le Jeudi 25 Décembre 2025
le Samedi 20 Décembre 2025 13:14 Actualités

La Première Nation Na‑Cho Nyäk Dun réclame justice

À la suite de l’accident de juin 2024, la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun a perdu l’accès à son camp de pêche traditionnel deux années de suite. Le site est toujours contaminé, mais les niveaux de pollution et l’ampleur des conséquences sur la biodiversité restent indéterminés.
 — Oleg Jeremin/Pixabay
À la suite de l’accident de juin 2024, la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun a perdu l’accès à son camp de pêche traditionnel deux années de suite. Le site est toujours contaminé, mais les niveaux de pollution et l’ampleur des conséquences sur la biodiversité restent indéterminés.
Oleg Jeremin/Pixabay

La Première Nation de Na-Cho Nyäk Dun (NND) a annoncé, le 9 décembre dernier, son intention de mener une action en justice contre les gouvernements du Yukon et du Canada. Cette plainte, déposée devant la Cour suprême du Yukon, est liée à la catastrophe ayant eu lieu à la mine Eagle Gold.

La Première Nation Na‑Cho Nyäk Dun réclame justice
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NND réclame justice pour la mauvaise gestion de longue date de l’exploitation minière par les gouvernements fédéral et territorial sur son territoire traditionnel. Elle demande également une suspension temporaire des jalonnements afin de minimiser les dommages supplémentaires.

Cette action devant la justice fait suite à l’accident survenu le 24 juin 2024 sur le site de la mine d’or Eagle Gold. La défaillance de la plateforme de lixiviation en tas sur le site de la mine a entrainé un déversement majeur de contaminants dans le ruisseau Haggart et la rivière McQuesten, aux abords immédiats du lieu de l’accident. 

Aujourd’hui, le site est toujours contaminé, mais la Première Nation ne sait toujours pas dans quelles proportions l’environnement immédiat est contaminé ni l’ampleur des dégâts sur la biodiversité.

Faire respecter les droits issus des traités

Cette requête devant la justice fait suite à des mois d’inaction et d’échecs cumulés selon Dawna Hope, cheffe de la Première Nation de Na-Cho Nyäk Dun. « Nous réclamons justice pour la mauvaise gestion de longue date de l’exploitation minière par les gouvernements fédéral et territorial sur notre territoire traditionnel, ainsi qu’une suspension temporaire du jalonnement afin de minimiser les dommages supplémentaires », peut-on lire dans le communiqué de presse. 

La plainte met en lumière le non-respect des traités par les deux gouvernements et cette ignorance délibérée révèle, selon Mme Hope, un caractère systémique.

« La Première Nation de NND attend depuis des décennies que le régime minier soit actualisé afin de refléter les promesses contenues dans notre traité. Ce litige ne concerne pas une partie en particulier ni le gouvernement du Yukon en soi. Il concerne les manquements systémiques du Yukon à respecter notre traité », précise-t-elle.

La décision de recourir à la justice dans cette affaire a été prise en juillet 2025 lors de l’Assemblée générale. Citoyens et personnes ainées en ont tout simplement eu assez des effets dévastateurs sur leur territoire traditionnel et par ricochet sur leur culture. « Nous avons besoin d’un processus qui permette d’évaluer de manière adéquate les impacts d’un projet sur nos droits issus de traités. Et nous avons besoin d’un processus qui tienne compte des effets négatifs de l’activité minière sur notre territoire traditionnel. Il ne peut plus s’agir d’un processus ponctuel, projet par projet », dénonce Mme Hope.

En effet, le gouvernement du Yukon dit consulter NDD sur près de 150 projets miniers par an, mais le délai de consultation est extrêmement restreint. Cette façon de faire ne peut plus durer, car elle est contradictoire avec les termes des traités signés dans le passé et ne constitue pas une consultation significative. 

Une pollution « hors de contrôle », selon NDD

À l’heure actuelle, Mme Hope dénonce la pollution du ruisseau Haggart et de la rivière McQuesten qui est une répercussion directe de l’accident. 

Cette contamination, au cyanure notamment, est toujours hors de contrôle 18 mois après l’accident. « Les poissons et la faune de notre territoire traditionnel en ont souffert. Nous avons perdu notre camp traditionnel de pêche à l’omble. Nous perdons des saumons et la dégradation de son habitat perdure. Nos terres continuent d’être ravagées et cela ne peut pas continuer », martèle la cheffe.

Mme Hope espère que ce procès marquera la fin d’une approche coloniale toujours en cours dans les relations avec les Premières Nations. Il obligera les gouvernements, fédéral et du Yukon, à considérer NDD comme un partenaire dans la gouvernance où ses droits constitutionnels seront enfin respectés. 

La requête en cours d’examen par le gouvernement du Yukon

Dans un message adressé à Médias ténois le 12 décembre, Tim Kucharuk, attaché de presse au cabinet du premier ministre du gouvernement du Yukon, a déclaré que la requête déposée par NDD était en cours d’examen. « Nous restons déterminés à travailler dans le respect avec la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun sur les priorités essentielles à nos relations intergouvernementales. Nous espérons rencontrer les dirigeants de Na-Cho Nyäk Dun au début de la nouvelle année et maintenir une communication ouverte avec la cheffe et les dirigeants », a-t-il cependant déclaré. 

Aucune date de procès n’a officiellement été annoncée.   

La Première Nation Na-Cho Nyäk Dun réclame toujours la tenue d’une enquête publique. Cette action en justice est une démarche menée en parallèle. L’enquête, réclamée en 2024, est essentielle pour comprendre comment la catastrophe s’est produite et le rôle que chacune des parties impliquées a joué.

Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.