3000 personnes pourraient prétendre à la citoyenneté métisse des Territoires du Nord-Ouest.
Des représentants de la Northwest Territories Métis Nation (NWTMN), dont son président Garry Bailey, se sont réunis à l’Hôtel Explorer de Yellowknife du 17 au 20 janvier afin d’inciter quelque 212 descendants de leur communauté à se procurer leur carte de citoyenneté métisse des Territoires du Nord-Ouest. Le terme citoyenneté est utilisé par la NWTMN, alors qu’elle remet une carte d’identité métisse [Citizenship Identification Card] à ses membres sans qu’ils renoncent à leur citoyenneté canadienne.
Le 18 janvier en fin de journée, une cinquantaine de personnes étaient venues s’inscrire, selon Jason Lépine, le généalogiste engagé par la NWTMN. Depuis le début de la délivrance de la carte en novembre dernier, 2400 individus se sont procuré leur carte, sur une possibilité de 3000, d’après le président de la NWTMN, Garry Bailey.
Pour être admissible, il faut prouver avoir eu, avant le 31 décembre 1921, un ancêtre métis d’origine crie, chipewyan ou slavey qui était dans le secteur visé par la réclamation territoriale [une superficie de 25 194 km2 au sud du Grand lac des Esclaves], qui comprend les trois collectivités de Fort Smith, Hay River et Fort Resolution.
La carte d’identité procure plusieurs avantages à son propriétaire. « Elle donne des droits de pêche, de chasse et de trappage, dans le secteur visé par l’entente, précise M. Bailey, qui possède la carte 0001. Elle te donnera le droit de voter lors l’Entente définitive [avec les gouvernements fédéral et territorial]. »
M. Bailey ajoute que la carte procure aussi des droits d’exploitation des ressources dans le parc national Wood Buffalo en Alberta. Un parc qui relève du gouvernement fédéral, qui était un territoire utilisé par les Métis ténois jusqu’à ce qu’ils en soient exclus par Ottawa en 1923. Une demande de compensation est d’ailleurs en cours auprès du gouvernement fédéral.
Article 35
La documentation remise aux gens se présentant à l’Explorer précise en outre que la carte d’identité de citoyenneté des Territoires du Nord-Ouest remplace officiellement le permis de chasse des Territoires du Nord-Ouest et qu’elle procure tous les droits et bénéfices identifiés à l’article 35 de la Constitution canadienne, qui reconnaît les droits ancestraux et issus de traités.
D’après Garry Bailey, le gouvernement des TNO s’est engagé à reconnaître la validité de la carte de citoyenneté. Elle n’aurait pas encore été testée sur le terrain, à la connaissance de Jason Lépine, mais des personnes lui ont dit l’avoir utilisée dans des banques et des aéroports.
Le gouvernement ténois reconnaît les droits de récolte des membres de la Northwest Territories Métis Nation, a fait savoir à L’Aquilon le ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles. Dans le futur, les cartes d’identité pourront remplacer le permis de chasse dans les secteurs où la NWTMN détient des droits de récolte autochtones ou issus de traités. Mais les deux parties devront en arriver à une attente aux termes de l’article 20 de la Loi sur la faune avant que cette carte d’identité métisse ne soit reconnue comme une preuve de droits de récolte.
L’entente de principe pour les réclamations territoriales a été signée en 2015. Le président de la Northwest Territories Métis Nation a bon espoir qu’elle sera ratifiée d’ici deux ans et que son peuple aura son propre gouvernement.
En ce qui a trait à l’article 35, observe le professeur d’anthropologie de l’Université Saint-Boniface, Denis Gagnon, la Couronne ne reconnait ce droit collectif qu’à la seule communauté métisse de Sault Ste-Marie, malgré plus de 60 causes juridiques. « C’est de responsabilité provinciale pour l’instant », ajoute le Docteur Gagnon, auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Quant à la reconnaissance de descendants éloignés, il indique que les communautés sont libres d’accepter qui elles veulent pourvu que ce ne soit pas un Indien inscrit. On ne peut cumuler les deux statuts.
Michif
Les Métis du nord-ouest, explique Garry Bailey, sont les descendants d’un coureur des bois métis, François Beaulieu, qui a marié une femme de la Première Nation Akaitcho. « Les Métis parlaient le michif, qui, selon moi, était une combinaison de crie et de français. C’était la langue du commerce des fourrures, mais elle a progressivement disparu avec l’évolution de ce commerce. Quelques vieux le parlent encore. Nous avons l’occasion de préserver le michif comme quelque chose de culturel, mais je ne crois pas que ça redeviendra une langue de tous les jours. »