La lettre du ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation, Charles Dent, a été officiellement rendue publique par son dépôt lors de la rencontre de la Commission scolaire de division (CSFD), le 17 mars dernier. À propos de l’agrandissement de l’École Allain St-Cyr ou la construction d’un nouvel édifice pour accommoder la clientèle du secondaire, le ministre écrit : « en ce qui concerne l’agrandissement de l’École Allain St-Cyr, nous pouvons étudier cela dans le cadre de notre processus de planification des immobilisations. Cependant, je dois insister sur le fait que nos ressources pour les projets d’immobilisations sont très limitées et que nous avons beaucoup de besoins dont nous devons tenir compte au sein du GTNO ».
« Nous avons beaucoup de problèmes, à partir d’écoles sur le point de s’effondrer, jusqu’à des écoles où des enfants sont déjà dans les corridors. C’est un défi. Je ne dis pas non, mais j’espère que tout le monde comprendra que nous avons un sérieux problème d’argent y compris les investissements dans les écoles des TNO », a ensuite expliqué M. Dent.
Le ministre ne peut dire, non plus, si l’agrandissement de l’école de Yellowknife pourrait être un projet couvert par le plan quinquennal de l’éducation en français qui sera négocié sous peu par le gouvernement territorial et le ministère du Patrimoine canadien. « Il est encore trop tôt pour dire ça. La requête vient de m’arriver et ça ne fait que quelques mois que je suis en poste », de répondre celui qui a plutôt dû se concentrer à l’élaboration des budgets de 2004-2005, au cours des derniers mois.
De son côté, le président de la CSFD, André Légaré, a fait sa propre analyse de la réponse du ministre. « On ne répond pas vraiment. On se contente d’argumenter sur le plan légal, à savoir quels sont les droits des francophones par rapport à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés et dans quelle mesure ces droits sont appropriés ou pertinents à la construction ou l’agrandissement d’une école, compte tenu du nombre actuels d’élèves ».
Le ministre Dent consacre effectivement un long paragraphe en réponse à l’avis juridique qui avait été préparé par Me Roger Lepage, pour le compte de l’Association des parents ayants droit de Yellowknife (APADY). « Nous avons examiné avec soin l’analyse menée par M. Roger Lepage. Notre examen de la jurisprudence nous amène à la conclusion que son analyse ne va pas de pair avec le processus souligné par la Cour suprême du Canada pour déterminer si une minorité linguistique a des droits en matière d’éducation et le niveau de service adéquat pour un nombre donné d’élèves ».
« Nous n’acceptons pas nécessairement tous les arguments, mais j’ai dit très clairement que, malgré ça, nous sommes prêts à travailler pour mettre leur demande dans le plan d’immobilisation. Je ne voulais pas laisser l’impression que je n’avais pas répondu aux arguments de M. Lepage », a ensuite expliqué le ministre Dent.
À titre d’exemple, le ministre mentionne que les calculs de M. Lepage sur le nombre d’élèves qui fréquenteraient l’école agrandie sont basés sur le total de la 1e à la 12e année, alors qu’ils devraient l’être sur le nombre d’élèves du niveau secondaire.
« S’il y a une Commission scolaire francophone de division, c’est un aveu de la part du GTNO, que les nombres sont suffisants pour que les francophones bénéficient d’une gestion complète et indépendante. Automatiquement, nous obtenons le maximum de pouvoirs décisionnels, incluant le pouvoir de décider de tout ce qui touche à la langue et à la culture, ou à la nécessité de construire ou d’agrandir une école », fait plutôt valoir Roger Lepage.
« Je suggère que peut-être que le GTNO n’est pas aussi au courant qu’il le devrait relativement à d’autre jugements de la Cour suprême tel que Arsenault-Cameron, en 2000, et Doucet-Boudreault, en octobre 2003. Dans ses plus récents arrêts, on a clairement dit que dès qu’une commission scolaire francophone est créée et que dès que cette commission décide qu’il est nécessaire d’ouvrir ou d’agrandir une école, le ministre a très peu de discrétion », poursuit le juriste.
M. Lepage croit donc qu’un processus de rencontres sera nécessaire entre la commission scolaire et le ministère de l’Éducation, de la Culture et de la Formation. C’est d’ailleurs ce que compte faire André Légaré. Une rencontre avec des fonctionnaires était prévue pour le 20 mars dernier et une rencontre avec le ministre sera demandée. « Nous voulons nous assurer que l’ensemble des joueurs, que ce soit le ministère, la commission scolaire ou les parents, comprennent bien les enjeux et que l’on puisse mener à terme ce projet de construction ou d’agrandissement », dit le président qui n’entend pas abandonner le projet.
De son côté, la présidente de l’APADY, Yvonne Careen, qui est aussi commissaire, s’attendait à ce type de réponse du ministre. « Nous ne sommes pas nécessairement contents de leur réaction parce que, surtout au niveau de l’agrandissement de l’école, on a lancé un débat juridique plutôt que de nous donner une réponse. On attendra que la CSFD rencontre les gens du ministère pour voir où vont les discussions avant de prendre une décision », dit-elle. Rappelons que l’APADY a déjà évoqué la possibilité d’en venir à un recours judiciaire pour obtenir l’agrandissement de l’école francophone de Yellowkife.
Le mémoire déposé par la CSFD demandait aussi au gouvernement territorial de réitérer son engagement envers la construction de l’École boréale de Hay River. À cette demande, Charles Dent a répondu que les discussions étaient toujours en cours avec le gouvernement fédéral et qu’il s’attendait à ce que la construction commence « plus tard cette année ».
Pour ce qui est du financement accru qui permettrait à la CSFD de déménager ses bureaux dans des espaces plus spacieux et d’engager des ressources additionnelles, un conseiller pédagogique et un agent de recrutement, M. Dent a mentionné que son ministère était disposé à revoir le budget de la CSFD pour déterminer des solutions envisageables.
En ce qui à trait à la radiation de la dette de la CSFD, le ministre dit être prêt à ce que son ministère collabore pour aider à corriger la situation, mais que la politique du ministère était de ne pas effacer de dette d’organismes scolaires.