le Lundi 9 juin 2025
le Lundi 9 juin 2025 10:25 Arctique

L’engagement royal contre le chômage des jeunes au Canada

Naja Pearce (1er rang, deuxième à droite) est membre du conseil des jeunes et représente la perspective des jeunes du Nunavut à la Fondation du Roi. — Photo Fondation du Roi au Canada
Naja Pearce (1er rang, deuxième à droite) est membre du conseil des jeunes et représente la perspective des jeunes du Nunavut à la Fondation du Roi.
Photo Fondation du Roi au Canada
Pour souligner la visite du roi Charles III et de la reine Camilla en mai 2025, le gouvernement fédéral a versé 50 000 $ à la Fondation du Roi basée à Toronto. Cette visite du roi au Canada fut la première depuis le couronnement le 6 mai 2023.
L’engagement royal contre le chômage des jeunes au Canada
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Ce don de 50 000 $ à la Fondation du Roi au Canada par le gouvernement fédéral s’inscrit dans une longue tradition visant à souligner de façon significative les visites ou les tournées des membres de la famille royale. Anciennement nommé Fondation du prince et fondé en 2011 par le désormais roi Charles III, cet organisme œuvre auprès de partenaires communautaires, d’employeurs et d’établissements d’enseignement pour soutenir l’insertion professionnelle de 100 000 jeunes à travers le pays.

Si nous n’intégrons pas les jeunes à la construction de notre économie, c’est tout l’avenir du pays qui est compromis.

— Cynthia Caron Thorburn, codirectrice par intérim de la Fondation du Roi

Dans un rapport publié en novembre 2024, la Fondation du Roi a divulgué les chiffres du taux de chômage parmi les jeunes aux quatre coins du pays. Ce rapport de 55 pages révèle l’état alarmant du chômage chez les jeunes du Canada, lequel n’a jamais été aussi élevé depuis plus d’une décennie. Par ailleurs, des disparités très importantes existent entre les trois territoires. 

En 2023, le taux de chômage des jeunes s’élève à 19,4 % au Nunavut (le plus élevé de tout le pays) alors qu’il n’est qu’à 6,2 % au Yukon. C’est dans ce territoire que le taux de chômage des jeunes est le plus faible au Canada. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le taux culmine à 14,6 % au côté de la province de Terre-Neuve-et-Labrador à 15 %. 

Des disparités criantes dans le Nord 

Selon ce rapport, le manque de compétences ainsi que l’absence d’expérience et le manque de réseau professionnel sont les principales causes du sous-emploi chez les jeunes canadiens. Mais d’autres causes sont aussi à prendre en compte au Nunavut. En effet, la Fondation du Roi travaille avec un conseil des jeunes. Formé de treize membres, le conseil formule des recommandations à l’équipe de direction afin que les enjeux importants pour la jeunesse soient pris en compte lors de l’élaboration des programmes d’accompagnement.

Naja Pearce est membre de ce conseil des jeunes. Elle est née, a grandi et vit toujours aujourd’hui à Iqaluit. Pour elle, l’infrastructure limitée dans les petites communautés est un frein à l’emploi. Les possibilités d’emploi y sont rares, et les postes qui existent sont souvent déjà pourvus ou exigent un niveau d’études auquel de nombreuses personnes vivant dans des régions isolées n’ont pas accès.

« Cette situation, explique Naja Pearce, crée un obstacle pour les personnes qui souhaitent travailler, mais qui ne parviennent pas à trouver un emploi correspondant à leurs compétences ou s’intégrant dans leur communauté. Par conséquent, de nombreux habitants sont confrontés au choix difficile de quitter leur communauté pour chercher du travail ailleurs ou de rester et de faire face à des opportunités limitées. »

De plus, le mode de vie traditionnel inuit rentre en conflit avec les exigences d’un travail salarié. Naja Pearce estime que la préservation de la culture et la transmission du savoir entre les générations demeurent une priorité pour de nombreuses personnes et avance que « la participation à la vie active moderne peut s’avérer difficile, car elle entre souvent en conflit avec le mode de vie traditionnel. » 

« Des activités telles que la chasse, la pratique de nos valeurs culturelles et le fait de vivre de la terre sont au cœur de notre identité. Ce sont les choses que beaucoup de gens veulent faire au quotidien, mais les exigences du monde moderne font qu’il est de plus en plus difficile de maintenir ce mode de vie », explique-t-elle. 

 

L’exception yukonaise ?

Tiana Lemon est membre de la Première Nation Tr’ondëk Hwëch’in de Dawson, au Yukon, et membre du conseil des jeunes. Même si le taux affiché par le territoire est le plus bas, le chômage des jeunes au Yukon reste préoccupant selon elle, en particulier dans les communautés rurales et autochtones, et ce malgré l’augmentation des emplois saisonniers due au tourisme estival et au flux de voyageurs se rendant en Alaska. 

D’autres emplois à court terme sont disponibles dans les domaines de l’exploration minière et de la prévention et de l’intervention en cas d’incendie de forêt, qui s’intensifient pendant les mois d’été, mais le territoire reste confronté à une pénurie de travailleurs qualifiés, tant dans les métiers que dans les professions exigeant une formation universitaire, détaille-t-elle.

« En raison de l’éloignement du Yukon, de nombreux jeunes doivent, dans la plupart des cas, quitter le territoire pour accéder à l’enseignement et à la formation postsecondaires, et se heurtent souvent à des obstacles financiers, culturels et logistiques qui les empêchent de rentrer chez eux pour travailler. »

Parallèlement, les secteurs de l’éducation et de la culture offrent de plus en plus de possibilités en particulier dans le domaine de la revitalisation des langues autochtones. Des programmes permettent aussi aux jeunes de se former au leadeurship communautaire. 

« Les jeunes autochtones sont de plus en plus payés pour apprendre leur langue et leurs pratiques culturelles dans le cadre d’apprentissages structurés et d’initiatives sur le terrain soutenues par les Premières Nations et le gouvernement. Ces programmes soutiennent non seulement la préservation de la langue et de la culture, mais offrent également des emplois intéressants et des perspectives de carrière fondées sur la culture pour les jeunes du Yukon », développe Tiana Lemon. 

Jeunesse, économie et santé mentale

Pour Cynthia Caron Thorburn, codirectrice par intérim de la Fondation du Roi, le chômage des jeunes n’a pas que des répercussions économiques. Il affecte aussi la santé mentale : « Si nous n’intégrons pas les jeunes à la construction de notre économie, c’est tout l’avenir du pays qui est compromis », résume-t-elle.

À ce jour, plus de 10 000 jeunes ont bénéficié des programmes de développement de compétences et de réseautage. La subvention récemment versée devrait permettre d’atteindre 100 000 jeunes d’ici 2034.

« Notre perspective est nationale. Au fur et à mesure que nous nous développons, que nous acquérons de l’expérience avec ces programmes et que nous les proposons de plus en plus, nous les diffuserons dans tout le pays. Nous comptons sur certains de nos programmes virtuels pour couvrir le pays de cette manière. Et nous sommes encore en train de mettre au point des programmes et des prestations en personne », conclut Mme Caron Thorburn.

Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.