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le Vendredi 22 novembre 2002 0:00 Culture

Le réseau RFA En voie de disparition ?

Le réseau RFA En voie de disparition ?
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Si les coffres du Réseau francophone d’Amérique ne sont pas renfloués bientôt, le réseau pourraient arrêter sa mise en ondes en mars prochain.

Les bénévoles et les membres du comité exécutif de la radio francophone ont été étonnés d’apprendre, le 14 novembre dernier, que le Réseau francophone d’Amérique (RFA) pourrait ne plus être en ondes à partir du 31 mars 2003 en raison d’un manque de financement. Michel Lefebvre, vice-président de l’Alliance des Radios Communautaires (ARC), en a fait mention lors de l’Assemblée générale annuelle de l’organisme qui, présentement, rempli l’essentiel de sa programmation hebdomadaire avec le matériel produit par RFA. Le porte-parole a toutefois calmé les bénévoles en indiquant que d’autres réseaux de diffusion pourraient prendre la relève à CIVR. « On peut toujours continuer à évoluer sans RFA. On pourrait prendre un autre réseau, comme Cité Rock Détente ou le réseau Radio Énergie, a-t-il mentionné. Mais c’est un réseau qui vient du Québec, qui ne parle pas nécessairement de la réalité franco-canadienne hors Québec. »

La liaison en réseau des dix-huit stations communautaires pourrait ne devenir qu’un souvenir si la situation financière de la station-mère, située à Ottawa, n’est pas redressée. Ce spectre de l’isolement fait craindre le pire aux dirigeants du conseil d’administration de l’ARC. « Ça créerait certainement un gros vide, mais je crois que la chose la plus importante, c’est que ça couperait le lien très important qu’on a développé au cours des années », a indiqué le président de l’ARC du Canada, Réjean Aucoin. Le vice-président, Michel Lefebvre, partage le même avis. « On avait tous quelque chose en commun, nous sommes des radios communautaires en situation minoritaire. On perdrait le réseau qui nous unit à 17 autres radios au Canada », a-t-il laissé savoir.

Le réseau vit essentiellement d’un financement accordé par la compagnie de câblodistribution Shaw Communications, qui, d’année en année, verse 5 % de ses profits à des organismes médiatiques communautaires. Or, depuis quelques années, les profits de la compagnie ont considérablement diminué, ce qui menace la survie à long terme du réseau. Le déficit augmente et les 300 000 dollars accordés chaque année par la compagnie à RFA pourraient être amputés d’une bonne partie. « On a fait un déficit l’an dernier et il se pourrait bien qu’on s’en aille vers un nouveau déficit cette année, a indiqué Réjean Aucoin. Malheureusement, il n’y a rien à l’horizon pour nous indiquer que nos coffres vont être renfloués. »

Si le réseau recevait un financement fixe de la part du fédéral, l’équilibre serait maintenu. Or, contrairement à l’Association de la presse francophone, qui a créé sa propre compagnie de représentation publicitaire, l’ARC ne met la main que sur des contrats de vente publicitaire sporadiques. Les recettes sont maigres, et l’organisme a tenté, au cours des deux dernières années, de faire augmenter le nombre de contrats, mais sans succès. « On a fait pression sur le gouvernement fédéral pour avoir une plus grande part de la publicité fédérale destinée aux médias, a révélé le président de l’ARC. On a réussi à faire changer la politique et faire inclure les médias francophones. Mais rien n’oblige les agences gouvernementales à annoncer dans les radios communautaires. » Au cours de ces deux années de pressions politiques, les revenus de publicité provenant du gouvernement fédéral ont chuté de près de 50 % au lieu d’augmenter.

Le problème, selon les intervenants, c’est que RFA n’entre dans aucune catégorie de financement du ministère de Patrimoine canadien, qui subventionne déjà plusieurs réseaux de communications. Selon le président de l’ARC, un réseau de radios autochtones touche annuellement près de 10 millions de dollars pour un auditoire de 25 000 personnes. RFA a droit à un financement de 250 000 dollars, pour un bassin d’auditeurs de 400 000 personnes. « Il y a un budget pour Radio-Canada, un autre pour les radios autochtones, mais il n’y en a pas pour RFA. Nous sommes un nouveau joueur. Je pense qu’il n’y a aucun ministre au Canada qui voudrait voir disparaître RFA, car tout le monde réalise qu’on dessert une population que personne d’autre n’est capable d’aller desservir. »

Les dirigeants de RFA sauront bientôt si la ministre de Patrimoine canadien, Sheila Copps, est de cet avis. Une rencontre est prévue prochainement, visant à déterminer de quelle façon le réseau pourrait être financé à même les fonds publics. Le président Aucoin veut savoir si RFA peut toucher de l’argent provenant du Fonds de production des câblodistributeurs, un fonds créé en 1995 et financé par les câblodistributeurs canadiens. « Seulement les télévisions communautaires peuvent accéder à ce fonds », ajoute le président, qui suggère que soit créé un fonds géré par les radiodiffuseurs privés. De son côté, Michel Lefebvre a déjà entrepris des démarches auprès de la député libérale de Western Arctic, Ethel Blondin-Andrew, pour qu’elle fasse pression sur la ministre Copps.