Comme les élèves, le Ciné-club fait relâche cette semaine. Pour faire changement je vous propose un peu de poésie.
Dans À l’ombre de sainte Anne – Dans la tourmente de nos envies, Pierre Demers revisite son adolescence passée dans un juvénat. Dans un prose poétique sans artifice, il raconte la vie castrée de ces garçons à qui l’on offrait une éducation gratuite parce qu’ils avaient « la vocation ».
Comme dans son premier recueil, Charny, Demers se distingue avec un style simple et efficace. Chacun de ses poèmes tient sur un page et raconte un morceau de mémoire. En une trentaine de lignes il arrive à piquer notre curiosité, à nous fournir assez d’images pour apaiser notre soif et à conclure avec une de ces chutes cyniques dont il a le secret.
Cette approche simple de la poésie rend le style de Pierre Demers étonnement accessible. L’amateur de poésie y trouvera un travail juste et rempli de surprises ; le néophyte sera comblé par une œuvre digeste qui donne le goût de découvrir autre chose.
Pierre Demers planche présentement sur un recueil consacré à Cuba ainsi qu’à une anthologie de ses poèmes urbains publiés dans la revue montréalaise à micro-tirage Steak Haché. Nous les attendons patiemment.
Pour rester dans le domaine du bon poème facile à lire, je vous recommande Brève de saison de François-Bernard Tremblay. Il s’agit d’un recueil de haïkus, ce petit poème en trois vers qu’on dit zen et qui a gagné un nombre considérable d’adeptes ces trois dernières années.
Alors que la planète haïku est peuplée de recueils bas de gamme écrit à la va-vite par des nimporte-qui formé dans un atelier éclair dans un sous-sol d’église, les haïkus de François-Bernard Tremblay, eux, sont le fruit d’un travail stylistique qui a accaparé dix ans de la vie du poète.
Le résultat est surprenant : une série de visions moqueuses qui évoque le présent et rompent avec la tradition contemplative des haïkistes classiques. En trois lignes, Tremblay nous offre une perspective qu’il scelle avec brio derrière un chute toujours à point. Des poèmes comme « Surprise au bistrot/ cette jolie fille accoudée au bar / mon voisin » on en lirait pendant des nuits entières.
Aux dernières nouvelles François-Bernard Tremblay souhaitait rompre avec le haïku pour se consacrer à la science-fiction. Drôle de parcours…
À l’ombre de Sainte Anne est publié chez Trois-Pistole et Brèves de saison aux Éditions David.
