Le 18 novembre 2021, la Chambre des représentants américaine a adopté un projet de loi appelé « Build Back Better » (mieux reconstruire) qui, comme son nom l’indique, vise à apporter plus d’équité dans la société par des réformes améliorant, notamment, la couverture médicale. Cependant, ce sont les propositions visant à lutter contre les effets du réchauffement climatique qui constituent une avancée significative vers la protection permanente de la Réserve faunique nationale de l’Arctique, en Alaska (Arctic National Wildlife Refuge).
Ce projet de loi stipule que cette zone de plus de 78 000 km2 serait protégée et ne pourrait plus être à la merci de potentiels projets d’exploitation de pétrole et de gaz présents dans la région. Il implique également l’annulation des ventes de baux du 6 janvier 2021. Lors de cette vente virtuelle, l’autorité de développement industriel et d’exportation de l’Alaska, société publique de l’État de l’Alaska, avait présenté la majorité des offres dont la plus élevée s’élevait à 14,4 millions $.
Dana Tizya-Tramm, chef de la Première Nation Vuntut Gwitchin au Yukon, et défenseur de longue date de la Réserve faunique, s’est dit ému à l’annonce de cette nouvelle.
« C’est un signal important que la Chambre des représentants [nous envoie] et c’est une reconnaissance des droits fondamentaux de la personne. [Cet organe du pouvoir législatif] a reconnu les effets désastreux que des projets de développement pourraient avoir dans cette région encore intacte », indique le chef Tizya-Tramm lors d’une conférence de presse, le 19 novembre.
Un désintéressement du monde de la finance
La vulnérabilité extrême de cette zone n’a pas échappé à certaines institutions financières du Canada et des États-Unis, qui ont décidé de ne plus financer aucun projet dans la Réserve faunique de l’Arctique. Récemment, la compagnie d’assurance Zurich s’est jointe aux banques Scotia et RBC, pour n’en citer que quelques-unes, qui ont clairement affiché leur scepticisme face aux projets de développement dans la région. la Réserve faunique de l’Arctique est un endroit sacré pour le peuple Gwich’in de l’Alaska, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Aire de mise bas indispensable à la survie de la harde de caribous de la Porcupine, c’est la protection du caribou qui se joue, à l’heure où l’insécurité alimentaire prédomine malheureusement dans de nombreuses collectivités de l’Arctique.
Au cœur de l’identité gwich’in
Le caribou tient une place primordiale dans le cœur du peuple gwich’in dont le mythe fondateur place cet animal au centre de l’histoire originelle. Pour la directrice générale du Comité directeur gwich’in (Gwich’in Steering Committee), Bernadette Demienteff, la Réserve faunique qui n’est pas une terre à vendre, « fait partie de la culture et de l’identité gwich’in. » Si elle reproche aux Sénateurs américains de n’avoir jamais cherché à communiquer avec les membres du Comité directeur, elle rappelle que le pétrole et l’argent ne se mangent pas, contrairement à la viande de caribou.
Pour être définitivement entérinée, la proposition de loi doit encore être adoptée par le Sénat
Le chef Dana Tyzia-Tramm se dit plein d’espoir quant à son adoption au Sénat. Il reconnait cependant que, face au réchauffement climatique, le travail à accomplir est encore immense. La Réserve de l’Arctique présente les séquelles de l’augmentation des températures, selon lui, et, une fois que cette loi sera définitivement adoptée, « nous pourrons commencer à travailler réellement à un niveau de protection beaucoup plus élevé de ce territoire ».