cheffe, et le gouvernement devrait prendre des engagements fermes pour aider les Premières Nations à ouvrir la voie à un avenir meilleur et à la prospérité pour tous.
Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.