« Nous sommes tannés d’entendre ces mensonges », déclare le vice-président du Conseil canadien de la fourrure, Alan Herscovici. Il parle des allégations des groupes de défense des droits des animaux à l’effet que la fourrure est une industrie cruelle et nocive pour l’environnement.
Cette position n’a rien d’étonnant. Le Conseil canadien de la fourrure est un organisme qui représente tous les secteurs de l’industrie de la fourrure, du trappeur au designer. Ce qui est surprenant est qu’il affirme carrément le contraire. La fourrure, assure M. Herscovici, est un choix écologique. « La fourrure est une matière durable et biodégradable qui soutient l’économie des régions rurales et éloignées, dit-il. […] C’est un cadeau de la nature. »
Selon le Conseil canadien de la fourrure, ce serait les fibres synthétiques qui seraient les plus nuisibles pour l’environnement. Sous-produit du pétrole traité aux produits chimiques tels que l’oxyde nitrique, la fausse fourrure aurait un impact bien plus négatif sur la nature. « Nous porterons encore de la fourrure bien après que les ressources pétrolières se seront épuisées », affirme le vice-président du Conseil canadien de la fourrure. « Il faut arrêter de confondre les groupes de défense des animaux et les écologistes, poursuit Herscovici. D’ailleurs presque tous les grands groupes environnementalistes – et là je parle d’organismes mondialement reconnus comme le World Wildlife Fund – favorisent son utilisation durable. Les vrais écologistes portent de la fourrure. » Récemment, Eugène Lapointe, un ancien secrétaire général de la Convention sur le commerce des espèces menacées affirmait que « les vêtements fabriqués en fourrure naturelle sont beaucoup moins polluants à produire que ceux en fourrure synthétique ».
Balivernes
Lisa Franzetta est porte-parole pour People for the Ethical Treatment of Animal (PETA), un lobby international de défense des droits des animaux basé dans l’état américain de la Virginie. Selon elle, les propos du Conseil canadien de la fourrure ne sont que des balivernes. « Porter de la fourrure c’est un meurtre ; ce n’est pas un choix moral », dit-elle catégorique. Même quand il s’agit d’une activité traditionnelle pratiquée par les Autochtones, PETA est inflexible : il ne faut pas tuer pour se vêtir. « Nous sommes une organisation abolitionniste. Nous ne nous en cachons pas, déclare Mme Franzetta. Nous ne nous excuserons pas de nous opposer au massacre des animaux sous toutes ses formes. »
Mais dans le contexte du réchauffement planétaire et de ses conséquences sur les populations animales, porter des fibres synthétiques issues de l’industrie pétrochimique n’est-il pas plus grave ? « Non ! », répond du tac au tac celle qui a été vue à quelques reprises se promenant nue avec une banderole indiquant qu’elle préférait ne rien porter du tout plutôt que de porter la peau d’une bête. « La fourrure implique un acte de cruauté concerté. Et si les gens souhaitent ne pas consommer de produits pétroliers, rien ne les empêche d’opter pour des fibres naturelles qui ne sont pas animales. »
Or, quand on lui demande quelle alternative on peut choisir pour affronter les rudes hivers ténois, elle répond systématiquement des matériaux synthétiques. « Le Gore-Tex est beaucoup plus chaud que le castor », soutient-elle. Évidemment, elle exclut la laine qui est aussi sur la liste noire de PETA.
Pièges
Le site Web www.furisdead.com, le site officiel de la campagne anti-fourrure de PETA, regorge d’images atroces de bêtes prises dans les pièges des trappeurs. Selon Alan Herscov, ici cette représentation de la trappe est mensongère.
Au Canada, les pratiques ont évolué, assure-t-il, désormais les pièges sont conçus pour minimiser les souffrances des animaux. « Nous n’employons plus de pièges à patte sauf pour les grosses espèces pour lesquelles nous n’avons pas d’autres choix. Les histoires de bêtes qui restent prisonnières des pièges pendant deux ou trois jours, c’est fini ça », insiste-t-il. Les trappes de la nouvelle génération, explique le vice-président, tuent les animaux sur-le-champ.
Cet argument n’a pas l’heur de convaincre Lisa Franzetta. « Des pièges à pattes, il en reste et ce ne sont pas toujours les “bonnes” espèces qui marchent dedans. Aux États-Unis, des milliers de chiens tombent dans ces trappes à chaque année. »
Clientèle
Éthique ou pas, la fourrure demeure un incontournable de la mode nordique et ce ne sont pas les chicanes de groupes de pression qui vont orienter le choix de la clientèle, estime Janet Hamilton qui travaille à la boutique Just Furs de Yellowknife, spécialisée dans les vêtements velus.
« Les femmes achètent souvent la fourrure pour la mode ; les gars achètent plus pour la chaleur que cela procure », constate-t-elle. Mais elle ne se souvient pas avoir rencontré de clients qui lui ont confié opter pour la fourrure parce que c’est un choix écologique ou par souci d’encourager l’économie locale. Il ne lui est jamais arrivé, non plus, de se faire accuser de travailler pour une industrie de la mort.
« Les gens qui ne sont pas confortables avec la fourrure, en général, ils ne viennent pas ici. Et d’ailleurs, si vous vivez dans les TNO, vous avez le choix de ne pas en porter si c’est contre vos principes, mais pour rester au chaud ça prend de la fourrure. »