La rencontre prévue entre les trois premiers ministres du Nord et le premier ministre, Jean Chrétien, a porté fruit. C’est probablement avec le sourire que tout le monde a quitté le 24 Sussex, le 20 février dernier. Après maintes négociations, le premier ministre Jean Chrétien a finalement rempli les poches des territoires du Nord. Dès la prochaine année fiscale, 60 millions de dollars seront versés dans un fonds pour financer le système de santé des trois territoires.
Cette annonce est survenue deux semaines après la rencontre des premiers ministres sur le financement des soins de santé. Stephen Kakfwi, Paul Okalik et Dennis Fentie avaient pris la porte pour exprimer leur désaccord face aux sommes consenties pour les territoires. Calculés selon le nombre d’habitants, ces montants représentaient d’une à deux semaines de fonctionnement du système de santé dans le Nord, soit environ 38 millions sur trois ans. Avec la promesse d’un fonds distinct, ajouté aux montants distribués par habitant, les territoires peuvent espérer aller de l’avant avec l’Accord signé par les provinces le 5 février dernier. « Nous espérons être en mesure de participer à l’Accord, parce qu’il s’agit de réforme et nous sommes intéressés à supporter cette réforme », a indiqué le premier ministre Stephen Kakfwi, devant les journalistes des médias nationaux. Avec cette annonce, les TNO toucheront, dès la prochaine année, 25 millions pour améliorer l’accessibilité aux soins de santé.
Ce n’est pas le montant qui avait été demandé par les territoires. Les territoires avaient exigé que 0,5 % de chaque nouveau milliard investi dans le système de santé soit versé à chacun des territoires. Avec l’investissement d’un peu plus de 13 milliards sur trois ans, les territoires auraient touché 65 millions chacun, soit 20 millions par année. Le fonds de 60 millions sera divisé en trois parts égales. Le fédéral veut distribuer le 20 millions sur cinq ans, tandis que les territoires exigent qu’il soit attribué sur trois années, ce qui représenterait un peu plus de six millions par an, soit le tiers demandé. Par contre, l’obtention d’un fonds distinct est une réponse favorable aux demandes répétées des territoires. Le montant de 60 millions est également une somme minimum, qui pourrait augmenter.
Autre victoire pour le Nord, le premier ministre Jean Chrétien a mandaté le Greffier du Conseil privé de réviser la formule de financement par habitant pour le Nord. Cette formule handicape le Nord qui, compte tenu de la petite population, récolte de maigres montants provenant des programmes fédéraux. De l’avis des trois premiers ministres, cet engagement est garant de changements pour le futur, comme l’exprime le premier ministre du Yukon, Dennis Fentie. « Je crois que nous pouvons dire que les territoires ont amélioré leur situation en santé aujourd’hui et peuvent dorénavant aller de l’avant de façon positive. »
Le fonds sera destiné en priorité aux besoins pressants en santé. À long terme, cet argent servira à implanter l’Accord, qui prévoit, entre autres, la mise sur pied d’un programme d’assurance-médicament et l’expansion du service de soins à domicile. Les soins de première ligne devront également être améliorés, pour désengorger les hôpitaux. Avec des coûts d’exploitation plus élevés, les territoires peuvent espérer, avec le fonds, offrir à leurs citoyens les mêmes services que dans le Sud. Malgré cet argent, le premier ministre du Nunavut, Paul Okalik, a mentionné que les territoires ne pourront jamais être sur le même pied d’égalité que le Sud. « Nous devons collaborer avec le Sud pour offrir plusieurs services qui sont normalement offerts aux Canadiens. Avec cet argent, nous pourrons rattraper le reste du pays et implanter des soins de santé selon les attentes. » Les territoires ont quand même suivi le mouvement canadien et assaini les dépenses de leurs systèmes de santé au cours des deux dernières années. La télésanté est venu augmenter l’accessibilité pour les communautés rurales. « Nous avons fait notre part, mais avec de l’argent additionnel, nous pourrons faire encore mieux », a ajouté le premier ministre du Nunavut.
Le désir de parvenir à l’autosuffisance a été exprimé par les premiers ministres, qui voudraient bien qu’une nouvelle formule de financement soit appliquée à d’autres domaines, comme les infrastructures ou le développement économique. « Nous ne voulons pas être dépendant d’Ottawa. Nous voulons devenir autosuffisant pour pouvoir participer à l’économie de ce pays », a mentionné Dennis Fentie.
Cette rencontre, organisée par la députée libérale de Western Arctic, Ethel Blondin-Andrew, et à laquelle a participé la ministre fédérale de la santé, Anne McLellan, a permis de rétablir les liens avec le fédéral, qui avaient été malmenés le 5 février. « C’est important d’avoir une bonne relation avec le premier ministre de ce pays », a indiqué Stephen Kakfwi, qui s’est dit satisfait de l’effort commun des territoires. « Cette relation avait besoin d’être redéfini et c’est ce qui a été fait aujourd’hui. »
Le premier ministre a mandaté le Greffier du Conseil privé de déterminer les détails entourant l’utilisation de ce fonds au cours des prochaines semaines. L’étude d’une nouvelle formule de financement devra se faire d’ici le 1er avril 2004. La ministre fédérale de la Santé, Anne McLellan, sera de passage dans le Nord au cours des deux premières semaines de mars.