le Dimanche 3 août 2025
le Vendredi 5 mai 2000 0:00 Divers

Ça fait combien de temps que tu restes ici?

Ça fait combien de temps que tu restes ici?
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Yellowknife! Place agréable à vivre en est-il une…enfin, ça dépend pour qui. Il y a des gens qui ne s’adaptent jamais. J’en ai connus et je suis certaine que vous en connaissez aussi. Moi, j’ai aimé tout de suite. Venant du Lac Saint-Jean, la différence n’était pas énorme. La température : ça se ressemble. Le paysage : ça se ressemble. Le monde : ça se ressemble. Bref, bien des ressemblances qui ont fait en sorte que mon adaptation a été plutôt rapide et disons-le, facile.

L’une des premières choses qui m’a étonnée a été le genre de snobisme qui existait ici. Non, ce n’était pas un snobisme genre : regarde comment je suis habillé. Ce n’était pas un snobisme du genre : regarde le salaire que je fais. Ce n’était pas non plus un snobisme genre : mon père est ci ou ça. Non, c’était un snobisme genre : ça fait combien de temps que tu es ici. Eh oui! Chaque coin son snobisme et ici, c’était le cas il y a dix ans et, si je n’abuse, c’est encore bien le cas. C’est un peu comme si pour avoir ses lettres de noblesse ici, il fallait faire preuve de temps. C’est le temps qui permet d’accéder au club sélect des « Old timers ». Tant que vous n’affichez pas au moins…une dizaine d’années, pas question de faire partie de ce club.

Je n’ai jamais entendu parler de ce club, me direz-vous. C’est qu’il n’existe pas vraiment, sur papier. Il existe de façon virtuelle ou, si vous voulez, il existe dans l’inconscient collectif des résidents. Elle radote, croyez-vous. Pas tant que ça. Ici, seul le temps permet de prétendre faire partie intégrante du Nord, du Grand Nord, de l’Arctique canadien, du nord du 60e parallèle. C’est un peu comme ça que ça s’est passé pour moi, et c’est encore un peu comme ça que ça se passe dans notre ville septentrionale.

Tout ça est particulièrement flagrant quand vous avez le malheur d’avoir un accent français (entendre québécois, ou belge, ou suisse, ou tout simplement français) quand vous parlez. Alors là, pas de pardon pour vous, si vos années de résidence ne sont pas assez nombreuses pour justifier votre présence. Ça me fait encore rire quand quelqu’un me pose la question, espérant une réponse genre : « Ça fait cinq ans…ou six…ou deux » et que vous lui répondez fièrement : « Dix ans ». Des fois, c’est hilarant de voir la réaction. Pas besoin d’un bac en psycho pour comprendre ce qui se passe dans la tête de l’interlocuteur : « Quoi, dix ans et encore cet accent français? » Eh oui, cher interlocuteur, non seulement encore l’accent français, mais l’accent du Lac Saint-Jean.

J’adore Yellowknife et ses habitants. Je me sens bien dans cette petite ville aux allures de grande ville. On y est bien et, vous l’aurez compris, on y est bien accepté, même si l’appartenance, la vraie, prend un certain temps à être reconnue.

C’était simplement un clin d’oeil aux nouveaux arrivants (cinq ans et moins) et une vision humoristique de mes premières armes ici.

Donc, la prochaine fois que vous arrivez à Edmonton, de retour de voyage, et que vous êtes excité car vous reconnaissez plein de gens à l’aéroport et que vous commencez à vous sentir « chez vous », profitez-en bien. C’est un bon « feeling » et c’est surtout un vrai « feeling ». Si vous vous sentez chez vous à l’approche de Yellowknife, c’est que cette ville est devenue votre vrai chez vous, peu importe ce que les autres en pensent. Peu importe le temps, quand vous ressentez ce sentiment, c’est que vous arrivez chez vous.