« Autant la rétention dans la communauté francophone que la promotion en continu de l’usage de notre langue, tous les deux sont importants »

Antoine Gagnon, directeur du Secrétariat aux affaires francophones du GTNO.
Le hall de l’Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest a accueilli le 22 mars l’évènement Francophonie en résonance, une journée de réflexion et de célébration autour de la langue française. Organisé par la Fédération franco-ténoise (FFT) en partenariat avec le Collège nordique francophone et le gouvernement des TNO, ce rassemblement s’inscrivait dans la programmation des Rendez-vous de la Francophonie (RVF). La communauté francophone de Yellowknife y était invitée pour réfléchir aux enjeux linguistiques, identitaires et culturels qui façonnent le territoire.
En ouverture, Sophie Gauthier, présidente du conseil d’administration de la FFT, a rappelé l’importance des RVF, soulignant que « nous sommes plus de 1 200 francophones » aux TNO, et que la communauté « œuvre activement à l’amélioration de l’accès aux services en français aux Territoires ».
Antoine Gagnon, directeur du Secrétariat aux affaires francophones du GTNO, a repris le thème de l’année, Cultivez vos racines, pour illustrer les réalités de la francophonie ténoise : enracinement, départs, mais aussi pertes linguistiques. « Autant la rétention dans la communauté francophone que la promotion en continu de l’usage de notre langue, tous les deux sont importants », a-t-il affirmé, tout en saluant les efforts gouvernementaux pour offrir des services en français de qualité.
Le dialogue interculturel prend une place croissante au sein du Collège nordique, a souligné à son tour son directeur général, Patrick Arsenault. Il a rappelé que l’initiative des cours de langues autochtones proposés par l’établissement « venait des francophones eux-mêmes, qui avaient ce désir d’en apprendre davantage ».
Audrey Fournier, directrice générale de la FFT, a insisté sur l’esprit rassembleur de cette édition. Elle a aussi rappelé que les langues, en particulier le français, « jouent un rôle fondamental dans la construction de nos identités collectives et dans les liens entre nos cultures ».
« Les trois territoires n’ont aucune garantie constitutionnelle dans [L’Acte de l’Amérique du Nord britannique], ni dans la Charte des droits et libertés. Ils existent comme une entité du gouvernement fédéral. »

Cecilia Wood, ainée dénée parlant le tłı̨chǫ, Angélique Ruzindana, Berna Martin, membre de la Première Nation des Dénés Yellowknives et traductrice en wiiliideh, Francis Giguère, coordonnateur principal à la formation et à l’enseignement du CNF, et Audrey Fournier, directrice générale de la FFT.

Invité spécial de l’évènement, Me Roger Lepage a expliqué l’évolution des protections juridiques pour les francophones dans les TNO.
Les droits linguistiques
Au cœur de l’après-midi, l’avocat Roger Lepage a présenté une conférence sur l’évolution des droits linguistiques des francophones dans l’Ouest canadien, avec un accent particulier sur les Territoires du Nord-Ouest.
Spécialiste reconnu de la question, Me Lepage a expliqué que les TNO se distinguent des provinces par leur statut que leur structure repose donc sur une loi fédérale, et non sur une base constitutionnelle. « Les trois territoires n’ont aucune garantie constitutionnelle dans [L’Acte de l’Amérique du Nord britannique], ni dans la Charte des droits et libertés. Ils existent comme une entité du gouvernement fédéral. »
Il est revenu sur la modification de la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest en 1984, à la suite d’une contestation menée par la Fédération franco-ténoise. Cette loi a reconnu officiellement onze langues, dont le français. « C’est une loi quasi constitutionnelle ici, les droits linguistiques. Ça a pris longtemps pour arriver là », a-t-il souligné.
Pour Me Lepage, il est essentiel d’adopter une approche juridique rigoureuse : « Il faut aussi utiliser des principes d’interprétation tels que le principe d’interprétation large et libéral pour s’assurer d’arriver à l’objet de ce droit linguistique ». Il conclut en rappelant que la responsabilité du gouvernement fédéral envers les droits linguistiques dans les territoires demeure entière et ne peut être transférée.

Langues et transmission
En clôture, Cecilia Wood, ainée dénée parlant le tłı̨chǫ, et Berna Martin, membre de la Première Nation des Dénés Yellowknives et traductrice en wiiliideh, ont souligné l’importance de préserver et de transmettre les langues autochtones, en rappelant leur lien profond avec l’identité et la culture. Angélique Ruzindana, participante francophone au programme de jumelage, a partagé son expérience d’apprentissage du wiiliideh comme un geste de rapprochement entre cultures. Francis Giguère, coordonnateur principal à la formation et à l’enseignement au Collège nordique, a rappelé que l’objectif du programme est de créer des ponts du-rables entre francophones et ainés autochtones à travers la langue et le dialogue intergénérationnel.