Le temps où les musiciens se démenaient sur une scène « dans le but d’avoir une bière gratuite à la fin de la soirée » est révolu. Quelques années plus tard, avec cinq albums, Deux Saisons a franchi la frontière ontarienne et promène son folklore d’un bout à l’autre du pays. Le bout du pays, c’est aussi Yellowknife, un endroit méconnu des cinq gars, qu’ils ont pu observer au cours de leur nomadisme de musicien. Folk on the Rocks leur a donné le Grand Nord et Deux Saisons s’est donné au public ténois.
« C’est peut-être loin, mais ça a valu la peine, » mentionne Nicolas Doyon, l’un des membres fondateurs, peu de temps après leur prestation du samedi. Une présence marquée sur la scène du lac Long que la foule n’a pu s’empêcher de saluer. C’est que le quintette ne maîtrise pas seulement les reels, mais également l’humour. « Avec un public anglophone, il faut s’adapter et incorporer du visuel, de la communication », exprime Nicolas, qui se fait porte-parole en l’absence de ses compatriotes, dispersés sur le site. « C’est impossible de faire nos douze chansons l’une à la suite de l’autre sans faire participer le public. »
Deux Saisons s’est donc emparé de la scène principale, même si le groupe est passé accidentellement de cinq à quatre. Quelques instants avant le spectacle, Nicolas s’est blessé à l’index, remisant la mandoline en coulisse. « J’ai dû faire semblant de jouer. » Le moral ne leur a toutefois pas fait faux bond. Et le public n’y a vu que du feuŠ ou les steppettes de Jean-Marc Lalonde.
« Répétez après moi – repeat after me » Le groupe franco-ontarien jongle avec les langues officielles comme il manie l’archet. « C’est une formule que l’on utilise devant un public non francophone et qui n’est pas habitué à la musique canadienne-française. » Nicolas ajoute, charmé par son passage dans la région : « On ne savait pas du tout à quoi s’attendre. Le soleil qui ne se couche pas, les paysages sauvages, c’est merveilleux. » Un sentiment que semble partager à l’unanimité les membres du groupe.
Depuis leur rencontre au cours des années 1990, à l’Université d’Ottawa et sur la voie ferrée entre Hull, Chelsea et Wakefield lors d’un emploi d’été à bord d’un train à vapeur, Jean-Marc, Nicolas, Jocelyn, Marek et Mathieu ont poussé les limites du folklore. Avec la présence de plusieurs groupes du même acabit au pays, les gars ont du se démarquer. « Nous ne sommes pas des folkloriques purs, nous présentons de plus en plus nos propres compositions, à saveur folklorique. »
Nicolas Doyon, qui défini le groupe comme « un 45 minutes d’énergie positive », retrouve une part d’histoire dans son approche du folklore. « Ça m’a permis de me rapprocher de mes racines. » Et de rappeler qu’au temps de la colonisation, puisque les Irlandais, Écossais et Canadiens français ne pouvaient communiquer avec la même langue, ils se sont uni grâce au violon.
Nicolas ajoute :« C’est toujours inquiétant de donner un spectacle devant un public anglophone, Surtout dans une communauté que tu ne connais pas. » Bilan de leur visite : le pari est gagné. Leur violon a su faire le pont entre les cultures d’ici et de là-bas.