Il m’arrive, tout comme à vous, j’imagine, d’en avoir tellement assez de la bêtise humaine que l’envie me prend de me retirer tellement loin que je n’aurai plus conscience de cette bêtise, sinon de la mienne.
Mais quel genre de choses me pousserait à me retrancher dans des quartiers oubliés. Des milliers de petites choses qui empoisonnent la vie et qui sont tellement frustrantes. Des exemples? Vous marchez tout bonnement dans la rue, lorsque soudain, vous entendez un grand grattement de gorge qui fait trembler le trottoir et soudain, un grand crachat vient atterrir à vos pieds. Si vous aviez marché un peu plus vite, c’est sur la gueule que vous l’auriez pris. Dégoûtant!
Vous prenez votre voiture pour aller faire des courses. Il a neigé dans la nuit et c’est glissant comme une patinoire. Des chauffards se faufilent entre les voitures qui se suivent à la queue leu leu, dérapant, frôlant, glissant, menaçant. Imaginez qu’ils ont des véhicules quatre roues motrices. Est-ce quatre roues motrices est synonyme de droit à la débilité? Des fois, on serait porté à le croire.
Vous sortez d’un édifice public et la personne devant vous vous claque pratiquement la porte sur le nez. Aucune excuse. Un peu plus et elle vous demanderait de vous excuser d’être derrière elle!
Vous marchez tout doucement dans la rue, par une belle journée d’automne pluvieuse. Il y a des trous d’eau un peu partout, mais c’est agréable. Arrive un gros char, avec ses gros occupants et ses grosses roues mag, et vlan! Vous en prenez une volée. Vous êtes trempé de la tête au pieds. Obligé de rentrer en vitesse à la maison, car vous allez attraper la crève. Je ne donne que de petits exemples de la vie ordinaire. J’aurais pu vous en donner de bien pires, et je suis certaine que vous en avez en tête. Point besoin de m’attarder sur ça. Donc, ces jours-là, et souvent, entre ces jours-là, je me dis, je vais aller m’installer sur une île déserte. Plus de crachats, plus d’éclaboussures,de voitures, plus de portes qui te cassent le nez. Rien que la paix, la sainte paix. Mais, me direz-vous, sur ton île, tu vas avoir plein de visites, plein de monde qui va venir te voir. Une île charmante, c’est attirant. Ce que j’avais volontairement oublié de vous dire, c’est que mon île sera perdue dans le Grand Nord. Une île perdue dans un coin du Grand lac des Esclaves, ça vous dit, vous autres, en plein hiver, à -40°C, sous un vent à écorner les boeufs. Non, mon île ne sera pas dans les Marquises ou les Seychelles, mais tout bonnement sur le Grand lac. Je dirai alors adieu au monde et irai me pratiquer à assurer ma subsistance dans la grande nature sauvage, oubliée de tous. En attendant, mon instinct grégaire continue de me titiller et je m’en vais à l’épicerie, en espérant qu’un incident fâcheux se produise pour infirmer mon désir de retraite boréale. Vivement les caribous!
Réponse à mon lecteur
Ceux d’entre vous qui ont bien lu l’Aquilon la semaine dernière auront sans doute remarqué la lettre que le père René Fumoleau m’a écrite à propos de mon article sur les Jeux olympiques ou je parlais des Américains. À cinq reprises, souligne-t-il, j’ai utilisé le mot Américains pour parler de nos voisins du sud. À bon escient, et je l’en remercie, le père Fumoleau a noté que tous les habitants des Amériques sont des Américains. Et il a vraiment raison. Il suggére de les appeler les habitants des États-Unis. J’ai une suggestion à lui faire, et à vous faire, chers lecteurs. On appelle les personnes qui travaillent à l’ONU, l’Organisation des Nations Unies, les Onusiens. Ça fait martiens, me direz-vous. Peut-être un peu, mais si vous écoutez les nouvelles en français, vous entendrez de plus en plus parler des Onusiens. Le mot est également utilisé comme adjectif : le secrétaire onusien. Enfin, tout doucement, ça passe dans l’usage. Donc, pour en revenir à mes moutons, ou plutôt à mes habitants des États-Unis, la proposition que je ferais (et qui a été suggérée par bien d’autres avant moi) serait États-Uniens. Le mot est formé selon les règles de la sainte grammaire française et ne crée aucune ambiguité sur le propos. Voilà une petite suggestion que je fais et on verra si un jour le mot sera assez utilisé pour obtenir ses lettres de noblesse. Qu’en pensez-vous, père Fumoleau, et vous, chers lecteurs?
Je profite également de l’occasion pour vous inciter à m’écrire si vous le désirez. Vous pouvez non seulement me faire parvenir un courriel, mais également me faire parvenir une lettre par le biais de l’Aquilon, ou tout simplement écrire directement au journal. Ne vous gênez pas. J’accepte la critique. Ceci dit, je passe à ma chronique hebdomadaire.