
Gary Adams est coassocié de la compagnie de pourvoyeurs Canadian High Arctic Adventures et accompagne ses clients lors de chasse au trophée du grizzli arctique dans le nord des TNO.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, la législation de la chasse au grizzli diffère de celle de son voisin, le Yukon. Parmi les six juridictions qui divisent les TNO, la chasse au grizzli n’est autorisée que dans le nord, dans les régions de Fort McPherson, Aklavik, Inuvik, Tuktoyaktuk et Paulatuk.
Dans les monts Mackenzie qui forment une chaine de montagnes située à la frontière entre le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, elle n’est pas autorisée aux personnes non résidentes. Alors même que leur population est présentée comme abondante par l’Association des pourvoyeurs des monts Mackenzie (Association of Mackenzie Mountains Outfitters – AMMO), le grizzli est le seul prédateur qui ne peut pas être chassé. L’ours noir, le glouton (aussi appelé carcajou) et le loup peuvent en outre être chassés par des personnes n’habitant pas la région.
L’association précise, sur son site internet, que « le glouton et l’ours noir ne sont chassés que très rarement ».
En mai 2021, une étude financée par Environnement et changement climatique Canada et l’organisme NatureServe Canada s’est concentrée sur le grizzli à l’échelle nationale. Cette étude de 70 pages indique que la situation des grizzlis aux TNO n’est pas inquiétante : « Les meilleures informations disponibles suggèrent qu’il n’y a aucune preuve de déclin et que la population est tout au moins stable, avec des augmentations locales probables dans les montagnes Mackenzie, certaines parties de la région continentale du territoire des Inuvialuit, et très certainement dans l’archipel arctique (bien que les densités restent très faibles). La seule exception de disparition locale sur le territoire semble provenir des zones du sud du Dehcho, immédiatement au nord de la frontière de l’Alberta. »
Tavis Molnar est propriétaire de la compagnie Arctic Red River Outfitters et président de AMMO. D’après lui, « les grizzlis sont absolument abondants dans les montagnes Mackenzie et il est courant pour nos clients d’apercevoir 10 à 20 grizzlis à chaque excursion ».
La surveillance de la faune
Les compagnies de pourvoyeurs aident le gouvernement des TNO à collecter des données sur cette espèce, selon M. Molnar. En effet, chaque fois qu’un grizzli est abattu, les chasseurs doivent remettre la mâchoire inférieure ou une dent postcanine intacte à un agent de la faune.
Les pourvoyeurs ont développé un sens de l’observation et une proximité avec la faune. Leurs connaissances et observations, année après année, permettent au gouvernement territorial de surveiller les espèces chassées, estime-t-il.
« Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest dispose de très peu de fonds pour la recherche ou la surveillance de la faune sauvage. Ainsi, si vous interrogez un de leurs biologistes, ils vous diront qu’ils dépendent fortement des pourvoyeurs des montagnes Mackenzie pour ce type d’informations », précise M. Molnar.
Le ministère de l’Environnement et des Changements climatiques n’a pas fait de mises à jour récentes concernant l’estimation globale de la population de grizzlis dans les Territoires du Nord-Ouest. Tania Oosting, directrice des Affaires publiques et des communications pour ce ministère, a aussi indiqué que le GTNO ne mène pas d’enquêtes régulières à l’échelle du territoire.
Cependant, des études ponctuelles dans des régions spécifiques où il existe des préoccupations en matière de gestion, telles que la construction de nouvelles routes, les quotas de chasse ou l’activité minière, sont mises en place. Mme Oosting reconnait que ces études fournissent des informations locales importantes, mais ne sont pas suffisamment étendues pour être appliquées à l’ensemble du territoire. Une étude sur la mortalité des grizzlis causée par l’homme est en cours grâce à des enquêtes auprès des chasseurs, des rapports de conflits et des retours d’étiquettes.
Nous chassons généralement six à huit ours par an dans une très grande zone. Nous cherchons toujours à chasser des ours mâles matures, mais nous avons chassé quelques vieilles femelles qui ne se reproduisaient probablement plus.
Cibler les mâles
Lors d’une excursion de chasse au grizzli, seuls les individus âgés ou en fin de vie sont ciblés. Les guides qui accompagnent les clients sont expérimentés et peuvent, en observant les grizzlis, déterminer si l’individu est âgé ou non, explique M. Molnar.
« Les vieux ours ont une grosse tête carrée. Ils sont physiquement complètement développés, et ont une démarche plus chaloupée, plus lourde. Et puis il y a leur taille et leur apparence générale, nous sommes donc devenus très doués pour déterminer le sexe et l’âge des animaux. »
Dans la région d’Inuvik et Tuktoyaktuk, mais aussi à Paulatuk, la chasse au trophée du grizzli arctique est possible. La compagnie de pourvoyeurs, appelée Canadian High Arctic Adventures basée à Inuvik, emmène ses clients à la chasse de printemps de mi-avril jusqu’à la fin du mois de mai. Dans la région de la collectivité Paulatuk, la chasse d’automne est aussi possible du 1er septembre à mi-octobre. Pour Gary Adams, coassocié de la compagnie, les expéditions de chasse se concentrent au maximum sur les mâles.
« Nous chassons généralement six à huit ours par an dans une très grande zone. Nous cherchons toujours à chasser des ours mâles matures, mais nous avons chassé quelques vieilles femelles qui ne se reproduisaient probablement plus », a-t-il expliqué dans un message adressé par courriel à Médias ténois.
Peu de données à jour
Selon le gouvernement fédéral, la région des monts Mackenzie mérite un suivi plus assidu sur les populations de grizzlis. Même si les récoltes annuelles moyennes sont faibles dans cette zone et que la chasse par les non-résidents y est interdite, « l’estimation de la population pour cette région remonte à un certain temps, et il faudrait la revoir ».
Néanmoins, M. Molnar ne se dit pas inquiet, car les grizzlis sont nombreux et ont un taux de reproduction très élevé et un taux de survie élevé. « Nous voyons des grizzlis âgés de 30 ans ici. Lorsque vous voyez des ours aussi âgés, cela signifie qu’ils disposent d’un habitat exceptionnel. »
Pour le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), plusieurs facteurs liés aux activités humaines sont à prendre en considération. La progression rapide des altérations des habitats associée à l’exploitation des ressources, combinée à une très faible densité d’ours et à la vulnérabilité des populations, sont les principales inquiétudes. Ces dernières devraient mener à une estimation des populations et de leurs besoins en matière d’habitat.
Cet article est le deuxième d’une série de trois à paraitre prochainement
Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.