Réaliser un long-métrage sans parole au XXIe siècle ? François Chomet l’a fait, et admirablement d’ailleurs. Ça s’appelle Les triplettes de Belleville.

Pas un mot n’est prononcé durant les 78 minutes que dure ce petit bijou d’animation. Mais entendons-nous, Les triplettes ce n’est pas un film muet pour autant ; c’est un film musical. Le Québécois Ben Charest, mis en nomination pour l’Oscar de la meilleure chanson, a créé une enveloppe sonore si riche qu’on oublie rapidement l’absence de dialogue. Qui n’a pas tapé du pied en entendant la chanson thème « Belleville rendez-vous » interprétée par l’iconoclaste M ?

Et s’il n’y avait que ça. Tout dans ce film est déjanté, à commencer par l’histoire. Une grand-mère boiteuse traverse l’Atlantique en pédalo pour retrouver son petit-fils, un cycliste enlevé par la mafia. Arrivée à Belleville – qui ressemble étrangement à Montréal – elle s’allie avec les Triplettes, trois musiciennes de cabaret excentriques et friandes de grenouilles. Vous avez bien lu !

Eh puis il y a le dessin. Très jazz, il rappelle un peu le travail du muraliste afro-américain Justin Bua. Tous ces personnages plus improbables les uns que les autres vous feront vous tordre de rire. Il faut voir le serveur éternellement plié, les mafiosi rectangulaires et les cyclistes aux mollets boursouflés à l’extrême. On repère aussi quelques caricatures. Parmi les plus évidentes on compte Charles de Gaulle, Django Reinhard et la statut de la Liberté, tous (mal)traités par la plume incisive de François Chomet.

À tout cela s’ajoutent un regard moqueur sur l’Amérique, une bonne dose de surréalisme et un humour narquois. Devant pareil déferlement de créativité débridée, il y a de quoi rester sans voix.

Les Triplettes de Belleville est présenté gratuitement mercredi le 3 novembre, à 19 h 30, à l’École Allain St-Cyr. Apportez votre ouverture d’esprit.