le Samedi 12 juillet 2025
le Vendredi 24 mars 2000 0:00 Culture

Très peu pour moi, merci La boîte vocale !

Très peu pour moi, merci La boîte vocale !
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Au fil des ans, les choses ont bien changé, surtout depuis une dizaine d’années. Je parle de l’informatisation en particulier.

Croyez-le ou non, quand j’étais jeune, je me souviens du livreur de glace (il n’y avait pas encore de réfrigérateur, du moins pas où je demeurais) qui se promenait avec son cheval pour livrer la glace que l’on mettait dans ce qui s’appelle des glacières (à bon escient). Je me souviens de ma mère qui repassait avec de gros fers (2) en métal. Il y en avait toujours un sur le poêle à bois, avec l’autre, elle repassait. Quand il était froid, elle changeait de fer avec celui sur le poêle. Le repassage prenait des heures. Le lavage! Devrait-on en parler. Bien sûr, il s’agissait de laveuses à tordeur et le lavage durait toute la journée. Combien de familles ont eu un enfant qui se passait la main dans le tordeur. Affreux. Le lavage était une opération dangereuse. Après avoir connu de telles choses, je fus tout de même étonnée, une journée, que le fils de mes amis me pose une question qui m’a laissée décontenancée. C’était juste avant Noël. Pierre-Louis (le fils de mon amie) avait alors neuf ans. Il me téléphone et me demande de répondre à des questions sur les Fêtes pour un travail scolaire. Je m’apprête à répondre à ses questions avec zèle, mais la dernière m’a littéralement fait prendre un sérieux coup de vieux (je n’avais alors que dans le début de la quarantaine). La question. Geneviève, dans ton temps, quand tu étais petite, est-ce que tu avais des oranges pour Noël? Je veux bien croire que j’ai vu la fin d’une époque, mais de là à avoir des oranges pour Noël! Quand même! Est-il besoin de vous dire que j’ai parlé à sa mère après ça. Y’a toujours un bout!

Je poursuis mon raisonnement, car même si ce n’est pas toujours évident, j’ai vraiment un fil conducteur dans mes élucubrations.

J’ai donc vu l’arrivée du réfrigérateur, de la cuisinière électrique, de la laveuse automatique, de la télévision, de l’ordinateur et…de la boîte vocale (c’est là que je veux en venir). La boîte vocale! La plus belle invention pour faire damner un saint! Et je suis absolument certaine de ne pas être la seule à perdre patience devant ce pressage de boutons à n’en plus finir.

Pour service en français, faites le 1.

Voilà! Vous faites le 1 en vous demandant si vous avez pris la bonne décision : peut-être qu’il y a rien qu’une personne là qui parle français? Enfin, c’est trop tard. C’est fait. Vous écoutez la litanie d’options qu’on vous offre : prêts personnels, emprunts, information sur votre compte, faites le 1; réers, fonds mutuels, prêts garantis, faites le 2; etc. etc. À chaque fois, vous hésitez. Pas trop certaine de presser le bon numéro. Finalement, un peu énervée et surtout, pas trop certaine du numéro à presser, vous faites le 0 pour parler à un agent ou une agente. Là, au moins, le contact est humain. Vous pourrez expliquer, en toute intelligence de cause, la raison de votre appel. Le numéro en question est occupé. On commence par dire que votre appel est important, de rester en ligne et que quelqu’un va s’occuper de vous aussitôt que possible. Vous patientez. On vous « sacre » une musique impossible, qu’on entrecoupe de publicité : achetez le réer un tel, prenez un compte de tel genre, abonnez-vous pour faire vos transactions par téléphone!!! Puis la musique reprend de plus belle. Finalement, quelqu’un répond. Ça fait déjà 15 minutes que vous avez commencé le tout. L’agent au bout de la ligne est étonné de votre question et vous explique qu’après avoir pressé le 1, puis le 8, puis le 7 et finalement le 3, c’est le 5 qu’il vous auriez dû presser et non le 0. Au secours! Il va falloir tout recommencer. C’en est trop. Vous remerciez le plus poliment possible et décidez tout bêtement de vous rendre à votre succursale en rêvant du temps où le livreur de glace passait avec son cheval et où les numéros de téléphone n’avaient que trois chiffres.