Avec ses clichés en noir et blanc, Maxime Liron va à contre-courant et ne veut pas représenter la nature qui caractérise le Grand Nord.
Sur la série d’une dizaine de photographies, seulement deux mettent en scène une icône du Grand Nord : le chien-loup, la nuit, qui hurle aux étoiles. Le jeune photographe Maxime Liron ne tourne pas le dos aux représentations de l’Arctique, mais préfère illustrer ce que l’œil ne perçoit pas du premier coup : une vieille porte de bois enfoncée dans la pierre ou les mouvements rapides d’un joueur de rugby en pleine action. Les visiteurs qui s’arrêtent à l’école secondaire Sir John Franklin, de Yellowknife, peuvent pénétrer dans le monde de cet adolescent français au parcours atypique, qui a marché dans les pas de son père, photographe, et dans les pas de sa mère, aventurière installée au nord du 60e depuis peu.
Les photographies ont été prises à Vancouver, en France et à Yellowknife. D’emblée, il admet préférer prendre en photo la décharge publique plutôt que les aurores boréales. « Les aurores me passent par-dessus la tête. Je ne fais que du noir et blanc, pas de couleurs. » Peu bavard, il laisse entendre que la nature n’atteint pas ses cordes sensibles. « J’aime plus le style classique », résume l’étudiant de 16 ans, dont le travail est exposé en solo pour la première fois. Un style qu’il va chercher dans les contrastes de lumière, le mouvement, le noir et blanc, les lignes et les formes.
C’est lors de la première classe de photographie de l’année scolaire que Maxime a montré son travail à l’enseignant Les Cameron. Déjà habile, le jeune photographe a vite délaissé les chaises du cours pour débutants, mais l’enseignant a voulu mettre sur pied l’exposition. Selon ses dires, le travail de Maxime est unique en soi. « Il utilise un filtre rouge qui absorbe les couleurs complémentaires. En noir et blanc, le bleu devient donc noir. C’est tout un accomplissement de développer son propre style à cet âge-là », explique Les Cameron, qui qualifie les images d’exceptionnelles par la composition, la qualité de l’impression et le choix des sujets.
Maxime Liron a commencé à manipuler un appareil photo lorsqu’il avait 11 ans. Il vivait alors en Colombie-Britannique et sa mère, qui venait tout juste d’acheter un appareil, est partie en balade avec lui dans un des parcs de Victoria. « Il m’a proposé d’aller dans le parc, de prendre un carnet, de faire des photos et d’inscrire à quelle ouverture et à quelle vitesse elles avaient été prises. Par la suite, c’est lui qui a continué tout seul », raconte Frédérique de Gasquet, qui décrit son fils comme un adolescent timide et solitaire.
Son talent ne passe pas inaperçu. Lorsqu’il avait 13 ans, sa mère a voulu l’inscrire dans un cours de photographie couleur en Colombie-Britannique, donné par une photographe professionnelle. Après une première rencontre, la photographe a indiqué à Frédérique de Gasquet qu’elle ne voulait pas donner de cours à son fils. « Elle m’a dit qu’il était dans un cheminement de l’école classique de la photo et qu’elle ne voulait pas qu’il apprenne de son style », se remémore Mme de Gasquet.
Le jeune photographe admet que le Nord offre des défis particuliers au capteur d’images. « Les jours sont plus courts et le froid complique le travail, car il faut utiliser ses mains sans les gants », révèle celui qui est originaire du sud de la France. Même si son rythme s’est ralenti avec les jours d’hiver, il veut capturer sur pellicule la culture autochtone, les courses de traîneaux à chiens et peut-être même le froid, histoire de se réconcilier avec ce qui lui complique la vie. Il traîne toujours sur lui un petit appareil 35 millimètres Rollei, ayant appartenu à sa mère, pour l’inspiration momentanée.
Ce n’est pas la première fois que l’école secondaire met sur pied une exposition de photographies, mais c’est une première pour une exposition à contenu artistique. Maxime Liron, qui n’envisage pas de faire carrière en photographie, veut également montrer son travail au Centre septentrional Prince-de-Galles. L’exposition se poursuit au cours des prochaines semaines.
